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Pas de Nains ou d'Elfes dans cette fantasy-là.
François Darnaudet invente ses propres codes et les fait entrer en résonance avec les romans de son cycle fantastique : ici les héros sont visibles, extraordinaires et décomplexés (une sorcière bleue, un minotaure et un géant). Ce qui apporte un aspect inédit et jubilatoire à sa fantasy audacieuse.
Darnaudet sait écrire, il a ce style aiguisé des auteurs qui ont plus d'une vingtaine de romans à leur actif.
François Darnaudet confirme une fois encore qu'il fait partie des maîtres français des littératures de l'imaginaire.
Une première et une belle évasion dans un monde ou l’on côtoie des personnages sortis tout droit de la mythologie nous amenant à voyager entre Venise et Istanbul... pour ma part un dépaysement complet que j’ai apprécié soutenu par des références instructives et une écriture alerte et dynamique... je n’ai pas regretté cette incursion dans un domaine qui sort de mes lectures habituelles
« Les guetteurs de la Passe du Lido déclenchèrent les cornes quelques instants après le lever du soleil sur l’Adriatique.
Les troupes terrestres venues d’orient et d’occident se mirent en position défensive sur la longue bande de sable fortifiée qui barrait la lagune. Derrière eux, trois cents navires frémissaient du martèlement des pieds de vingt mille matelots.
Dans le palais ducal, les chefs de la coalition étaient tous là. Tous ceux qui avaient fini par comprendre que ce danger en lequel ils n’avaient pas cru était désormais aux portes de Venezia.
La cité de Venezia qui gardait en son sein le dernier espoir des peuples du pourtour méditerranéen…
Lorsque les énormes trirèmes d’un autre âge, équipées d’appareillages inconnus couvrirent l’horizon marin et que les défenseurs du Lido furent en mesure d’apprécier la taille gigantesque des ennemis, un frisson de terreur parcourut les troupes de la coalition. »
Il était une fois, Once upon a time, C’era una volta :
Sandro Maltese un jeune homme qui a écrit son premier livre d’héroic- fantasy pousse la porte d’un éditeur vénitien.
Venise est là sous nos yeux, l’auteur a les yeux de Chimène pour la Sérénissime.
Comment s’est-il retrouvé au cœur même des aventures qu’il a écrites, dès qu’il eut franchi la porte de cette maison d’édition ?
Tolkien disait : « La magie n’opère que si l’on veut bien consentir à se laisser emporter par elle. »
C’est là lecteur qu’il faut se laisser porter par l’aventure très visuelle.
« —Ne t’inquiète pas, Sandro Maltese ! Bientôt, nous serons amis.
— Je le sais, Minos. Je t’ai créé… mais c’était sur du papier.
Le monstre emporta Sandro à travers le parc de la propriété. Tenant le jeune homme dans ses bras comme un bébé, il fila vers un labyrinthe végétal. Quelques balles sifflèrent derrière eux, mais ils étaient déjà à l’abri, masqué par des haies de feuillus. Sans l’ombre d’une hésitation, le Minotaure trouva son chemin à travers le dédale et au bout de cinq minutes d’une course effrénée, ils débouchèrent sur une clairière circulaire où les attendait une étrange porte délimitée par un trident en métal orangé. »
Minos et Arnoridoquy rencontre Melina la sorcière bleue aux yeux entièrement bleus car sans sclérotique.
Il y a Eusébio le forgeron mais pas seulement forgeron.
Minos s’est donné pour mission d’avertir le Doge Constantin Paléologue Dragozès, de l’invasion prochaine de Constantinople, précipitant la perte de toutes les civilisations.
« Nous sommes des enfants d’Atlantioï, Tartessos était une colonie de l’ancienne Atlantide. »
Le Doge fait appel à un trublion Pietre Zumaran, espion mutant.
Ce sont les personnages principaux, mais il y en a à foison.
Beaucoup de trouvailles dans cette façon de revisiter le mythe de l’Atlantide, une mise en scène vigoureuse, des dialogues savoureux, les scènes de combats m’ont particulièrement plu.
« En escrimeuse émérite, la jeune sorcière déviait les coups rapides et précis du séide de Zumaran. Elle reculait pas à pas, son regard bleu fouillant les traits du visage et le corps de Tre. Son esprit avait besoin d’un léger répit afin de se recharger. Elle comprit à quoi servait le trou circulaire dans la casaque verte de son agresseur juste avant que n’en surgisse le troisième bras au crochet. »
Et le jeune homme Sandro Maltese que devient-il me direz-vous ?
Je vous laisse le découvrir et vous ne serez pas déçus.
Le cœur bat pour : « Dans un texte intitulé Critias, Platon parle d’une grande île nommée Atlantitoï sur laquelle vivaient les Atlantes, les descendants du Titan grec Atlas. Il y a environ onze mille ans, cette civilisation aurait été engloutie par les flots de l’Atlantique alors que les Atlantes étaient en train de se battre contre les Hellènes. »
Il paraît que l’Atlantide est un sujet maudit. Il semblerait que ce ne soit pas le cas pour François Darnaudet qui nous fait partager sa vision. Il nous embarque, pas la peine d’être fin connaisseur de la mythologie, l’auteur est clair, et argumenté.
D’une écriture fluide nourrie par une belle érudition menée par la passion, il nous livre un monde très imagé, haut en couleurs, des combats extraordinaires, de l’action mais jamais d’actes gratuits, on plonge dans cet imaginaire. Le lecteur est happé, de nombreuses trouvailles font que nous vivons dans ce monde, loin du nôtre.
Minos et les siens pourront-ils arrêter ceux qui « sont en marche » vers Constantinople ?
A vous de le découvrir dans cette belle aventure.
Ce livre se vit et c’est là le talent de l’auteur. L’Atlantide fait partie de ces mythes fondateurs : une civilisation disparue, l’Eden perdu, une contrée secrète, la terre promise, le labyrinthe de Minos… Tout pour susciter une quête qui fait que les protagonistes sont prêts à se surpasser, se transcender, se sacrifier, car c’est une quête plus spirituelle que matérielle.
J’espère vous donner envie de lire ce livre…
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 31 janvier 2020.
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