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Dernière sélection pour le prix des lecteurs Privat 2020 et nos adorables libraires ont sélectionné un roman passé inaperçu en cette rentrée littéraire : Athos le forestier. Il est vrai que la maison d’édition (Cambourakis) est plus discrète que d’autres mais elle offre des titres de grande qualité et Athos le forestier est un de ceux là.
L’histoire est celle d’Athos, forestier dans le Péloponèse, qui en 1943 échappe à une fusillade de la Wehrmacht et se cache dans une cabane. Sa femme et sa fille quittent Kalavytra. Mais quelques années plus tard la petite fille et son arrière petite fille s’y installent. Iokasti, l’arrière petite-fille cherche à résoudre le mystère Athos et se lance à sa recherche.
On n’entre pas dans ce récit facilement je dois l’avouer et ce n’est pas une lecture « détente » que l’on s’accorde après une journée de travail épuisante. Il faut avoir l’esprit libre pour se lancer dans la lecture de ce roman.
Athos est un personnage énigmatique pour le lecteur et pour les personnages féminins du roman dont les voix s’enlacent au fil des pages. Tour à tour les femmes de ce roman prendront la parole pour raconter leur histoire d’Athos, pour reconstruire ce mythe, cette figure paternelle qui semble perdu dans la vaste forêt grecque. Mais Athos et son histoire sont aussi pour l’auteure une belle occasion d’aborder un sujet qui est pour ma part nouveau : la place de la Grèce pendant la Seconde Guerre Mondiale et surtout la Guerre Civile grecque. L’histoire d’Athos est une réflexion sur la barbarie, la violence, la guerre et les guerres. Mais Athos le forestier est aussi un regard posé sur l’humanité et sur la nature comme un refuge face aux horreurs du monde, la nature comme ultime rempart à la barbarie humaine.
En résumé : une belle découverte littéraire, des sujets profonds et une écriture dense.
La littérature, dit-on, aide à comprendre le passé d’un pays, son histoire, ses drames lointains ou rapprochés. Ce présupposé est largement confirmé par le magnifique récit de Maria Stefanopoulou, qui signe à cette occasion son premier roman, même si cette auteure a déjà produit des nouvelles et essais sur la critique et la violence.
C’est un roman choral, qui expose successivement les points de vue des différents personnages : Athos, qui est forestier dans le Péloponnèse, se cache dans sa cabane car il passe pour mort, ayant échappé aux représailles de la Wehrmacht du 13 décembre 1943à Kalavryta. Dans ce village ont été massacrés tous les habitants. Son épouse, Marianthi et sa fille Margarita quittent la localité.
Près de quarante ans plus tard, Lefki, la fille de Margarita, s’installe à Kalavryta pour y créer une Clinique de la douleur car Lefki est médecin. Iokasti, fille de Lefki, représente la quatrième génération après la seconde Guerre mondiale : elle veut résoudre le mystère d’Athos, et se lance dans la forêt à la recherche de son grand-père Athos.
Ce roman est riche à plus d’un titre : il ne néglige aucun aspect : l’humain, l’historique, et l’écologique. En effet, Athos, comme l’indique le titre du roman, est forestier : il manifeste pour la forêt, pour la nature une complicité et une affection sans borne : « La nature, qu’Athos chérissait tant, était ma grande rivale. Il était toujours seul et libre avec elle. Et quand il était auprès de moi, il n’avait qu’une hâte ; retourner auprès d’elle. »
Les personnages de ce roman ne sont pas monolithiques, ils gardent, malgré les drames que traverse la Grèce à ce moment, leurs distances et leurs sens critiques. Ainsi, Lefki résiste-elle avec courage à la tentation, pourtant bien compréhensible, de la haine brute : « J’ai vécu avec la haine de la guerre. Haine des Allemands, haine des maquisards (…) Je n’ai pourtant jamais songé à me venger, je n’en ressentais pas le besoin. »
Ce récit nous plonge, aussi, dans les arcanes de l’histoire contemporaine grecque ; les horreurs de l’occupation allemande, bien sûr ; mais aussi les déchirements de la guerre civile survenue entre 1945 et 1947 qui a opposé les Grecs nationalistes et communistes. Il y a également une réflexion sur la guerre, la violence très riche dans ce roman, qui nous séduit par l’humanité de ses personnages et le dévoilement de leurs interrogations, de leurs doutes, de leurs souffrances : « Il existe trois voies pour conjurer le viol de sa conscience et gagner sa liberté personnelle :devenir martyr en participant à un juste combat ;feindre de se soumettre en dissimulant son credo ; s’exiler de son propre chef .Fidèle aux lois de la nature ,le forestier a tracé un quatrième chemin . »
C’est très réussi pour ce premier roman. Nous attendrons ave grande impatience les prochains écrits de Maria Stefanopoulou.
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