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Lettres à ses amis peintres - Barnett Newman, Robert Motherwell, Adolph Gottlieb-, récits de voyage en Europe, notamment à Paestum où Rothko affirme qu'il a «toujours peint des temples grecs sans le savoir», descriptions d'étés en famille dans les campus américains où il donne cours, cahiers de notes dans lesquels Rothko parle de l'importance du surréalisme, de Picasso ou de Miró, confessions amères sur le règne des marchands et des critiques d'art, manifestes et réponses à des conservateurs et à des critiques, ces Écrits sur l'art rassemblent les textes de Mark Rothko depuis ses débuts, en 1934, jusqu'en 1969, un an avant son suicide. Confiés à des musées américains ou conservés par ses enfants, ces écrits étaient jusqu'alors inédits. Ils nous révèlent l'ambition de l'un des plus grands peintres du XXesiècle : «Les tableaux doivent être miraculeux : à l'instant où l'un est achevé, l'intimité entre la création et le créateur est finie. Ce dernier est un étranger. Le tableau doit être pour lui, comme pour quiconque en fait l'expérience plus tard, la résolution inattendue et sans précédent d'un besoin éternellement familier.»
Mark Rothko est un des incontournables héros de l’expressionnisme abstrait (ou de l’Ecole de New-York). Né en Lettonie en 1903, il se suicide en 1970. Il fait partie de ces peintres abstraits qui ont étudié tout le lyrisme de la lumière. Ses immenses tableaux sont autant d’études de vibrations colorées auxquels sont très sensibles les personnes contemplatives.
Mark Rothko a également écrit des articles (restés longtemps oubliés), des notes, quelques missives, dans lesquels il fait preuve d’une pensée qui refuse tous dogmes et toute catégorisation aliénante. Mais, en même temps, Mark Rothko y fait preuve d’une ferveur à la fois intense et désabusée. Tous ses écrits sur l’art ne sont jamais prolixes. Ainsi ce volume qui les réunit est introduit par l’enseignement qu’il prodigua aux enfants. En 1929, il a pris un emploi à temps partiel à l’Académie Centre du Centre juif de Brooklyn, un poste qu’il a conservé jusqu’en 1952. Rothko maintenu souvent que l’enseignement des enfants lui a permis de comprendre leur capacité à communiquer leurs perceptions de la réalité en termes d’images visuelles simples. Il crut à ce don si profondément qu’il avait l’air d’enfants comme base de sa propre recherche de la vérité. C’est ce que Rothko cherche à ce moment-là en peinture…
Les dernières pages de ce petit florilège se termine par un discours prononcé à l’Université de Yale en 1969 : reçu doctor honoris causa, rongé par la maladie, Mark Rothko se moque, avec ironie, du verbiage de son époque et lui oppose le silence de l’atelier, le silence spirituel de ses œuvres. Etrange homme que ce Juif, débarqué de l’Est en 1913, féru de littérature et de théâtre, et fortement imprégné de cette énergie tragique aux accents nietzschéens. Pourtant, au fil des lettres, nous apprenons son admiration pour Pablo Picasso et Joan Miró, et son rejet sans concessions du surréalisme, jugé trop attaché au symbolisme. Mais, et cela étonnera tout personne ne connaissant pas réellement la peinture de Rothko, l’artiste était passionné des peintres des siècles précédents, convoqués comme autant de racines de la peinture moderne. Ainsi voyait-il une étroite parenté entre ses formes imprécises et flottantes dans un espace indéfini, et les fresques de la Villa des Mystères à Pompéi. Au centre de sa vie, nous trouvons les mythes ancestraux, ou l’Ancien Testament, bref, une spiritualité presque mystique sur laquelle le temps n’a pas d’emprise.
Mais le mystère Rothko reste presqu’entier.
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