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«Elle ne se contente plus d'habiter mes rêves, cette fille. Elle pousse en moi, contre mes flancs, elle veut sortir et je sens que, bientôt, je n'aurai plus la force de la retenir tant elle me hante, tant elle est puissante. C'est elle qui envoie le garçon, c'est elle qui me fait oublier les mots, les événements, c'est elle qui me fait danser nue.»Il n'y a pas que le chagrin et la solitude qui viennent tourmenter Tara depuis la mort de son mari. En elle, quelque chose se lève et gronde comme une vague. C'est la résurgence d'une histoire qu'elle croyait étouffée, c'est la réapparition de celle qu'elle avait été, avant. Une fille avec un autre prénom, qui aimait rire et danser, qui croyait en l'éternelle enfance jusqu'à ce qu'elle soit rattrapée par les démons de son pays.À travers le destin de Tara, Nathacha Appanah nous offre une immersion sensuelle et implacable dans un monde où il faut aller au bout de soi-même pour préserver son intégrité.
De Nathacha Appanah, j'avais déjà lu le très beau Tropique de la violence. Dans Rien ne t'appartient, l'auteur raconte l'histoire de Tara. La jeune femme ne peut faire le deuil de son mari, le deuil aussi de son histoire passée quand elle s'appelait Vijaha. Et, on va revenir sur l'enfance, l'adolescence de ce personnage en Asie, dans un pays où la violence va casser ses rêves, détruire sa famille. " Fille gâchée", elle ne devra sa survie qu'à sa volonté. Dans ce roman, on est vite emporté dans un tourbillon de sensations, d'émotions, à fleur de peau. C'est triste, poétique et beau. L'auteur sait distiller un mystère autour de son double personnage, de cette femme qui préfèrera rejoindre cette petite fille enfouie. Comme un passage de l'ombre à la lumière.
Bonjour .Une femme semble chercher quelque chose . Elle est dans son appartement . Elle semble un peu perdue , est - ce qu'elle a encore toute sa tête ?Mais que cherche -t-elle? Son beau fils arrive dans une maison sens dessus dessous , comme si quelque voleur avait saccagé l'appartement à la recherche d'un objet précieux. Et Tara ?Vijaya? regarde son beau fils. Mais qui est-elle vraiment? Comment s'appelle -t-elle déjà?:"Ce que j'ai vu et que je ne peux pas oublier est un visage aux contours flous , aux traits gommés, ..Qui est ce filigrane que j'ai aperçu :est-ce Tara? Est-ce Vijaya?". On est chahuté , balancé doucement puis plus fort . On a l'impression d'un mouvement perpétuel :"je n'ai pas peur dans le noir ,il me semble que cette noirceur là m'attend au bout de chaque nuit pour me bercer de douceur". On se sent balloté au milieu des vagues de ses souvenirs embrumés , chaotiques , emplies de peur et de regrets :"Assourdissant ce coeur qui bat. Assourdissant le sang qui se précipite au cerveau. J'ouvre et je referme la bouche sans savoir quels sont les mots à dire , les cris à sortir , les prières à inventer ". Qu'a-t-elle fait? : "Pendant longtemps , je suis persuadée que la vie que je mène est immuable. C'est une vie délicieuse..." .On est emporté dans les pans de la vie de...Comment déjà? Tara? Vijaya?
On comprend peu à peu tous les sacrifices , toutes les douleurs , la proscription; tout cet amour qu'elle a dû laisser derrière elle: "Jamais personne ne m'a expliqué ce que c'est d'être une fille dans ce pays . ...Personne ne m'a dit : profite de ce ciel , de cette terre , de cette eau pendant qu'il est encore temps..." . C'est le feu , le sang , l'eau :"j'avais peur de ce que morceau contenait , une fleur , un fruit , une grenade , un caillou , je ne savais pas si ce morceau que je gardais serré entre mes jambes noué dans mon ventre caché dans mon coeur logé dans ma gorge , je ne savais pas s'il était poison ou nectar ". Merci à Nathacha Happanah pour cette histoire émouvante , pour ces phrases poétiques , ensorceleuses qui nous enveloppe ,nous transporte et nous emmène dans des vies qui nous échapperaient . Belles lectures .Prenez soin de vous
J'avoue, quand le livre nous a été proposé lors de mon club de lecture, je n'étais pas très enthousiaste car la quatrième de couverture ne me donnait pas particulièrement envie... Quelle erreur cela aurait été de passer à côté de ce beau roman!
J'ai mis 4.5 / 5 car vraiment je me suis laissée emporter par cette histoire, par cette héroïne aux mille visages et aux mille mystères.
Il y a Tara qui ne se remet pas du décès de son mari, la laissant amputée d'un bonheur qu'elle était parvenu à construire. Il y a aussi Vijaya, une jeune fille qui grandit dans l'amour de ses parents un peu en marge de la société de part leur idées et leur manière de vivre. Tout semble lui réussir jusqu'au jour ou tout s'écroule... Pour finir il y a Avril, une jeune femme qui n'a plus rien, même pas l'espoir de s'en sortir, elle vit dans un ancien temple avec d'autres jeunes filles "gâchées" sous la houlette d'une femme dure et cruelle.
C'est donc un chemin de vie cahoté par les épreuves que nous narre ici Nathacha Appanah dont le style, bien à elle, est tout simplement incroyable. J'ai aimé son écriture que j'ai trouvé envoutante. Il m'était très difficile de devoir poser le livre.
A lire!
Tara vient de perdre Emmanuel, son mari. Ce deuil va sonner l’entrée dans une phase de dépression pour la jeune femme qui ne se remet pas de cette perte et qui sombre lentement. Vont alors remonter des souvenirs de sa vie d’avant Emmanuel, alors qu’elle était encore Vijaya une petite fille heureuse auprès de parents aimants mais dont la vie va irrémédiablement changer. Un destin marqué par la guerre, un tsunami et une histoire d’amour qui fera d’elle une « fille gâchée ».
Dans ce livre qui explore les profondeurs de l’intime, Nathacha Appanah dresse le portrait d’une femme que la lutte a épuisé. Les drames terribles qu’elle a vécu dans son adolescence l’ont fragilisée. Car Tara/Vijaya a vécu une série d’épreuves terribles : la mort terrifiante de ses parents, l’enfermement dans un pensionnat pour « jeunes filles gâchées », des souffrances, des luttes puis cette dernière épreuve face aux éléments qui lui a permis de rencontrer celui qui est devenu son mari.
Celle qui a vécu une enfance libre, qui dansait, chantait, apprenait auprès de son père a vu son monde totalement détruit par la guerre et a compris qu’elle avait eu une enfance privilégiée dans un pays où les femmes n’ont aucune liberté.
L’auteure nous raconte ici, avec beaucoup de sensibilité et de subtilité, les dégâts psychologiques de ce que la jeune fille a vécu. Elle nous montre les failles que cela a créé et qui s’amplifient avec ce nouveau deuil qu’elle ne parvient pas à gérer.
Cette disparition va alors provoquer chez cette femme qui s’est construit un rempart contre son passé et ses traumatismes un véritable séisme, la plongeant peu à peu dans une sorte de folie provoquée par un trop plein d’émotions.
Nathacha Appanah joue habilement avec les contrastes entre la vie pleine de joie de Vijaya, les sons, les odeurs, les goûts, la douceur qui ont habité son enfance et la rudesse de ce qui va suivre, la douleur, la rugosité, la froideur qui vont l’accompagner avant sa rencontre avec Emmanuel sur lequel elle va se reposer. Elle suggère, plus qu’elle ne montre, faisant naître dans l’esprit du lecteur des centaines d’images des lieux que son héroïne traverse. En cela, le roman est très réussi car l’auteure ne tombe jamais dans un excès de descriptions et dose avec justesse ce qui est dit et ce qui est évoqué.
Trop triste
Rien ne t’appartient de Natacha Appanah
Tara a perdu son mari. Malgré l’aide que souhaite lui apporter son beau-fils, elle sombre de la douleur, les souvenirs sont vagues notamment ceux de son enfance. Dans une deuxième partie du roman, on rencontre la petite fille qu’elle a été, la fin brutale de l'innocence, de la petite fille joyeuse, son intégration dans un centre dans lequel elle perd toute identité. Elle trouvera, malgré tout, la force de s’en sortir.
J’ai été un peu perturbée par le trouble qui tourne autour du personnage, tous les non dits qui font que l’histoire m’a parue incomplète. Cela dit, celà n’a aucunement gâché la rencontre avec la plume si poétique, efficace et sensible. Un style qui dégage une intensité formidable et transmet beaucoup d’émotions. Je suis admirative de cette plume tantôt poétique tantôt incisive. Le corps prend formidablement forme que ce soit par la danse, la douleur, la contrainte ou l’espoir.
C'est sombre, c'est beau, c'est poétique.
Il est question d'une enfance volée, de maltraitance, d'un secret indicible, d'un amour qui doit guérir de tout, qui ne guérit de rien.
Nathacha Appanah, comme dans ses autres romans toujours courts, toujours puissants, condense une tranche de vie.
La plume est précise et élégante.
C'est émouvant et tragique.
Rien ne t’appartient est un roman assez court, d’une force incroyable.
Nathacha Appanah qui m’avait estomaqué avec Tropique de la violence, confirmant, à un degré moindre avec Le ciel par-dessus le toit, m’a ramené en Asie, dans un pays bouleversé par la guerre et les luttes fratricides dont les femmes sont les premières victimes.
Tara s’exprime dans une première partie très énigmatique qui ne m’emballe pas. Emmanuel, son mari qui avait quinze ans de plus qu’elle, est mort. Il a un fils, Eli, d’un premier mariage. Prof de maths dans un collège, il tente d’aider Tara victime d’hallucinations et très perturbée. Il a beau lui poser des questions, voulant savoir qui est cette Vijaya, prénom qu’il a vu écrit sur des feuilles trainant dans la chambre de Tara mais celle-ci ne répond pas.
Où sommes-nous ? Dans quel pays nous trouvons-nous ? Nathacha Appanah ne le dit pas, s’attachant exclusivement au côté psychologique de sa narratrice mais, lors des Correspondances de Manosque 2021, elle nous avait confié que cela se passe au Sri Lanka. Tara est au plus mal, veut en finir et refuse de raconter ce qu’elle a vécu à Eli qui voudrait tant l’aider. Pourquoi ? Je n’ai pas d’explication sauf cette seconde partie à la fois terrible et passionnante, intitulée Vijaya.
Tout commence par une vie idyllique pour cette fillette vivant dans un décor paradisiaque. Son père est opposant politique, parle à la radio, à la télévision et sa mère a des pouvoirs magiques. Ils sont riches assurément. Ce père souriant devient un tuteur sévère lorsqu’il enseigne à sa fille, Vijaya. Depuis la capitale, vient Rada, professeure de danse qui lui enseigne la bharatanatyam, danse traditionnelle de l’Inde du sud, deux jours par semaine. D’ailleurs, Vijaya danse à ravir lorsqu’une fête lui en donne l’occasion.
Hélas, sa vie va basculer dans l’horreur avec ce qui fait penser à un coup d’État militaire, l’installation d’une dictature qui élimine sans pitié les opposants.
Si Vijaya échappe à la mort, son calvaire est égayé par un garçon qui vient la voir régulièrement et qui partage l’amour avec elle. Cela explique peut-être ce garçon qu’elle voit chez elle dans la première partie puis qui disparaît subitement sans qu’on en sache davantage à son sujet.
La conséquence de ces relations sexuelles si belles transforme Vijaya en « fille gâchée ». C’est là qu’elle se retrouve dans une sorte de pensionnat, de maison de correction pour « filles gâchées » où la tenancière lui assène sans arrêt : Rien ne t’appartient ici.
La vie de Vijaya est celle que d’autres jeunes filles comme elles ont dû subir : privations, punitions, travail très dur, jusqu’au jour où ce tsunami dont nous nous souvenons tous, remet tout en question, juste après Noël, le 26 décembre 2004. Il dévasta une bonne partie des côtes de l’Océan Indien causant énormément de victimes.
Les quelques pages faisant vivre, survivre Vijaya dans ces vagues qui emportent tout, sont terribles. C’est dense, prenant, rythmé, d’un réalisme d’autant plus choquant que l’autrice n’exagère pas.
Rien ne t’appartient me semble un formidable témoignage sur les dégâts psychologiques causés, pendant des siècles d’exploitation et d’oppression de beaucoup de femmes. C’est écrit délicatement, avec un minimum de précisions géographiques et aucune date. Tout est dans les mots, les phrases mettant en place une vie sacrifiée où tant de malheurs, tant de souffrances accumulées sont impossibles à évacuer. Tara et Vijaya, ces deux jeunes femmes cohabitent dans la même personne qui, privée du seul homme venu à son secours, se trouve dans l’impossibilité de communiquer pour se relever et continuer à vivre.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
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