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À Boulogne-sur-Mer, le directeur d'une fondation hospitalière chute mortellement de sa terrasse. La thèse de l'accident semble plus que douteuse. Mais qui peut bien en vouloir à ce directeur ? C'est ce que cherche à découvrir Camille, une journaliste un peu trop curieuse. Pour ce, elle va s'introduire dans les arcanes complexes des administrations de santé. Elle se retrouve alors au coeur d'un véritable complot politico-financier qui dépasse largement le milieu hospitalier. Complot qui pourrait bien s'étendre au plus haut sommet de la République.
Ce polar m'a un peu surpris et dérouté, non par le fond mais par la forme. Commençons par le fond : une histoire politico-financière qui monte au plus haut de la République. Ça vous évoque quelque chose ? Nicolas-Raphaël Fouque fait un mix des différentes affaires qui ont encombré les journaux et autres médias depuis des années, pour en créer une à la mesure de son livre et de ses personnages. Clairement expliquée, on comprend aisément les rouages et les implications de chacun. Pas nouveau, malheureusement. Ce que je ne comprends pas dans ces affaires-là, c'est comment des hommes censés être des gens intelligents peuvent encore penser passer entre les mailles des filets de la justice. Comment après toutes les histoires de détournements de fonds, de trafics divers dont on nous rebat les oreilles depuis 30 ans, des hommes de pouvoir tentent encore le diable pour un peu plus de pouvoir ou d'argent ?
Bon, cet aparté clos, venons-en au fond qui m'a dérouté, mais pas désagréablement, au contraire, je trouve toujours plaisant d'être un peu bousculé dans mes lectures. L'auteur débute son histoire par une présentation de certains personnages dans une écriture nette, précise qui n'omet aucun détail, une écriture quasi chirurgicale (c'est pour être raccord avec le thème) :
"Hadrien Grandvillier invita Camille Trencavel à déjeuner. Ils restèrent dans la cafétéria. Il s'étonna toutefois qu'elle ne fût pas plus pressée de partir pour couvrir d'autres événements. La mort de Fregelsberg n'était pas la seule actualité locale même si elle devait certainement être la principale. La jeune femme lui indiqua qu'elle était en congé pour la semaine. Le décès serait couvert par le collègue avec lequel elle était arrivée. Avant d'accepter l'invitation, elle s'était isolée quelques minutes pour prévenir Clément qu'il était inutile qu'il l'attende." (p.40)
Puis, il déroule son scénario de la même manière, comme un rapport minutieux des faits : des petits chapitres très clairs, précisément situés dans le temps par rapport à la mort du directeur de la fondation. On n'est jamais perdu, que l'on soit dans le présent ou dans le passé. C'est un vrai reportage qui démonte les mécanismes de la malversation point par point et les implications des politiques : "J'ai identifié tous les gérants de la liste que tu m'as remise. Ils sont tous liés indirectement soit à Yves Wettingem, soit à l'entourage du président du conseil régional, Maximilien Acarmone. Ce n'est pas le même parti politique. C'est d'ailleurs ce qui m'inquiète. La tartine a visiblement été beurrée des deux côtés à parts égales." (p.87)
Là où il est déroutant NR Fouque, c'est que par moments, il procède totalement différemment, par ellipses, par petites touches successives, notamment lorsqu'il s'intéresse à la vie privée de ses personnages. Le lecteur doit deviner entre les lignes ce qu'il ne dit pas clairement. Un peu comme si l'éditeur (l'excellente maison Ravet-Anceau) avait omis de publier certaines pages du manuscrit. Déroutant un peu au départ parce qu'il nous a habitués à lire tous les détails au début de son roman, mais comme les habitudes sont faites pour être changées, le procédé est une excellente idée qui oblige le lecteur à faire lui même le lien entre les informations que l'auteur distille ça et là. Faire confiance à l'intelligence du lecteur, c'est un pari risqué, mais quand ça tombe sur moi, ça passe facilement (comment ça mes chevilles ? Elles vont très bien !).
Un polar de 200 pages, actuel, ancré dans la réalité, très maîtrisé (pas mal pour un premier essai de l'auteur dans ce genre), très bon quoi, comme très souvent chez Ravet-Anceau.
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