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Engagé, la sonorité et l’ardeur d’un titre signifiant : « Paris est une dette » est un livre qui résonne en ces jours, tant il est de haute contemporanéité.
Un manifeste efficace et poignant, le reflet des exils, l’ubiquité, l’unique seuil.
Nader est l’épicentre de ce vibrant récit. Nader est un jeune tunisien qui arrive à Paris, ville des Lumières. Brillant étudiant, intellectuel, invité par un éminent professeur de la Sorbonne pour faire une thèse, le Sésame, voire le Graal.
Son illustre professeur met Nader face au monde et ses vives réalités.
Il lui propose trois choix. Une thèse sur les écrits algériens de Tocqueville. Une comparaison entre l’Avare de Molière et les Avares de Jahiz ou bien l’aider à traduire de l’arabe : les Épîtres des Frères de la pureté.
Il va choisir pour s’inscrire en doctorat et à la bibliothèque : Tocqueville à Alger.
Nader est dépité. Pris en tenailles dans l’ubuesque administratif, lui, l’étranger qui sera recalé au sixième rendez-vous, s’il lui manque des papiers.
« Paris est une dette » est le double cornélien de « Paris est une fête » d’Hemingway.
« Paris n’a jamais été et ne sera jamais une fête pour nous, mon garçon, on est obligé de peiner, de cumuler trois ou quatre boulots pour rester digne. »
Il loge dans un hôtel puis un autre, répond au téléphone, réceptionniste, mais mal à l’aise avec les nombreuses touches, il est renvoyé . Il interpelle ses doutes, se heurte aux diktats d’une ville anonyme et dévoreuse de rêves. Nader pense à sa terre natale, au génie de l’enfance, au soleil brûlant, poussières de sable dans le désert dont chaque grain est un regret estimable.
« Un doctorat pour finir professeur remplaçant dans un collège perdu en banlieue, c’est ton horizon Nader, l’unique perspective que la France t’autorise. »
« Nader, il vaut mieux être défait et battu chez soi, voilà la première vertu de la vie , se dégrader en exil, c’est le pire destin pour un homme. »
Le désastre du monde en ses mains, le symbole même d’un double combat, lui, l’étrange (er). Il va travailler dans une boucherie. Reproduire le métier de son père, la transmission innée venue de Tunisie comme un passeport à sa survie.
Lâcher-prise avec ses études. Il va être de mimétisme dans ses tâches, le travail opératif comme la Sorbonne dans le grand jour, une bataille à mener contre la condition humaine.
Son patron est un bienfaiteur de l’humanité. Il est le Paris des valeurs. La dimension formidable de la fraternité. On ressent l’essentiel de la bonté humaine dans cette boucherie riche d’espoirs. Il y flotte un air d’Amélie Poulain.
Un devoir est imposé à Nader par Louis (son patron) et ami devenu. Celui d’écrire un roman et de le terminer. C’est un contrat qui éveille Nader et le force à avancer.
« Paris est une dette » est une ode rédemptrice. Le charme d’un livre sociétal qui reflète le vivant au fond de l’homme. Il est le point fort et ultime de l’intégration et de l’acceptation de soi. Un plaidoyer finement politique et sociologique qui n’hésite pas à pointer du doigt là où ça fait mal.
Caustique parfois, tant la réalité frappe les pages. Tendre aussi, dans une mélancolie bercée de cette belle Tunisie. Il est un livre utile pour le monde. Merveilleusement déplié par Saber Mansouri, (étudiants en littérature, il est pour vous!). C’est un livre qui ouvre et donne la réponse et honore la création et l’exaltation d’une renaissance.
« Où sommes-nous père ? En pleine mer petit. Ici, c’est Égée ». « Penser au frère syrien m’arracha au malheur d’être à Paris. »
La prodigalité. Publié par les majeures Éditions Elyzad.
Ce récit est une autobiographie philosophique de l'auteur sur sa vie, de sa naissance jusqu'au jour où il décide de partir pour l'étranger. Il raconte sa quête constante de s'enfuir de la Montagne Blanche pour s'élever et trouver la réponse.
Tout jeune, gardien de chêvres, il découvrait comment gagner de l'argent en étant un fin commerçant et en trouvant quelles sont les activités à réaliser pour vendre facilement. Vendeur d'escargot, d'eau puis fripier, il rentre à l'école et continue jusqu'à obtenir un diplôme. Professeur d'histoire, loin en fait de ses aspirations inconscientes, à vendre de l'Histoire à des élèves pour la plupart pauvres comme lui l'était et donc à la recherche d'astuces pour rapporter un peu plus à leur famille, vendre sans acheteur réel, qu'il ne peut convaincre, il s'ennuie.
Ecrit dans la langue de Molière, l'auteur nous offre aussi un voyage dans la Tunisie d'en bas, celle qui est paysanne, celle qui est pauvre, bien loin de notre quotidien bien occidental. C'est un voyage vers une terre presque inconnue où dès le plus jeune âge, les enfants partent à l'aventure alors que nos enfants eux, ne se souciaient de rien, jusqu'à leur mariage.
Son histoire, malheureuse parce que pauvre, riche aussi parce que pleine d'espoir, de vie et d'amour, est aussi un drame, celui de l'amour pour une femme, et de l'histoire, la philosophie, la démocratie arabe.
L'écriture est fluide, bien que trop de fois, il accumule les acteurs dans une seule phrase, longue et fastidieuse, fidèle au caractère du personnage, des phrases nerveuses, souvent agaçantes, insistantes.
Ce récit c'est l'élévation de l'être, celui du petit gardien de chêvres, devenu philosophe respecté, celui qui regardait le temps passé les pieds dans la poussière, à l'homme de savoir qui cherche le temps pour accomplir sa destinée.
Un récit passionnant, exotique, nous faisant découvrir le beau pays qu'est la Tunisie mais aussi l'espoir d'un homme, d'un peuple, d'une nation, d'une famille.
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