Souvent présenté comme l’épigone de Rimbaud, et donc relégué au second plan de la création, Germain Nouveau est peut-être en train de gagner la reconnaissance à laquelle son œuvre prétend justement.
On ne peut pas faire l’économie de les associer, tant leur amitié virile et écrite a été forte. Leurs œuvres s’entrecroisent, ils ont écrit de conserve, notamment quand Rimbaud inventait ses Illuminations ; les deux hommes se sont aimantés puis arrachés l’un à l’autre, le jeune Nouveau quitte Londres en y laissant son vénéneux acolyte au début des années 1870, sans toutefois se défaire de son influence poétique. Il rentre en France reconverti à la religion chrétienne à laquelle il s’abandonnera jusqu’au mysticisme, partageant un temps ce regain de piété avec Verlaine.
A 40 ans, il s’éloigne du monde qui le dégoûte et se rapproche des idéaux de dépouillement de Saint Benoît Ladre, saint patron, selon l’auteur, « des pauvres, des célibataires, des mendiants, des SDF, des pèlerins, des itinérants et des personnes inadaptées ». Jusqu’à la crise paroxystique et mystique du 14 mai 1891 qui l’envoie à l’asile, une semaine avant le retour de Rimbaud en France. La bougeotte le reprend à sa sortie de l’hôpital. Ce sera l’Angleterre, la Belgique puis Alger en 1893, avant de vouloir rejoindre Aden où il croit retrouver Rimbaud, qui est mort depuis deux ans.
Bien plus que Rimbaud, Germain Nouveau aura mis sa vie en cohérence avec l’absolu de la poésie, mourant dans l’indigence la plus extrême et parfaitement acceptée, quand ses œuvres richement illustrées par Rodin circulent dans les salons parisiens. Il s’éteint en 1920, dans le village qui l’a vu naître, après avoir parcouru le monde jusqu’à l’Afrique.
Considéré comme l’un des trois grands poètes français par Aragon, aux côtés de Baudelaire et Rimbaud en 1948, on ne peut pourtant pas dire que Nouveau a connu une réception faste et grasse. C’est à peine si l’on s’y intéresse enfin : la première biographie actuellement disponible a été publiée en octobre 2020 par José Lenzini. Grâce à Martin Mirabel et à son Germain Nouveau, un cœur illuminé (ed. « Le Quai » Michel de Maule), on entre de plain-pied dans une biographie courte mais trépidante, alerte et précise, forcément un peu romantique mais suffisamment scrupuleuse pour en faire une lecture importante à l’appui de l’œuvre du poète mystérieux.
Tout au long de cette biographie étayée, Martin Mirabel qu’on connaît davantage pour sa passion pour la musique, trace des lignes de force entre la poésie et la peinture à laquelle l’œuvre de Nouveau doit tant, mais aussi avec la musique qu’il aimait profondément, à l’instar, finalement, de tout ce qui célèbre la Beauté.
Mirabel a le mérite d’embarquer le lecteur sans prétention, au rythme d’une biographie qui se lit comme un roman et restitue le mouvement, l’insatisfaction, l’ivresse et l’intégrité mystique d’un des plus beaux poètes des temps modernes.
On déplorera simplement que l’éditeur n’ait pas fait l’élémentaire travail de correction dans ce livre où les majuscules inappropriées, subjonctifs lacunaires et autres coquilles ne manquent pas et c’est bien dommage.
J'avoue aussi ne pas connaître du tout Germain Nouveau.
Dois-je le révéler ? Je ne connais pas Germain Nouveau ! Je compte sur ce livre pour le découvrir !
Mais pourquoi pas ?
Bonjour, merci beaucoup pour cette chronique. Je ne sais pas par contre si j'accrocherai à cette biographie qui se lit comme un roman...