Celui auquel Charles Baudelaire dédia "Les Fleurs du Mal", "le poète impeccable", "le parfait magicien des lettres françaises" souffre en général auprès du public lettré d'une certaine désaffection que n'explique pas à l'évidence la valeur de son oeuvre poétique.
Certes l'auteur du "Capitaine...
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Celui auquel Charles Baudelaire dédia "Les Fleurs du Mal", "le poète impeccable", "le parfait magicien des lettres françaises" souffre en général auprès du public lettré d'une certaine désaffection que n'explique pas à l'évidence la valeur de son oeuvre poétique.
Certes l'auteur du "Capitaine Fracasse", et du "Roman de la momie" peut d'autant moins rivaliser avec son prestigieux cadet que leurs vers respectifs à un siècle et demi de distance n'ont point la même résonance.
Certes l'élève a dépassé le maître mais quand on lit en 2021 "La comédie de la mort" tant admirée par Baudelaire, il est malaisé, voire impossible de balayer d'un revers de main la poésie de Théophile Gautier.
Dans tous ses recueils, pour peu qu'on veuille bien s'y plonger une heure ou deux, celui-là sème des textes d'une grande tenue littéraire dont quelques-uns notamment, plus inspirés que la moyenne, ont allègrement résisté à l'épreuve des ans.
De temps en temps même, il fait presque jeu égal avec Baudelaire. Après tout "Le pin des Landes" nettement moins célèbre que "L'albatros" n'a guère à rougir devant ce dernier. Pour décrire la condition du poète, force est de reconnaître que Gautier a su trouver non sans style et vigueur des images tout à fait inoubliables.
Son talent, quoi qu'on dise, n'en est pas moins aussi manifeste, aussi patent dans une bonne vingtaine de poèmes où il est aisé de déceler ce que Baudelaire lui doit, non en terme d'influence mais d'impulsion.
Parnassien avant la lettre, Gautier hélas n'est pas sans défauts. "L'art pour l'art" brime sa spontanéité, le raidit, le statufie. L'aspect "bien léché" de ses vers fait trop voir l'artisan et pas assez l'artiste. Bien des extraits de "Emaux et Camées" sonnent creux à maints endroits et singent l'esthétique qu'ils prétendent défendre.
On aurait aimé que Gautier quittât son habit un peu étriqué, laissât vagabonder son imagination, bref se montrât mieux disposé à fendre l'armure.
C'est d'autant plus regrettable que lorsque celui-ci laisse aller sa plume et ne la soumet pas à des contraintes excessives, voient le jour des pièces beaucoup moins apprêtées, fortes, dignes d'estime, quelquefois remarquables.
"Ta forme connaît sa splendeur". Cette belle formule glanée au fil de l'exquis poème intitulé "A une robe rose", Gautier eût dû plus souvent la faire sienne.
Son oeuvre y aurait gagné en puissance et en harmonie.
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