Les meilleurs albums, romans, documentaires, BD à offrir aux petits et aux plus grands
Un temps colocataire de Virginie Despentes et longtemps figure des nuits techno-queer parisiennes, l’ex-mannequin et batteuse punk Ann Scott que son roman culte Superstars avait propulsée en 2000 porte-étendard de la Génération X et de la pop culture française, a tout quitté il y a une poignée d’années pour la solitude au plus secret d’un bout de côte bretonne. Dans ce dernier roman couronné du prix Renaudot 2023, elle met en scène son double littéraire, en quête de réinvention.
A quarante ans passés, Alex ne supporte plus sa vie parisienne : son logement étroit en plein coeur du Marais ; le tapage de son milieu branché où, compositrice de musique de film et ex-guitariste fan de Velvet Underground, elle ne s’entend plus créer ; ses amours compliquées, masculines et féminines, désespérément condamnées à l’impasse. Sans même prendre le temps de la visiter, la voilà qui loue une maison en Bretagne, prend le train en attendant que ses cartons la suivent, et entame une nouvelle et spartiate existence, seule à proximité d’un maigre hameau désert, à plusieurs kilomètres du moindre commerce alors qu’elle n’est pas motorisée, sans chauffage ou presque, mais au calme avec son jardin et le voisinage vivifiant de la mer.
Elle abandonne ses rares amis proches, tout aussi minés par le mal-être et pourtant à mille lieues de s’imaginer quitter le bitume parisien, mais, à l’heure où, jeunesse enfuie, s’impose le premier bilan d’une vie qu’elle aura voulu brûler par les deux bouts, à grands coups de déglingues, de passions et de défonces en tout genre, la solitude restant son bien le plus évident, autant qu’elle lui serve à renouer avec ses voix intérieures, pour son propre équilibre et pour sa création musicale. Si le ton est mélancolique, Alex fait preuve d’une résilience obstinée, contrairement à son amie Margot et à son nouveau voisin Léo à jamais la proie d’insurmontables démons intérieurs. « Les illusions sont faites pour être perdues », admet-elle. Alors, elle fait face à ses mille nouvelles servitudes quotidiennes, apprend à se contenter des petites choses : « La beauté est faite pour les gens qui ont le temps de l’absorber » et à se recentrer sur l’essentiel : « Il n’y a rien ici, rien d’autre que ce qui se passe en dedans ». Dans sa solitude bretonne, elle finit par se sentir moins seule que dans la foule parisienne. « Elle est entourée de tous les génies imaginables à chaque seconde. Il lui suffit de mettre n’importe quel disque, de plonger dans n’importe quel film, d’ouvrir n’importe quel livre. Elle parle à ses fantômes en permanence. »
L’autodérision se mêle à la mélancolie dans cette évocation très autobiographique des désillusions qui ont fait place aux rêves des « insolents », cette jeunesse festive éprise de liberté maximale qui, de punk attitude en révolution sonique, a fait la vitalité de l’underground culturel parisien des années 1980 et 1990. L’avant-garde a pris de l’âge et ne se reconnaît plus dans le Paris d’aujourd’hui. Non seulement les artistes d’alors, en tête desquels Ann Scott aime citer Lou Reed et Bowie, ont disparu, mais personne ne les remplace. « YouTube est rempli de centaines de milliers de guitaristes et de bassistes et de batteurs qui font des reprises et qui sont super doués, mais sans le truc avant-garde qui sidère ou l’émotion qui va scotcher toute une génération. Ils ont la technique mais rien de plus, et quand bien même ce serait le cas, pendant combien de jours ou d’heures une découverte nourrit avant qu’on passe à la suivante ? » « Il n’y a plus que la frustration d’essayer de faire de l’art dans une époque qui s’en fout », le pire restant sans doute à venir avec l’intelligence artificielle pour, sans génie, refondre l’existant à l’infini.
Roman intime des désillusions de l’auteur âgée de cinquante-sept ans, ce récit d’un exil volontaire loin de la scène parisienne est l’ultime révolte d’une artiste éprise de liberté, désespérée de voir les techniques numériques et les réseaux sociaux ronger peu à peu la création. Beaux objets techniques créés à la chaîne et sans âme par des machines – photographies, musiques et bientôt livres –, produits sitôt consommés, sitôt jetés et oubliés, qu’auront-ils encore d’artistique ? Alors, mieux vaut claquer la porte avant qu’elle ne se claque toute seule. « Elle ne reviendra que si l’art sauve de nouveau. Peut-être un jour, peut-être jamais. »
Alex est musicienne et compose des musiques de films
A quarante ans passés, elle décide de quitter Paris, ses deux amis, Margot et Jacques et part s'installer dans le Finistère, dans une maison assez isolée.
Elle découvre avec bonheur l'océan et la solitude.
Quelques autres personnages gravitent autour d'Alex.
La plupart ont un traumatisme qui gère leurs vies.
Chacun est beau à sa manière.
C'est une écriture qui coule entre poésie et mélancolie, sans dialogues..
Un roman sociétal où il est question de réseaux sociaux, de covid entre autres.
J.'ai bien aimé me plonger dans l'univers d'Ann Scott et passer ces moments avec Alex.
On fait la connaissance de trois amis : Alex, Margot et Jacques. Tous les trois tentent de faire le bilan de leur vie. Alex est compositrice, on lui doit des BO et des albums, son talent est reconnu mais elle ne se sent pas très à l’aise à Paris depuis quelques temps déjà.
Elle a eu des aventures avec des hommes et des femmes, elle assume plus ou moins sa bisexualité. Elle a eu une histoire avec Jean ; ils sont passé de l’amitié à une relation amoureuse mais cela ne lui ne convenant guère, elle décide de ne pas continuer ce qui provoque une réaction brutale de la part de Jean qui l’exclut complètement de sa vie.
Elle décide de partir, pour une nouvelle expérience en Bretagne, dans une maison sans confort qu’elle a choisie au dernier moment sur Internet, et pense pouvoir dans la solitude se remettre à composer un nouvel album.
En fait la maison est sinistre, loin de tout, la région peu fréquentée durant la saison et sans voiture cela se révèle compliqué : le taxi pour aller au magasin le plus proche ou alors se déplacer à pied. Mais, en dépit du froid, de l’humidité, il y a les promenades au bord de la plage (il faut marcher assez longtemps pour y arriver mais je leu en vaut la chandelle.
Coincée dans les problèmes domestiques, elle se rend vite compte que les amis ne viendront guère, les relations via internet ou téléphone sont de plus en plus compliquées car l’éloignement physique provoque l’éloignement des relations : on échange de moins en moins longtemps, de plus en plus rarement, chacun étant pris dans sa propre vie.
Elle a compris qu’elle ne leur manque pas, que ça leur suffit de l’avoir au téléphone régulièrement, qu’ils sont trop pris par la ville pour ressentir son absence physique, mais eux, est-ce qu’ils se demandent de quoi elle a besoin. Est-ce qu’ils se disent que s’ils lui manquent trop, elle prendra le train pour revenir les voir ?
Elle croise, lors de ses longues promenades Léo, un jeune homme durement fracassé par la vie, depuis une agression aussi violente que gratuite l’a cloué de longs mois à l’hôpital alors qu’un poste important l’attendait. Il a tenté une carrière aux USA mais désenchanté il a fini par revenir et fuir, lui-aussi vers la Bretagne.
Il tombe sous le charme d’Alex mais elle le voit à peine. Le confinement survient alors et complique encore les choses. On peut fuir mais on ne se fuit pas soi-même…
Ann Scott parle très bien des crises de milieu de vie, de la sexualité, de la solitude, des bilans, des réseaux sociaux et leurs dérives, des vies fracassées des protagonistes qui ont perdu leurs illusions tandis que la pandémie vient rendre la vie encore plus compliquée. L’auteure se livre à une analyse sans pitié de la société actuelle.
Après avoir eu un peu de mal à entrer dans l’histoire, car les personnages étaient à des années lumières de mon monde, (je les trouvais assez nombrilistes, mais je connais mal le milieu artistique a fortiori parisien !) je me suis attachée peu à peu à Alex car son histoire pourrait être la mienne, celle de chacun de nous. Ce roman ne va pas arranger le pessimisme, ou la sinistrose ambiante alors à éviter en cas de blues…
C’est le dixième livre de l’auteure et, en ce qui me concerne, c’est une assez jolie découverte qui me donne envie de lire un autre de ses livres, peut-être La grâce et les ténèbres…
https://leslivresdeve.wordpress.com/2024/01/29/les-insolents-dann-scott/
Avec ce prix Renaudot, je découvre une auteure que je n’avais encore jamais lue.
L’histoire, assez courte et sans grandes péripéties, c’est celle d’Alex, une musicienne qui, un matin, décide de quitter Paris et son tumulte pour aller s’exiler dans un coin perdu du Finistère. La maison qu’elle loue, elle l’a dénichée sur le net, c’est une maison sans charme et glaciale l’hiver, loin des zones habitées. Mais la mer est là, tout près.
« Et brusquement, elle le voit. L’océan est là, au bout de la petite route à une centaine de mètres. Elle voit le blanc du sable, et la ligne qui sépare le bleu du ciel de l’eau. Elle commence à sentir l’air marin au fur et à mesure qu’elle se rapproche »
Cet isolement que la musicienne quadragénaire a voulu, loin de ses amis, doit lui permettre, enfin elle l’espère, de se recentrer sur sa musique et de composer un nouvel album solo. Dans sa solitude, elle se recentre sur elle et revient sur sa vie qu’elle fait dérouler comme les séquences d’un film. Elle explore ses relations amoureuses, Lou, Margot ou encore Jean qu’elle vient de quitter et à qui elle ne parle plus. Dans cette maison inconfortable et isolée, elle organise une nouvelle existence.
« Elle ne se sent pas seule, ici, et elle ne l’est pas. Elle est entourée de tous les génies imaginables à chaque seconde. Il lui suffit de mettre n’importe quel disque, de plonger dans n’importe quel film, d’ouvrir n’importe quel livre. Elle parle à ses fantômes en permanence. »
Puis c’est le confinement dû au Covid. Ses amis parisiens le vivent avec difficulté tandis qu’elle, sur son bord de mer, poursuit ses promenades sans rien changer à ses habitudes.
Le long de ce récit intimiste, passent les vies de ses amis. Il y a Margot dont le petit frère s’est suicidé, et Jacques qui ne sait comment quitter son jeune amant. Et surtout Jean, l’ami devenu son amant et qu’elle a quitté. Il lui renvoie son amertume et son mépris en disant d’elle qu’elle n’est qu’une « petite conne habituée à être courtisée et à qui tout est dû. Une égoïste qui s’est servie de lui à un moment où elle se sentait trop seule. »
On croise aussi Léo, jeune homme fracassé, qui ne fera que couper la trajectoire d’Alex.
Ces personnages qui gravitent autour d’Alex comme des papillons attirés par la lumière, nous en disent davantage sur la personnalité complexe de l’héroïne.
Tous ont perdu leurs illusions, et l’épidémie de Covid ne fait qu’accélérer les choses. Peut-être qu’Alex est précurseur en voulant d’une autre vie déconnectée des réseaux sociaux et loin de Paris afin de se retrouver.
Ce sont tous ces personnages qui sont les insolents du titre, mais j’avoue ne pas avoir très bien compris ce choix des insolents pour des personnages dont l’auteure nous montre les fêlures.
Avec une écriture sans fioriture et tout en nuance, Ann Scott nous offre un récit intimiste et mélancolique et un portrait de femme tout en finesse.
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