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Un chant choral dans le vertige de l’inoubliable.
« Si les forêts nous quittent », un manifeste à l’instar d’une canopée.
La polyphonie est essentialiste, bouleversante, d’une beauté à couper le souffle.
Un choc esthétique, tant la forêt est signifiante, fascinante dans sa finitude. On s’accroche à elle, on l’enserre, on retient cette langue végétale, empreinte des signes du monde vivant.
L’acuité verbale du renom dans un texte d’amplitude crépusculaire.
Ici, ce sont des jeunes gens, dans le repli du temps, la jeunesse qui saigne de nos erreurs fatales, et de notre arrogance d’une surpuissance faussée.
Sous l’ombre d’un arbre, corps-racines, le regard qui interpelle les urgences. L’immanquable lâcheté humaine de baisser les yeux face aux fléaux climatiques. Ils sont en posture d’éthique, emblématiques et attentifs aux feuillages brûlés par la canicule. À l’inaction gouvernementale, eux, si jeunes, les boucs-émissaires, qui seront les derniers, donc les premiers à en subir les conséquences.
Ginkgo dont l’aura sublime ce groupe de jeunes. Elle, vénérable, dont les motivations, les idéologies, sont des paysages aux mille réconciliations possibles. Tous parlent ici. Litanie, poème-source, prière et langage dans une narration de génie.
Ginkgo, absolue et divine, qui acclame le sursaut révolutionnaire. Sans aucune arme, avec pour seul appui, la parole et le geste .
Le groupe est de mimétisme, soudé, dans une concorde-clairière. Elle est végétale, celle qui fédère. Mystique, énigmatique, sève et essence. Ils sont dans la fusion intrinsèque des grandes importances et des mêmes causes. L’attitude en connivence.
« Si les forêts nous quittent » est un plaidoyer. Un livre blanc à bâtir.
« Tout avait bien commencé. Nous parlions aux arbres, remercions la terre. Nous tombions de temps à autre dans une profonde dépression, ne voyions plus devant nous que déserts et forêts en feu, si la forêt nous quitte, c’en est fini de nous. »
Ginkgo disparaît après une action militante. Nul ne sait véritablement où elle se trouve. Que s’est-il passé ? Tous quêtent une réponse. Ce livre est le porte-voix. C’est beau et dramatique. Poétique et douloureux. Les épiphanies atteignent le plus précieux. Cette génération climatique, ces trentenaires qui sont dans la véhémence d’une parole qui pourrait changer la donne et faire reculer l’heure du mot fin.
« Nous restons, mais nous ne savons pas si nous sommes encore là. »
« Je me rappelle que Ginkgo m’a dit que nous devions être comme un navire qui traverse le brouillard, sans que le brouillard s’en rende compte. »
« C’est seulement quand on m’a dit que je devais m’imaginer que mon corps avait pour toujours deux degrés de plus, que j’ai compris. »
Ils sont des guetteurs, des lanceurs d’alerte, les angoisses exacerbées, au paroxysme de nos indifférences. Fresque engagée et sylvestre, ils répondent au monde, dans cette lente et irrévocable explosion en advenir. Irradiants de lucidité, tous content Ginkgo, son silence qui pèse, l’incertitude de la savoir en vie. L’allégorie du dernier jour.
« Comme quand Ginkgo est entrée. La lumière a apporté d’abord son ombre, ensuite elle est arrivée. C’était une soirée pleine d’entrain. Selina nous a chanté L’Ave Maria de Janacek. »
« L’instinct est un principe explicatif, et l’instinct lui a dit qu’elle était encore quelque part – partout où l’on lutte contre la destruction du monde. »
« Si les forêts nous quittent » est un requiem écologique.
Comme la pleine lune qui ne ment pas, Francesco Micieli est en quête du Vivant.
« Nous sommes en train d’écrire une lettre à notre monde ».
Traduit de l’allemand par Christian Viredaz. Publié par les majeures Éditions Hélice Hélas.
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