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La guerre d'Indochine est l'une des plus longues guerres modernes. Pourtant, dans nos manuels scolaires, elle existe à peine. Avec un sens redoutable de la narration, "Une sortie honorable" raconte comment, par un prodigieux renversement de l histoire, deux des premières puissances du monde ont perdu contre un tout petit peuple, les Vietnamiens, et nous plonge au coeur de l'enchevêtrement d'intérêts qui conduira à la débâcle.
Accommodements, arrangements commerciaux, entre-soi permanent, hypocrisie idéologique....tout y passe dans ce roman court et tendu sur un épisode méconnu de la guerre indochinoise. Des militaires incompétents, des politiques corrompus et une bombe atomique américaine.
Livre merveilleusement bien écrit.
C'est toujours un plaisir de lire un roman de Vuillard même si le lecteur n'est pas dupe de l'angle choisi par l'auteur.Ici, il revisite l'histoire de la guerre d'Indochine, une guerre de 30 ans commencée par les Français, poursuivie par les Américains jusqu'à la chute de Saigon en 1975. Vuillard est partial , assurément, à charge contre les Occidentaux .Mais le lecteur ne résiste pas à cette belle plume incisive, à cette savoureuse galerie de portraits.
Ce très long conflit fait 400 000 morts du côté des Occidentaux, 3600000 morts du côté vietnamien.Au moment de la débâcle les Occidentaux sont évacués en urgence par des moyens sûrs tandis que des milliers de Vietnamiens vont périr noyés.
En fait, Vuillard joue à décortiquer les ressorts de cette guerre.Par le biais du Parlement, une bourgeoisie financière française des beaux quartiers, tire les ficelles.Et l'auteur nous amuse avec la généalogie de Christian Marié Ferdinand de la Croix de Castries nommé à la tête du commandement du camp-bourbier de Dien Bien Phu.Dans un récit très vivant, visuel, l'on voit à l'oeuvre Herriot, le Général de Lattre, Navarre, c'est très cocasse…
Pas le meilleur d'Eric Vuillard, mais très intéressant tout de même. Toujours cette verve féroce pour décrire les travers peu glorieux des puissants de ce monde, enfin ceux du siècle dernier. Quoique ... il y a quelque chose de tristement universel dans ces trajectoires personnels et leurs impacts parfois terriblement destructeurs sur des multitudes qui n'auront jamais la moindre idée d'où, comment et par qui leur sort a été scellé.
Une sortie honorable est un livre passionnant sur la guerre d'Indochine, bien loin des livres d'histoire.
L'écriture est belle et chaque chapitre montre des personnages différents.
L'auteur a choisi de mettre en avant la responsabilité dans les choix opérés des politiques, des hauts gradés militaires et des banquiers, et leur indifférence au drame qui se déroule très loin d'eux. Édifiant !
On peut se demander si cela fonctionne encore aujourd'hui pareil...
A lire absolument si l'on veut comprendre l'histoire avec un grand H.
En 1946, au lendemain de la seconde guerre mondiale, la France s’enlise dans le conflit colonial indochinois duquel elle sortira vaincue. Eric Vuillard ne prend pas le costume de l’historien, mais revêt celui du critique. En couverture, la photo du Général Christian Marie Ferdinand de La Croix de Castries, commandant les troupes françaises à Dien Bien Phu, est-elle la première marque d’ironie choisie par l’auteur ? Toujours est-il que le récit est orienté vers la critique des personnes physiques et morales qui ont tenu un rôle prédominant. Il s’agit des politiques sous la 4ème République, de la bourgeoisie dominante, de la Banque d’Indochine, de l’empire Michelin exploitant les plantations d’Hévéa …et les hommes qui y travaillaient.
Sans complaisance, avec sarcasme et une fine ironie, Eric Vuillard fait de cette terrible période une approche décalée de l’histoire, mettant en exergue les stratégies obscures de certains groupes ou individus qui ont pesé dans l’évolution du conflit.
Après « l’ordre du jour », Eric Vuillard s’attache aux graves moments de l’histoire, sans en entraver la vérité, mais en pointant des éléments qui ont ou auraient pu en modifier le courant. Un court opus d’une grande intensité !
Eric Vuillard dresse subtilement, avec beaucoup d'efficacité le portrait d'un monde présomptueux, pas si disparu que cela qui régente, décide sans concertation et entraîne
Féroce, il pointe du doigt les faiblesses politiques les prétentions militaires qui ont amené à la défaite de l'armée à Dien Ben Phu en Indochine et les répercussions sur la quatrième République. Magistral!
1950 : la France refuse d’admettre qu’elle vient de perdre la guerre d’Indochine avec la défaite de Cao Bang. Elle décide de maintenir l’offensive, ne serait-ce que pour s’offrir une sortie honorable, et tuer ainsi dans l’oeuf toute velléité de contagion au sein de ses autres colonies. Le conflit va s’éterniser encore quatre ans, avec l’appui des Américains qui continueront ensuite seuls la guerre du Viêt-Nam. Quatre ans d’entêtement, pour un bilan humain catastrophique et une issue finalement très piteuse pour les Français. Quoique… pas pour tout le monde : la Banque privée française d’Indochine aura eu tout le temps de rapatrier ses avoirs, tout en s’enrichissant de l’effort de guerre.
Avec l’intelligence et l’élégance subtilement ironiques qu’il emploie pour croquer l’Histoire en quelques traits choisis, d’une sobre et féroce précision, c’est un bien consternant tableau que nous peint Eric Vuillard : d’un côté, la population indochinoise, éreintée dans les mines et les plantations d’hévéas qui servent de poules aux œufs d’or aux Français ; de l’autre, une coterie politique prête à tout pour la stabilité de son pouvoir et de ses intérêts économiques, et qui, pour ne pas perdre la face devant ses colonies, n’hésite pas à « relancer la guerre pour en finir et reconquérir l’Indochine avant de la quitter » ; au milieu, des troupes largement composées de tirailleurs africains et vietnamiens, envoyées à la boucherie avec une inconséquence qui fleure l’incompétence, à en croire ce qui apparaît en ces pages comme l’aberration militaire de Diên Biên Phu.
Fort de son évidente imprégnation du sujet, Eric Vuillard présente de la guerre d’Indochine une vision éminemment dérangeante, débarrassée de l’apprêt des souvenirs historiques officiels. En quelques coups de pinceaux d’une impressionnante efficacité, pointant le regard sur un ensemble de faits dont la parfaite exactitude vient pilonner jusqu’à l’ébranler la conscience du lecteur, l’écrivain met le talent manifeste de sa plume au service d’une lucidité teintée d’ironie douce-amère qui laisse longtemps songeur. Car, au-delà du contexte colonial et de ses guerres, c’est le système général que nous avons choisi à travers la planète, dont nous profitons tous plus ou moins, qui engendre régulièrement de tristes aberrations humanitaires, la vie pesant parfois moins lourd que les rapports de pouvoir, et surtout les prépondérants intérêts économiques. Et l’on frémit du plus pur effroi rétrospectif en découvrant la proposition américaine faite à la France, d’utiliser l’arme nucléaire pour se sortir de Diên Biên Phu…
Un ouvrage remarquable pour l’intelligence, comme pour la sobriété et l’élégance littéraires, avec lesquelles il mène son propos. Nul n’envisagera plus la guerre d’Indochine du même oeil, après cette troublante lecture !
De l’auteur, j’avais abandonné 14 Juillet, et adoré L’ordre du jour.
Celui-ci fait partie de la seconde catégorie.
J’ai aimé que chaque chapitre soit différent et apporte un éclairage sur la situation en Indochine avant le conflit, pendant et après.
Pas de grandes descriptions, mais des mise en lumière de certains détails qui éclairent tout le tableau, comme ces ouvriers maltraités dans les Grandes Plantations avant la guerre.
Un livre qui montre que cette guerre était inutile (mais quelle guerre l’est ?) et explique pourquoi.
Quelques citations éclairantes :
Et les 51 morts du 6e bataillon de parachutistes coloniaux furent-ils bien sacrifiés pour la France ou pour M. Pierre-Charles Bastid, membre du conseil d’administration des Charbonnages, directeur général des Etains et wolfram du Tonkin, directeur général des Etains de Pia-Ouac, ingénieur conseil, pour la Banque d’Indochine, administrateur des Etablissements Eiffel…
on nomma de Lattre de Tassigny haut-commissaire et commandant en chef en Indochine. Il arrive à Saigon début décembre, développe au pas de charge l’armée nationale vietnamienne et remporte avec elle d’éphémères victoires à coup de concentrations inédites de troupes et de bombardements au napalm dont il sera l’un des premiers à faire un usage massif.
et les combats avaient lieu, malgré tout, pour une colonie déjà vidée de sa substance.
https://alexmotamots.fr/une-sortie-honorable-eric-vuillard/
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