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Il n’est jamais trop tard pour découvrir une pépite et cette BD en est une ! Henri Amouroux, journaliste, écrivain et historien décédé l’année de sortie du livre en librairie avait donné l’idée à Patrice Serres, dessinateur connu entre autres pour Les Aventures de Tanguy et Laverdure, de réaliser ce bel album d’après le reportage d’Albert Londres (1884 – 1932) sur le Tour de France 1924.
Le titre - Les Forçats de la route - était tout trouvé puisque l’expression est signée Albert Londres lui-même, ce grand reporter qui, pour une fois, va rester en France. La rédaction du Petit Parisien, journal pour lequel il travaille lui confie cette tâche qu’il accomplit à fond, au volant de la Renault du journal, pendant trois semaines.
Ils sont 157 à s’élancer de Paris pour un vrai Tour de la France, avec des étapes au kilométrage incroyable. La maîtrise du dessinateur est évidente dès les premières images. C’est sombre, précis, impressionnant avec des visages formidablement expressifs. Quelques bulles agrémentent le récit réduit au minimum dans des cadres où l’on retrouve la plume d’Albert Londres.
C’est avec les frères Pélissier, Henri et Francis, très fâchés contre un commissaire trop pointilleux que notre reporter découvre tout le courage qu’il faut pour mener à bien pareille aventure. Il les retrouve dans un café, à Coutances, le lendemain de la première étape : Paris – Le Havre (381 km). Ces champions déballent tout leur ressentiment et lui montrent ce qu’ils doivent prendre pour tenir : cocaïne, chloroforme, pommades, pilules… C’est après ça qu’il trouve le titre pour son article.
Ce coup d’éclat des champions Français n’empêche par Ottavio Bottecchia, un jeune champion italien de se révéler et de l’emporter à Paris. Avant d’en arriver là, je me suis laissé prendre par le réalisme et la beauté des dessins, surtout lorsque le Tour arrive dans les Pyrénées puis, un peu plus tard dans les Alpes avec la fameuse Casse déserte de l’Izoard.
On leur fait prendre le départ de Bordeaux à 22 h pour arriver le lendemain à Bayonne à 18 h 30, après 482 km puis repartir à l’assaut de l’Aubisque, du Tourmalet et de l’Aspin pour arriver à Argelès. Albert Londres est là, avec sa pipe et son chapeau, toujours élégant. Il constate combien les voitures suiveuses sont dangereuses pour les coureurs dans les descentes.
La scène la plus terrible est cette chute au cours de l’étape Perpignan – Toulon (427 km), près de La Ciotat, où un coureur est traîné par une voiture suiveuse qui ne peut l’éviter. Déjà, les coureurs se plaignent d’un public qui laisse à peine la place de passer. Les routes de montagne ne sont pas goudronnées et les coureurs doivent réparer eux-mêmes…
Pour finir, je laisse la conclusion à Albert Londres : « Ils étaient partis plus de 150, ils arrivent 60 ! Vous pouvez venir les voir, ce ne sont pas des fainéants… Pendant un mois, ils se sont battus avec la route… Les batailles avaient lieu en pleine nuit, au petit matin, sous le coup de midi, à tâtons dans le brouillard qui donne des coliques, contre le vent debout qui les couche par côté, sous le soleil qui voulait les assommer sur leur guidon… Ils ont empoigné les Pyrénées et les Alpes. Ils montaient en selle à 10 h et n’en redescendaient que le lendemain soir à 6 h, comme l’on put le constater des Sables d’Olonne à Bayonne, par exemple. »
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
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