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L’œil de Fabrice Lardreau est attiré par le détail. À onze ans, il est au cinéma avec sa mère pour voir « L’argent de poche » de François Truffaut. La première scène – avant le générique – l’intrigue. Il ne cessera de penser à cette petite fille avec sa carte postale en plein centre de la France. Quarante ans plus trad, il se dirige vers cette terre inconnue qu’est le Berry, à Bruère-Allichamps précisément, le cœur de la France ; même si des autres calculs le situe en divers lieux. L’écrivain journaliste va interroger les gens du village, humer cet endroit vallonné – bien loin du plat pays qu’il imaginait – pour y dresser une enquête sociétale au-delà des clichés. Car l’histoire de cette France du milieu est le carrefour d’une histoire française.
Le tournage de cette scène et François Truffaut prennent une large place dans cet essai aux côtés des habitants de Bruère et des souvenirs d’enfance de l’auteur. Cette dizaine de personnes interrogées est un échantillon représentatif des français moyens (sans aucune connotation péjorative) auxquels s’ajoutent quelques traits caractéristiques du Berrichon comme la simplicité, l’absence d’orgueil mal placé et la prudence.
Le lecteur fait donc la connaissance du maire Patrick Ciajolo (en 2016), de Madeleine Gilbert, la mémoire vivante de la commune, de Nicole et Didier du café central, Christine de l’agence postale, de Nicole… qui racontent leurs parcours respectifs et donnent leurs impressions sur cette vie villageoise où tout se sait, circule mais où il fait bon vivre par rapport aux grandes villes. Même si tous constatent le délitement du lien social, l’homogénéisation des territoires et la tendance cité-dortoir avec les nouveaux arrivants.
Ce cœur de la France a une longue histoire et Fabrice Lardreau nous apporte en apéritif des éléments pour que chacun puisse prolonger ensuite la dégustation sur place. À commencer par la fameuse colonne du centre de la France remontant au temps de l’empereur Caracalla jusqu’à sa position actuelle décidée en 1799 par le duc de Béthune Charost, un bienfaiteur de l’humanité et qui appartient à la grande histoire du château de Meillant situé à quelques kilomètres de Bruère. Autour, le prieuré d'Allichamps, l’abbaye de Noirlac, le domaine de Châteaufer et la ville de Saint-Amand-Montrond où le Grand Condé a laissé d’innombrables empreintes. Une région confrontée aux nombreuses guerres et qui se souvient, entre autre, des nombreux réfugiés espagnols envoyés sur ces terres.
Selon l’une de ses habitantes, Christine, on n’arrive pas dans le Berry par hasard… Et si tous les chemins menaient à Bruère-Allichamps ?
Le Domaine de Squirelito ==> https://squirelito.blogspot.com/2023/12/une-noisette-un-livre-le-carrefour.html
Lorsque Patrick Amiot retrouve Maupertuis avec qui il était à l'école, ce dernier l'embauche dans sa multinationale pour un travail bien particulier. En habitué des projets grandioses, des construction démesurées, Maupertuis construit le Grand Metro d'une ville importante nommée Lutetia et qui ressemble fortement à notre capitale française.
Oui mais voilà, la ville devient rousse, comme ces goupils qui l'envahissent, la nuit. On pense à la chanson de Reggiani « Les loups sont entrés dans Paris ». La menace est là, même si certains défendent ces mignons rouquins. Leur invasion ne fait pas l'affaire de Maupertuis qui voit ces sales bêtes envahir les tunnels du futur métro et menacer les ouvriers. C'est là que Patrick Amiot déploie ses compétences en devenant le prédateur des renards et son cynisme est total. Tout en massacrant sans état d'âme le goupil envahisseur, il flatte et embobine l'écologue amoureux du rouquin et chargé de trouver une solution alternative au problème
Avec le nombre toujours croissant de ces carnivores qui font des dégâts considérables, la ville devient rousse et vit au rythme du renard qui s'est imposé grâce à sa ruse et son adaptabilité.
L'histoire va s'accélérer et partir en vrille pour le plus grand plaisir du lecteur.
Cette dystopie teintée d'humour noir est réjouissante tout en menant la réflexion sur la cohabitation urbaine entre l'homme et l'animal sauvage.
Avec le projet du Grand Métro, la ville de Lutétia devient un immense chantier. Dans cette métropole qui avait opté pour une végétalisation massive, ces travaux titanesques visent à transformer la capitale et sa périphérie en une « Ville-Monde » réservée aux privilégiés.
Alors, doucement, un par un, comme les loups dans la chanson de Serge Reggiani, LES RENARDS SONT ENTRÉS DANS LUTÉTIA.
Et tandis que LE BÉTON BOUFFAIT L’PAYSAGE
IL EN VINT DES MILLE ET DES CENTS
FAIRE CAROUSS’, LIESSE ET BOMBANCE
DANS CE FOUTU PAYS DE FRANCE.
Patrick Amiot est engagé comme « chasseur urbain » par son ami d’enfance Christian Maupertuis, PDG de La Compagnie, une multinationale de construction en charge des travaux.
Mais au lieu de RETROUVER L’AMOUR ET LA FRATERNITÉ, les hommes aux commandes, dans un objectif de Grand remplacement, rejettent hors du Grand Lutétia, les classes populaires au profit des classes favorisées.
Un conte futuriste qui parle de renards mais pas que … et qui, comme on peut s’en douter, ne se termine pas aussi bien que le texte d’Albert Vidalie.
Drôle et percutant, ce court roman fait froid dans le dos. Fabrice Lardreau nous invite à réfléchir au déséquilibre que crée l’élitisme, en nous rappelant que, sans comptes à rendre et sans détracteurs, c’est la porte ouverte à toutes les immoralités.
Un boulevard pour les renards ….
Une histoire intelligente et visionnaire comme je les aime et un roman que je recommande vivement.
La ville rousse – Fabrice Lardreau
Des loups (les hommes) en viennent aux armes fasse à des renards (les vrais) pour étendre un territoire trop petit et viser un monde toujours plus grand.
Patrick à la personnalité conflictuelle devient une main de fer pour le compte d’un dirigeant d’une multinationale chargé de la construction d’un Grand Métro dans la ville de Lutetia. Mais Patrick, garde une forme de gant de velours face à la rage d’une population et de ce chargé d’affaires qui souhaitent l’éradication des goupils.
Si l’on dit que les loups ne se mangent pas entre eux, pour l’homme il en est tout autre.
L’auteur nous plonge dans une atmosphère assez sombre, un style de triller avec un flash-back narratif aux méthodes mafieuses. Tournures courtes et mordantes, Fabrice Lardreau nous fait miroiter à chaque page un sursaut de lucidité, un suspens étriqué autour d’un affrontement social qui arrive tout doucement à nos portes.
Points communs des renards et des loups : ne jamais les embêter !
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