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Ah, la Laponie ! : le pays du Père-Noël, des aurore boréal, des rennes….
Oubliez tout ce que vous savez en ouvrant ce livre.
D’abord, on ne dit plus lapon mais same. Un peuple à part entière au nord de 3 pays.
Ensuite, la majorité des gens vivent comme nous, entre leur maison, le supermarché, utilisent leur voiture. Ce roman a le mérite de bien remettre les pendules à l’heure.
J’ai eu parfois un peu de mal avec le style factuel, surtout lorsque les nombreuses scènes de masturbation sont décrites.
J’ai également été choquée (c’est mon côté prude) par l’oeuvre d’art que réalise le Fils : une vidéo quelque peu pédophile avec une jeune fille. Certes, le but de l’artiste est de choquer en faisant prendre conscience de ce qu’il se passe loin des yeux du spectateur lambda, mais pourquoi de manière aussi cru ?
L’auteur est parti du scandale qui a eu lieu à Kautokeino en pays same : de 1953 à 2017, 151 agressions sexuelles, dont 43 viols, ont eu lieu dans la municipalité arctique de Tysfjord, qui compte moins de 2000 habitants. La plupart des crimes n’ont jamais été dénoncés.
Une lecture exigeante qui part de l’arrière-grand-père jusqu’au fils, soit sur 4 générations de same et qui montre en filigrane l’assimilation forcée des sames, puis leur début d’émancipation.
L’image que je retiendrai :
Celle des nombreux silences dans les conversations.
https://alexmotamots.fr/veiller-sur-ceux-qui-dorment-sigbjorn-skaden/
S’il y a bien un titre qui m’a prise au dépourvu ces derniers temps, c’est cet étrange et troublant Oiseau de l’auteur norvégien Sigbjørn Skåden : je ne lis pas souvent de science-fiction, ce n’est clairement pas mon genre de prédilection,en revanche c’est un genre qui pose beaucoup de questions, pertinentes. Elle a l’avantage de contenir peu ou pas de frontières narratives pour imposer des limites à son récit, qui dispose donc de toutes les libertés in-imaginables et prendre toutes les directions possibles. Sigbjørn Skåden est un auteur norvégien de langue same (de Laponie), dont il est le fervent défenseur et promoteur. Et à lire le Wikipedia norvégien, il a l’air de posséder une imagination débordante et très créative, puisqu’il est l’également l’auteur d’un roman qui prend pour forme un blog nommé Ihpil, totalement fictif, d’une jeune femme sami retrouvée morte au fin fond d’une piscine.
L’auteur pousse le champ de ses expérimentations littéraires encore plus loin avec Oiseau tout en se démarquant de ce qu’il a pu écrire précédemment, notamment de ses poèmes épiques. Cette couverture d’un dégradé de couleurs totalement hypnotisant presque surnaturel, et illustrée en fond de la trace d’un véhicule spatial s’éloignant de la terre, donne le ton à ce court roman extra-ordinaire. Celui-ci nous donne rendez-vous en terre ou plus exactement en planète inconnue, quelques décennies plus tard, en 2048 et en 2148, alternativement. Si 2048 marque l’année ou le premier bébé voit le jour sur Home cette planète étrange, 2148 voit l’apparition de ceux qui ont désormais colonisé ce nouveau lieu de vie d’êtres humains débarquant droit de la Terre. La première chose qui m’a interpellée de ce récit, c’est le fait de ne jamais vraiment savoir ce qui est arrivé à notre planète qui a pu pousser les hommes à la quitter, néanmoins le panel des éventualités est assez large compte tenu de sa situation actuelle. L’auteur nous propose une vision de cet avenir, forcément sinistre, puisque la galaxie ne propose aucun autre endroit plus favorable à l’homme. La narration par elle-même n’est pas davantage porteuse d’espoirs, même si une petite lueur d’espérance pointe à travers ces avancées technologiques qui lui permettent de survivre tant bien que mal sur la planète. Cela provoque un fort sentiment de malaise, une angoisse presque suffocante et délétère d’observer ces êtres humain évoluer sur un terrain sans avoir jamais vu leur planète d’origine alors même que Home est plus un abri, une sorte de bunker gigantesque, un endroit de survie qu’une terre d’accueil. Rien que ce nom Home est totalement désincarné et factice. Cette forme de survie, cette vie qui n’a d’autre but que de prolonger la factualité de son existence comme de sa fatuité, au détriment de sa qualité. Est-ce que l’effort en vaut la peine si tout ce qui caractérise l’humain, dont ses facultés cognitives, s’éteint peu à peu, écrasé par la rigueur de ces conditions de survie, et pour en être réduit à ne remplir que ses fonctions basiques, se nourrir, se reproduire, une simple fonction d’animal, mu par ce profond instinct de survie.
Il y a un peu de ces romans d’anticipations dystopiques, qui émane d’une situation présente réelle, ancrée dans une situation climatique préoccupante face à une implosion démographique exponentielle et des conflits aux armes de destruction massive ou non qui se multiplient. C’est un texte dépouillé de la moindre trace de sensation et sentiment, il emprunte une ligne directive froide et dénuée d’affect « l’homme », « la vieille femme », « les gens », « la mère », « un groupe » enfin presque. Il reste encore quelques traces d’un attachement proprement terrien à travers les liens filiaux qu’entretiennent encore certains. Les hommes deviennent des robots, c’est glaçant. L’auteur tâte du doigt l’inanité de vies sans savoir, but ni plaisir, sans distinction, c’est assez incommodant d’autant que l’écriture sèche et presque brute restreint davantage notre bulle d’oxygène.
Si la science-fiction propose pour l’instant des issues tout à fait fictives et improbables à l’avenir de l’homme, l’auteur met le doigt en plein là où ça fait mal en brandissant la menace d’une extinction de l’homme, qui passe par l’annihilation de toutes ses capacités intellectuelles, émotionnelles et cognitives. Au même titre que les espèces animales n’ont guère de places dans cette machine bien huilée qu’est en réalité cette colonie : l’oiseau est un animal très symbolique, qui pourrait représenter le nouvel élan de l’homme sur la planète. Si, seulement, l’Homme n’était pas l’Homme.
Ce récit me laisse face à une drôle de sensation, un brin oppressante, issue de cette confrontation face à un monde totalement préfabriqué et artificiel, à moitié gouverné par des automates bêtes et méchants, dépourvu de tout affect, de tout plaisir. Ces artifices permettent à l’homme de survivre dans cette bulle aussi fragile qu’éphémère et qui pourrait éclater à tout instant étant donné la rigueur du climat en général, et des vents en particulier. Quel genre de vie est-ce donc de passer ses journées à cultiver une terre pratiquement stérile et de ne s’accoupler que par instinct de reproduction. Réduits à l’état de prisonniers par ces conditions naturelles et cette absence d’atmosphère et d’oxygène, Oiseau offre une belle réflexion sur la (im)possibilité de s’affranchir de la terre, quand on sait à quel point l’homme et elle sont si intimement liés.
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