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«Lorsqu'en 1909 Victor Segalen a l'idée de Stèles, il cherche délibérément en Chine non pas des idées, non pas des sujets, mais des formes qui sont peu connues, variées et hautaines. Il va ainsi se servir de ce qu'il trouve pour traduire ce qu'il sent, et ce qu'il trouve, c'est la forme de la Stèle. Forme:dans tous les sens du mot, la masse dressée et ce qu'elle porte. Un rectangle allongé qui s'élève dans la campagne, dans un temple, à l'entrée d'une ville, sur le bord d'un chemin -, et un dict lapidaire, une épigraphe tracée au burin dans la pierre, qui vante les victoires d'un général ou la beauté d'une favorite. Ce sont ces deux définitions de la forme de la stèle que Segalen utilisera. Elles sont à lui:elles sont en Chine, au milieu du monde. [...] Voilà pourquoi la Chine n'est finalement ici qu'un alibi, qu'un prête-nom:l'exil le plus total, donc, qui se puisse concevoir. Et les Stèles elles-mêmes... À son ami Henry Manceron, Segalen écrit précisément:Un pas de plus et la 'Stèle' se dépouillerait entièrement pour moi de son origine chinoise pour représenter strictement:un genre littéraire nouveau, - comme le roman, jadis, issu ou non d'une certaine Princesse de Clèves, ou de plus haut, en est venu à Salammbô, puis à tout, puis à rien du tout. Il est possible que plus tard, dans très longtemps, je donne un nouveau recueil de 'stèles' et qu'elles n'aient de la Chine même pas le papier. Et les Stèles elles-mêmes sont la forme rigoureuse que s'est taillée Segalen dans son habit de Chine, simplement pour dire. L'habit de Chine demeure, coloré, apparent, mais ce qui compte en filigrane du poème et ce qui nous occupe ici, c'est moins l'habit que le patron. Et le patron, la découpe, c'est la langue même de Segalen, neuve s'il en est.» Pierre-Jean Remy.
"Stèles" est une porte d'entrée pas trop ardue dans l'œuvre de Segalen. L'édition de poche 1999 propose les poèmes cernés de noir, verticaux, ornés d'idéogrammes, et la présentation explique comment se présentait l'ouvrage original. Chaque stèle est suivie d'éléments explicatifs, mais on peut essayer de lire en continu les stèles pour s'imprégner de l'ensemble avant de s'intéresser aux détails. Le volume est dédié à Paul Claudel, que Segalen avait rencontré et dont il admirait "Connaissance de l'Est". Une chronologie donne des informations sur l'auteur. On peut rester étranger à cette poésie très neuve à son époque, mais il est difficile d'être indifférent, car tout nous intrigue dans cette vision de la Chine par un Breton assez énigmatique en 1934. A découvrir...
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