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Avec ce neuvième roman, Joelle Losfeld poursuit son formidable travail de mémoire autour de l’œuvre de Jean Meckert.
« La lucarne » c’est l’histoire d’Edouard Gallois, chômeur et pacifiste.
Un jour, une étrange émotion le saisi sur le pont d’Iena. C’est une illumination, une révélation, il veut se dévouer à l’impossible: la paix du monde. Mais que faire d’une aussi grande idée quand on est aussi petit? Pris dans les filets d’une société et d’un mariage médiocre, la désillusion d’Edouard sera cruelle.
C’est un texte bouleversant qui dit la difficulté à se faire comprendre quand on est « rien », la difficulté à trouver sa place. C’est aussi un texte sombre sur le couple, sur l’incommunicabilité entre deux êtres. C’est bien sûr un roman social dans lequel on retrouve l’obsession de l’auteur à dire les tragédies et les révoltes des petits dans une société qui enferme chacun dans sa condition.
Ça me file des frissons rien que d’y repenser.
« Quiconque arrive au pouvoir ne songe plus qu'à consolider sa position; c'est un fait reconnu. Sous prétexte de réalisme, il fait appel aux habiles et compose avec les puissants, suivant le précepte de la fin qui justifie les moyens... C'est ainsi qu'à vivre au milieu des loups, le plus sincère militant devenu ministre, ou conseiller (...) gagne, vite en force ce qu'il perd en pénétration, perd vite en générosité ce qu'il gagne en subtilité. Il se transforme doucement en machine de guerre, c'est inéluctable. Il perd ainsi rapidement le contact avec la réalité nébuleuse et vivante du commun. Il devient bourgeois, avec un équilibre, une doctrine, des slogans et des sorties de secours. »
Avec une citation comme ça, je ne pense pas utile de rédiger une chronique. Il y a ceux à qui cet extrait parlera, ceux qui seront curieux d'en savoir plus et ceux que cela laissera froid. Je ne m'adresse pas à ces derniers; nous nous retrouverons sur d'autres livres. Aux autres, je crie « Lisez Jean Meckert ! (bordel) ».
Historique et romanesque, ce roman se déroule deux ans après la Libération. Une Libération au goût amer pour certains résistants qui constatent qu'il reste encore beaucoup de gens impunis pour leurs agissements durant l'Occupation.
Jusqu'à quand doit-on continuer la lutte ? Faut-il faire des concessions ? Peux t'on tuer au nom du bien ? Est-ce que la justice existe ? Ne comptez pas sur Meckert pour vous apportez les réponses.
Un roman d'une force noire absolue et un final assourdissant.
1 - Tu prends immédiatement un papier et un crayon
2 - Tu notes ce livre
3 - Demain, tu vas en librairie l’acheter
4 - Tu le lis dans la foulée
5 – On en reparle
C’est un peu court comme argumentaire, j’en conviens. J’ai tellement été remuée par ce livre que je voudrais le mettre entre les mains de chacun d’entre vous.
C’est un texte plaidoyer contre la peine de mort qui était encore une réalité en 1952, date de parution du roman.
René Le Guen est un jeune homme, presque encore un adolescent, sans repère, sans éducation, vivant dans la pauvreté. Sa violence a bien servi pendant l’Occupation. Il a été le larbin, le porte flingue des héros de la Résistance, celui qui faisait le sale boulot. Mais cette époque est terminée. Il est aujourd’hui condamné à mort pour meurtre. Dans l’oppression effrayante de sa cellule de prison, René attend de longs mois son exécution aux côtés d'autres criminels destinés également à monter sur l'échafaud. Il y a un docteur qui aurait empoisonné sa femme, un Corse qui a commis un meurtre mafieux et un ouvrier qui a tué sa fille de 3 ans.
La narration alterne entre le présent en prison et le récit du passé de René. Jean Meckert va tout à la fois raconter avec une minutie effrayante les conditions de l’incarcération et de l’exécution tout en contestant la pertinence judiciaire de la peine de mort. Il fustige la guillotine comme seule solution à des problèmes de société, fait le procès en creux de l’inégalité sociale et de la responsabilité collective.
« Nous sommes tous des assassins » est un texte fort, un véritable réquisitoire qui démontre l’absurdité de cette Loi du Talion institutionnelle, l’inhumanité et l’injustice de cette machine à tuer légale.
Ne faites pas la même erreur que moi, lisez ce livre sans attendre.
PS : hasard du calendrier, je publie sur ce roman alors que vient de disparaitre le journaliste et écrivain Gilles Perrault . Son livre « Le pull-over rouge » a forgé ma conviction à l’adolescence que la peine de mort était définitivement moralement inacceptable.
[...] Nous sommes tous des assassins est glaçant, et plusieurs jours après avoir refermé le livre, le malaise persiste, mais la conscience naît. Au-delà de la peine de mort (encore en vigueur dans les pays dits « civilisés ») qui n’en est pas moins un sujet fondamental, Nous sommes tous des assassins soulève les questions de la solidarité, de l’apprentissage social, de la justice. Tous ces points, en 2012, prennent encore leur sens le plus profond. Voulons-nous vivre dans une société dans laquelle le bonheur de l’homme ne compte pas ?
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/nous-sommes-tous-des-assassins-jean-meckert-a80136610
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