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Il y a un moment que je voulais le lire et je n'ai pas été déçu ! Une intrigue bien menée, on croit savoir le dénouement mais au fil de l'histoire on doute, on se sait plus ! rondement te densément narrée !
Le troisième roman de John Le Carré fut le bon, celui de la gloire. Il était le premier à révéler les dessous de la lutte impitoyable que se livraient les services secrets au lendemain de la guerre mondiale. L’action débute et se termine à Berlin au beau milieu d’un poste frontière. Le dénouement est identique, au début un homme à vélo est abattu sur un pont à quelques mètres de la zone ouest, à la fin un couple subit le même sort en tentant d’escalader le mur.
Alec Leamas dirigeait en Allemagne de l’Est un réseau d’espionnage dont le dernier membre encore vivant vient d’être abattu sous ses yeux (le cycliste). Le retour à Londres signe la fin de sa carrière opérationnelle et la descente aux enfers commence. Il se réfugie dans l’alcool, perd son travail et finit même en prison pour quelques mois.
Bien sûr, la déchéance n’est qu’un rôle. Peut-il encore être utile ? Si oui, avec quelle motivation ? La vengeance ? Eliminer le responsable de tous ces morts, Mundt le chef des services secrets est-allemands, celui qui, quelques années plus tôt, en plein cœur de Londres, avait tenté de tuer Georges Smiley (le héros récurrent de Le Carré) ? Oui, ça mériterait de repartir une dernière fois. «Vous représentez le dernier épisode de la chasse au trésor. Tachez de rester en vie et nous aurons remporté une grande victoire ».
A sa sortie de prison, un agent de l’Est l’attend pour le convaincre de changer de camp « il devait à la fois les réconforter et détruire leur dignité d’homme » , l’interrogatoire est concluant car, dans le tas de renseignements fournis, il y a une piste qui intéresse tout particulièrement les Allemands : nom de code « Rolling Stone » (amusant de noter que le roman date de 63 et la formation des Rolling Stones de 62). Ce Rolling Stone (bourlingueur en français) ne serait-il pas un membre haut placé des services secrets allemands travaillant pour les Anglais ? Leamas n’y croit pas ou feint de n’y pas croire, l’essentiel est que les Allemands, eux, y croient : «l’homme qui tient un rôle encourt des dangers psychologiques évidents, en soi la pratique du mensonge n’a rien de particulièrement éprouvant ; c’est une question d’habitude professionnelle que la plupart des gens peuvent acquérir, mais alors que l’aigrefin, l’acteur ou le joueur peuvent rejoindre leurs admirateurs après la représentation, l’agent secret, lui ne peut pas se payer le luxe de la détente…on dit que Balzac, sur son lit de mort s’inquiétait de l’état de santé de ses créatures…c’était seulement en de rares circonstances, comme ce soir en allant se coucher, qu’il se permettait le luxe de contempler… le mensonge énorme qu’il vivait »
L’acteur est bon, tout comme son texte, et le piège consistant à faire éliminer l’adversaire par ses propres concitoyens va fonctionner « F marchait comme un somnambule vers le piège qu’il lui avait tendu ».
Trop simple, le piège ne se refermera pas comme prévu car le plan était encore plus machiavélique « nous assistons à l’épisode dégueulasse d’une opération immonde, maintenant tu sais tout, et que le Ciel nous aide tous les deux ! »
« Pour quoi prends-tu les espions ? C’est un minable défilé d’imbéciles vaniteux, de traitres aussi oui ; tu les imagines… comme des moines dans leur chapelle en train de soupeser le Bien et le Mal ?... Je l’aurais tué si j’avais pu. Je le vomis. Mais pas maintenant car ils ont besoin de lui pour permettre à la masse imbécile que tu admires tant de dormir sur ses deux oreilles. Ils ont besoin de lui pour assurer la sécurité des gens ordinaires, des minables comme toi et moi. Ils ne se dressent pas…sur un podium pour nous adjurer de nous battre pour la Paix ou pour Dieu ou pour n’importe quoi donc. Ce sont de pauvres cons qui s’évertuent à empêcher les apôtres de toutes les religions de s’entredévorer »
« Tu te trompes…Ils sont pires que nous tous…ils méprisent tout ce qui est authentique, l’amour… »
« C’est vrai, c’est le prix qu’il faut payer : mépriser d’un bloc Dieu et Karl Marx »
Cinquante-cinq ans plus tard, rien n’a changé, le roman est toujours aussi fort !
Mon premier livre de John Le Carré et définitivement pas le dernier. Un petit bijou d'espionnage aux personnages attachants, extrêmement bien écrit. Nous sommes happés dès les premières pages !
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