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Le grand jeu
Anna est une femme d’âge mûr. Ancienne institutrice, elle est désormais femme de ménage à St Petersbourg. Elle vit dans un grand appartement avec sa mère tyrannique, qui perd la tête et son fils, Pavlik, qui rêve de créer un jeu vidéo.
La vie de ces trois personnes est hantée par les secrets et les non-dits. Mais pas seulement, les relations familiales sont dysfonctionnelles : Anna se sacrifie pour sa mère et son fils et ne récolte au final que du mépris.
Et pendant ce temps, la Russie annexe la Crimée…révélant les dissensions de la société russe.
Elena Tchijova est une autrice russe contemporaine. J’avais repéré son nom et plusieurs de ses romans, publié aux éditions Noir sur Blanc, mais c’est la première fois que je me confrontais à sa plume.
J’ai trouvé ce roman très intéressant et très complexe. Il ne faut pas s’arrêter à une lecture superficielle de ce texte au risque de passer à coté de sa force. Celle de dénoncer une responsabilité collective russe, de ce passé non assumé, non-dit, qui conduit à engluer encore maintenant les relations familiales, amicales ou professionnelles.
J’ai aimé comment chaque génération se débat avec ses souffrances actuelles et celles des générations précédentes, souvent sans même le savoir consciemment.
Pourtant cette complexité, qui conduit le lecteur à rechercher les sous-entendus, à interroger les lignes, a aussi été un bémol. Je me suis parfois perdue dans le propos de l’autrice notamment s’agissant de l’arc narratif du fils, Pavlik.
Cela reste néanmoins une découverte intéressante et je suis très curieuse de savoir ce que vous, vous en avez pensé ou si vous avez déjà lu un roman de cette autrice.
Elena Tchijova a été d’abord connue en France pour son roman Le temps des femmes, depuis mars 2014, elle s’est s’opposée aux actions du gouvernement russe en signant un appel aux personnalités russes contre ses actions en Ukraine, en 2018, elle a signé un appel pour transférer le journaliste ukrainien Oleg Sentsov, détenu en Russie, dans son pays d’origine. Il m’a semblé essentiel de connaître les positions d’Elena Tchijova pour savoir sous quel angle lire ce roman, qui évoque, à intervalles réguliers, le conflit en Ukraine sous l’angle de l’annexion de la Crimée depuis la vie d’une famille russe de St Pétersbourg presque ordinaire.
Anna Petrovna est mère célibataire de Pavel, de son diminutif Pavlik, elle vit dans l’appartement familial avec sa mère devenue aveugle, une femme vindicative et acariâtre, qui gère sa fille comme tout bon despote russe, à l’aide d’une main de fer, et d’une langue affilée. Anna travaille comme femme de ménage dans l’espoir un jour de rencontrer un compagnon, elle a élevé son fils devenu un geek passionné dans les jeux vidéo, qui vit dans le but de créer le sien, Le grand jeu. La vie avec cette mère du genre de la tatie Danièle russe est éprouvante pour Anna, qui déambule comme dans une geôle dans l’appartement grand et rempli d’antiquités luxueuses dont Anna ignore tout, comme elle ignore tout du passé de sa mère, encore plus de son père.
Anna est prise dans cette vie monotone, dont elle n’attend plus grand-chose d’autant que sa mère dans le rôle de la tsarine qui est le sien ne cesse de la tourmenter et que son fils s’est peu à peu enfermé dans une sorte de réalité alternative constituée des pixels de ses jeux vidéo, et du grand jeu qu’il veut créer à partir des souvenirs soviétiques de sa grand-mère. Et en arrière-plan, on vit par procuration l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, qui creuse encore un peu plus le fossé entre les membres de cette drôle de famille, où personne ne se côtoie vraiment. À l’évidence, la Crimée, et le Donbas, renvoie notre grand-mère aux tendances autoritaristes vers le passé et la guerre. C’est un trio qui marque la trame de ce roman, dont il semblerait que l’autrice ait pris des pinces pour évoquer l’Ukraine envahie. De fait, la situation de cette fédération russe, et l’exil forcé du fils à l’étranger va dans ce sens. Si la grand-mère symbolise toute l’omnipotence du pouvoir soviétique – l’allusion au petit père des peuples à travers l’appellation Petite Maman dont Anna affuble sa mère , la mère soumise – avec sa doudoune verte chinoise qui date des années 90 – représente cette génération suivante qui essuie les plâtres du capitalisme sauvage, qui a vu la population se farcir des queues interminables pour tenter de parvenir à s’acheter de quoi se sustenter, et le fils, de cette nouvelle génération, qui regarde à la fois en arrière pour comprendre l’URSS et se projette dans un nouveau monde, qui hélas ne rentre pas tout à fait dans le cadre très étroit imposé par le gouvernement actuel.
C’est une lecture exigeante, qui demande un-e lecteur-trice attentif-ve. Beaucoup de passages descriptifs, les transitions entre les personnages parfois très tortueuses, la portée métaphorique des personnages peut-être un peu complexe à appréhender (à mon sens, le personnage de la mère aveugle a été la plus évidente.). Car chacun des personnages s’échappe littéralement dans son propre monde, le passé consciencieusement tu de la grand-mère, dont elle seule connaît les protagonistes, les rêveries profondes de la mère sur tout ce dont elle est passée à côté, le monde virtuel du fils qui a tourné les éléments de la vie de la grand-mère en un nouveau monde, très militarisé, où il règne en grand maître. Ces trois univers se côtoient, à l’abri de cette nouvelle guerre qui se joue derrière eux, et qui lorsqu’ils se mélangent aboutissent à un résultat détonnant de choses antinomiques – on a d’ailleurs de nombreux flash-back qui ramènent aux années 90 – et résultent en des situations ubuesques, tel l’appartement ultra-moderne, mais qui repose sur des installations électriques désuètes et nécessitent régulièrement l’utilisation de bougies !
La question de l’identité ouvre d’ailleurs ce roman, en une belle dédicace à Dostoïevski, sur l’évocation de la ville de Pierre le Grand, « cet espace, le plus prémédité au monde, dostoïevskien », on ressent cette scène comme le lieu d’une pièce où se joue une tragédie, de ceux qui y échouent à trouver leur destin, en fuyant, en se cachant, en se créant un monde parallèle. Je le disais plus haut, on est constamment dans un mélange des genres – la modernité de Pavlik qui emprunte aux souvenirs soviétiques de sa grand-mère, l’utilisation du verbe troller lorsqu’Anna évoque son fils moqueur – et des identités qui semblent être impossibles à se fixer, l’héritage de Pavlik étant celui de sa grand-mère et de sa mère des années 90. Ce roman est truffé d’images et de métaphores, de mises en parallèle, de doubles discours. (...)
Deux personnages, un homme et une femme. Sept jours de leur vie. Un lieu unique, leurs datchas à la campagne.
Lui est traducteur, pas très brillant et timide, hanté par les fantômes de ses parents. Elle est une businesswoman surbookée, qui ne respire pas la joie de vivre. Ils sont là pour s’occuper des datchas laissées par leurs parents respectifs. Un lieu où ils ont habité enfants, où ils se sont croisés. Et pourtant, ils paraissent être à des années lumières l’un de l’autre et évoluer dans des mondes parallèles qui n’ont aucune raison de se croiser. La seule chose qu’ils semblent avoir en commun est leur amour pour la nature, leur besoin de solitude et les tourments liés à leur enfance et à leurs parents qui les conduisent à s’interroger sur le passé, la transmission et sur l’évolution de leur pays.
Tout le roman d’Elena Tchijova est empreint de nostalgie, de regrets. La présence omniprésente de la nature et de la forêt donne au récit un rythme lent et contemplatif jusqu’au déchaînement final qui semble être le contrepoint de la fin d’un monde, d’un changement radical pour la Russie.
L’auteur interroge le passé tourmenté de la Russie, son histoire à travers, notamment, les personnages des parents des deux protagonistes et de l’ami traducteur du personnage masculin. Prises de position, soutien au parti, injustice, questionnement ou manque de questionnement, les deux personnages semblent avoir du mal à assumer les choix de leurs parents. Mais est-ce que cela les engage eux aussi ? Sont-ils forcément les dépositaires des choix de leurs parents ?
J’ai beaucoup aimé ce livre, le rythme imposé, lent et descriptif. J’ai retrouvé tout ce que j’aime dans la littérature russe, ce qui est souvent qualifié d’âme russe : tourmentée, pleine de questions, chargée de symboles, dense… Avec un aspect plus contemporain que ce que j’ai lu jusqu’à présent (Tolstoï, Dostoïevski, Pouchkine, Tchekhov… ou même Berberova. Sans parler de Soljenitsyne, qui a une place à part).
La Planète des champignons est le second roman d’Elena Tchijova. Son premier, Le Temps des Femmes, a reçu le Booker Prize Russe en 2009 et a été adapté au théâtre en 2011. Il est aussi disponible aux Editions Noir sur Blanc.
- Avis Final - Explorateur de la Rentrée Littéraire 2018 -
Elena Tchijova dans « La Planète des champignons » nous conte sept jours dans le quotidien de deux personnes : un homme, plutôt ordinaire, traducteur de profession ; et une femme, une vraie businesswoman indépendante. Tout les opposent, mais ils partagent quelque chose d’essentiel : ils sont voisins grâce a une datcha dans le nord de la Russie.
Sept chapitres, sept jours, sept très longs jours où l’on découvre la vie quotidienne de chacun des deux personnages, leurs différentes interrogations sur leur passé, mais aussi cette nouvelle vie dans un nouveau pays suite à l’effondrement de l’URSS. On commence avec les deux personnages, chacun dans sa vie, avec l’évocation de son passé, leurs flashbacks respectifs, avant de suivre leurs rencontre.
Sept jours pour saisir la chance de se rencontrer, de se connaitre, de trouver des liens communs.
C’est une première pour moi, la littérature russe m'est totalement inconnue. Ce fut, hélas, une grande déception car je n’ai absolument pas accroché à cette planète de champignons à cause d’un manque évident de revirement, d’action, de bouleversement. Ce roman est extrêmement lent avec énormément de descriptions, beaucoup trop dense à mon goût ce qui rend le roman identifiable à un petit escargot.
Cependant, j’ai aimé ce côté historico-culturel de la lecture grâce à ce grand pays qu’est la Russie et qui livre une histoire tout aussi grande. Elena Tchijova a une belle plume, tantôt simpliste, tantôt poétique malgré le style trop descriptif. Dans ce contexte, il est très difficile de s’accrocher ou de s’identifier aux personnages.
« La Planète des champignons » est un huit clos complètement contemporain qui je n’en doute pas trouvera son lecteur.
Dommage pour ma part, je suis passé à côté.
Rendez-vous de la page 100 - Explorateur de la Rentrée Littéraire 2018 :
"La Planète des champignons" est organisé en sept chapitres. Un chapitre par jour, les 100 premières pages nous révèlent les trois premiers jours : lundi, mardi et mercredi.
Deux protagonistes, un homme qui est traducteur et une femme, travaillant dans les affaires.
J'ai beaucoup de difficulté à rentrer dans l'histoire de ces deux personnages car il y a énormément de description sur leurs vie quotidienne, ce qui rend ce roman extrêmement lent, trop lent.. de plus, il ne se passe pas grand chose... à m'en faire bailler pour le moment...
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