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14e siècle à Toulouse et sur les routes : deux jeunes frères dominicains quittent leur couvent pour aller acheter du parchemin et de l'encre. Leur vieux prieur veut leur dicter ses mémoires et plus particulièrement sa rencontre avec Maître Eckhart, prêcheur adulé puis maudit par l'inquisition.
Ce roman se lit quasiment d'une traite malgré quelques fois des références philosophiques, théologiques, nous sommes quasiment dans un livre d'aventure, une fresque historique et nous rencontrons de nombreux personnages, que ce soient les frères dominicains, les prieurs, les autorités ecclésiastiques et les fameux inquisiteurs et leur procès et méthodes, les membres des béguinages. Il y a des scènes de bataille, comme celle impressionnantes du siège de Kaffa, des scènes de torture, des scènes de dictée des mémoires, de leçons à la Sorbonne, de doutes des frères.
Un texte superbement écrit qui nous transporte au Moyen Age, avec brio et suspense.
#Croixdecendre #NetGalleyFrance
Un roman sur fond historique avec des personnages forts, une écriture tonique.
La peste qui a parcouru l'Europe dans les années 1340 . La vie austère des moines et la lutte de pouvoir par l'inquisition.
Un roman qui donne aussi envie de découvrir les ouvrages antérieurs d'Antoine Sénanque.
Finalement un bon moment de lecture
367. Deux jeunes moines dominicains prennent la route vers Toulouse, chargés par leur prieur d'aller acheter du parchemin vélin de la meilleure qualité afin de rédiger ses mémoires. Plutôt heureux de quitter la monotonie de leur couvent, les deux candides ne se doutent pas du guêpier dans lequel ils se sont fourrés. L'Inquisition les attend, alertée par les projets du prieur dont les confessions pourraient révéler un secret capable d'ébranler l'Eglise et ses fondements.
Dès que parait un polar historique érudit situé au Moyen-Age, mettant en scène des ecclésiastiques, des inquisiteurs et des controverses religieuses, on le compare inévitablement au Nom de la rose d'Umberto Eco, le maitre étalon du genre, absolument indépassable. Dans ce cas précis, oui, j'y ai pensé, évidemment, mais la comparaison s'arrête vite car ici, pas de huis clos, on est autant dans le roman d'aventures que le polar car l'auteur fait voyager ses personnages de Toulouse à Paris, en passant par Cologne, Avignon où siège la papauté à cette époque, et surtout le Moyen-Orient sur la route de la soie.
A partir de là, Antoine Sénanque construit un récit à deux temps maitrisé de bout en bout : le récit au passé des mémoires du prieur racontant sa jeunesse aux côtés de Maître Eckart, renommé théologien, ainsi que les origines de la Peste en 1347 lors du siège de Kaffa ; vingt ans après, le récit au présent de la lutte entre l'Inquisition et les moines dominicains menés par le prieur.
L'auteur alterne avec brio scènes de bravoure ( incroyables descriptions du siège de Kaffa, comptoir génois, par la Horde d'Or tatare du Khan Djanibeg, ou encore des geôles cauchemardesques de l'Inquisition toulousaine ) et scènes plus intimistes, notamment celles centrées sur la philosophie religieuse de Maître Eckart dont le prieur a été le disciple. C'est une prouesse de rendre accessible sa théologie complexe qui est au coeur de l'intrigue. J'ai eu l'impression de tout comprendre de sa mystique abolissant la distance de majesté entre Dieu et les hommes à partir du moment où ces derniers accomplissent un dénuement radical de l'âme. Maître Eckart n'a jamais été déclaré hérétique ( il s'en est fallu de peu ) mais ses écrits ont été condamnés et censurés.
Et puis, il y a les personnages, tous formidablement incarnés, tous dotés d'une psychologie fouillée qui se révèle progressivement ( pour les plus âgés comme le prieur Guillaume et son sacristain ) ou se transforment ( pour les plus jeunes, Antonin l'érudit et Robert, plus rustique ), y compris le « méchant », le fourbe inquisiteur Louise de Charne, qui avait tout pour être caricatural et finalement est bien plus complexe, et donc intéressant, que l'expression manichéenne de sa haine et de son ambition. Sans oublier les formidables béguines formant des communautés de femmes pieuses et travailleuses vivant leur foi de façon enflammée, quasi charnelle.
Le récit est rempli de surprises, de secrets révélés, de rebondissements au coeur de la folie des luttes intestines entre les différents ordres religieux ( ici Franciscains vs Dominicains ) et au sein de ces mêmes ordres religieux. On se régale des dialogues enlevés,. Bref, ce roman est palpitant et passionnant !
Un secret à confier pour l’éternité et deux moines se lancent dans l’achat de vélin et le lecteur de Antoine Sénanque est au cœur du Moyen-Âge. Deux moines du couvent de Verfeil, Frère Antonin et Frère Robert, se voient confier la lourde tâche d’aller chercher pour le prieur Guillaume du pur vélin et des noix de galle pour faire de l’encre résistante et bien noire.
Sur leur chemin, les aventures vont leur offrir de quoi satisfaire leur curiosité du monde et par la même occasion, notre connaissance du leur. Non seulement, ils découvrent les ravages laissés par la peste noire, mais assistent au traitement des lépreux, puis aux méthodes très obscures de l’Inquisition.
Antonin, fils de médecin, et Robert de Nuys, fils d’Albert, valet de ferme, et non paysan car son père avait des terres qu’il travaillait pour son seigneur, sont liés par une amitié forte. À partir de là, les deux destins vont basculer. Et, Antonin va devoir connaître le secret de son prieur pour sortir Robert de la prison du mur debout dans laquelle le tient le grand Inquisiteur du Languedoc, Louis de Charnes, dominicain, précédemment cistercien à l’abbaye de Fontfroide.
Le Moyen-Âge de Antoine Sénanque
On est loin du tranquille Moyen-Âge représenté habituellement. Les odeurs sentent le rance mais aussi le sang séché ainsi que l’odeur des simples qu’il faut manier avec précaution pour uniquement soigner. Car, c’est aussi la mort qui, ici, est côtoyée, soit ce sont les cadavres catapultés sur une ville assiégée ou la tête d’une truie dont le crâne est évidé. Rien de la brutalité de ce monde, Antoine Sénanque ne nous l’épargne.
Outre le contexte historique d’une grande précision, Croix de cendre se découvre comme un roman noir et une enquête extrêmement bien menée qui va confronter le prieur Guillaume au grand Inquisiteur. La route de la soie et son comptoir de Kaffa et ses tartares, Antoine Sénanque prépare notre rencontre avec le grand théologien Maître Eckart.
Antoine Sénanque a perçu toute la modernité de ce dominicain, penseur du 13ème siècle, qui a prêché la décroissance et le dénuement face aux maux du monde, en l’occurrence en son temps, la peste noire. Mais, en permettant à la culture et aux connaissances de se diffuser dans la population en dehors des érudits, c’est aussi tout un projet de société qu’Eckart a voulu démontrer.
Ode à la connaissance pour tous
Ce roman historique et noir à la fois prend des allures de conte philosophique.
Seulement, Maître Eckart, trop précurseur, fut pourchassé par l’Inquisition et dû défendre lui-même son sort devant les différents tribunaux. Il mourut avant d’avoir reçu la condamnation du pape. La fin du XXème rétablira une autre vérité…Mais, quelle actualité pour nos maux d’aujourd’hui où les guerres saintes continuent, en leurs noms, à cacher les appétits de domination des hommes !
Au fil des pages, sont décrits la confection d’un manuscrit et le travail énorme du moine scripteur. Quel bel hommage à la littérature ! Le tout est ponctué de tout le savoir sage sur les hommes, sur la vie et le monde que les réflexions d’Antoine Sénanque lui ont appris au fil de ses expériences.
L’ancien neurologue réputé, qu’est Antoine Sénanque, a glissé dans son roman des personnalités souffrant de handicap invisible. Là, on reconnaît une sorte de dyspraxie du seul ami, assistant de la Sorbonne, enfermant trop intensément l’objet de sa saisie. Ailleurs, c’est la dyslexie qui handicap le frère adopté par Eckart et Eckart, lui-même pour retranscrire ses écrits. Même le futur grand Inquisiteur a droit à l’empathie de l’écrivain pour expliquer son obésité.
Les femmes ne sont pas en reste dans ce milieu masculin. Antoine Sénanque présente les béguinages, où des femmes libres pieuses, religieuses ou laïques, se ressemblaient pour vivre en communauté. Mais que serait un grand roman sans son histoire d’amour, et Croix de cendre en raconte une, particulière certes, mais où le cœur en est envahi.
Déçue de ne pas voir Croix de cendre dans la dernière sélection du Goncourt… Car, moi, Croix de cendre de Antoine Sénanque m’a conquise !
Chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2023/10/29/antoine-senanque-croix-de-cendre/
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