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«CONQUE : nom féminin, coquille en spirale servant d'instrument depuis des millénaires. Coquillage berceau et tombeau, où se niche, caché, le grain de sable.» Quelque part dans un pays battu par le vent du large, Martabée, historienne de renom, est mandatée par l'Empereur sur un chantier archéologique qui vient de mettre au jour les vestiges des Morgondes, guerriers-marins millénaires, dont seuls les bardes avaient gardé la trace. Martabée est chargée de les étudier afin de redorer le roman national. Pour entremêler sa gloire à celle du pays, Martabée excave des héros et des mythes, avec émerveillement. Mais quelque chose murmure sous le sable froid. Un appel sourd, dissonant, qu'elle devra choisir de suivre ou d'ignorer. Lorsque la lucidité prendra le pas sur l'ivresse et sur la vanité, qui choisira de voir, et qui s'aveuglera encore ? Fable politique et poétique, ce deuxième roman de Perrine Tripier allie le mystère à la contemplation. Dans cette Conque s'enroulent des énigmes, portées par un souffle épique.
La gloire efface tout, excepté le crime
Je me souviens parfaitement lorsque je terminais Les guerres précieuses m’être dit : il faut retenir ce nom Perrine Tripier. J’étais sûre d’avoir lu le premier roman d’un talent qui ne saurait mentir.
Avec Conque le talent se confirme, le sujet est le même : le passé ; mais sous un prisme plus universel, à l’aune de l’Histoire.
Ici, pas de définition de lieu ni de temps, une époque passée, un Empereur à la tête d’un pays.
Martabée , historienne dont la renommée est arrivée jusqu’aux oreilles de l’empereur, est engagée pour mettre au jour la civilisation des Morgondes.
« Elle se sentait récompensée, reconnue et ça, ça elle l’avait attendu toute sa vie. »
Passionnée elle s’atèle à la tâche, l’Empereur lui déroule le tapis rouge, il l’installe dans une villa somptueuse quoique froide, où elle pourra bénéficier de tous les avantages lui facilitant le travail et le compte-rendu périodique qu’elle doit en faire, car l’Empereur tient absolument à ce que le peuple soit informé de la grandeur de cette civilisation enfouie.
À la gloire des Morgondes, à la gloire de l’empereur !
« L’Empereur, galvanisé par la découverte, fouetté par les cris guerriers de ses ancêtres, souleva des montagnes pour créer les fonds, ou plutôt instaura de nouvelles taxes. »
Le lecteur éprouve très vite un vertige qui n’a rien à voir avec le prestige de la situation de Martabée, il ressent qu’un piège est sur le point de se refermer sur elle.
Les équipes travaillent d’arrache-pied et elle doit retranscrire au fur et à mesure les découvertes, mais celles-ci montrent une civilisation barbare vis-à-vis des femmes notamment, c’est au-delà du possible.
Le passé enchanteur vire à l’horreur absolue.
Mais l’Empereur ne veut rien savoir et entend bien se mêler de refaire l’Histoire et enfouir les exactions de ces barbares.
Au début il ne s’agissait que de glisser, dans le bulletin rédigé, une phrase du cru impérial, mais très vite la situation devient glauque et sans retour possible. Le désaccord de Martabée vire au cauchemar absolu, le piège se referme.
Et c’est à se moment de la narration que se déploie le génie de notre narratrice, de métaphore en métaphore, elle fait parler les éléments, chaque conque, chaque moulure a quelque chose à dire.
Les phrases reprennent inlassablement les mots des découvertes archéologiques, comme autant de dessins, qui au fur et à mesure deviennent opaques, sèment le trouble.
J’ai noté cette expression dans une maison Perrine Tripier écrit : « les plafonds sont courts », toute la magie est là dans cette contorsion du vocabulaire pour nous pénétrer de part en part, comme une épée, pour nous faire ressentir le dilemme d’une vie face aux exigences abusives du pouvoir.
Ce livre nous offre une réflexion non sur le passé mais sur notre monde contemporain notamment l’Amérique qui nous contamine avec la révision de l’Histoire, chacun mettant dans le chaudron de la pensée commune tout et n’importe quoi. Ni plus ni moins qu’une manière de barrer la route à la réflexion, avec cette lecture de l’Histoire, Zola n’aurait jamais écrit son J’accuse.
Un roman qui analyse finement tous les ressorts des totalitarismes et qui nous amène à être vigilant, nous renseigner et à ne pas répandre n’importe quoi.
Un talent qui se confirme au-delà de mes espérances, tout est là le fond, le style qui devient reconnaissable et ça c’est l’apanage des grands.
J’aurais aimé voir ce livre sur les listes des grands Prix.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2024/10/26/conque/
Après son magnifique et émouvant premier roman Les guerres précieuses, Perrine Tripier poursuit son investigation de l’emprise du passé, non plus sur une narratrice enfermée dans les vestiges de son enfance, mais sur une société mythifiant son Histoire pour asseoir sa grandeur.
Dans un pays sans nom aux technologies très actuelles, des fouilles archéologiques ont mis au jour les vestiges d’une antique civilisation tournée vers la mer, dont on n’avait jusqu’ici conservé que la seule mémoire d’une geste héroïque. Ravi de cette occasion de renforcer le prestige national au travers de ces glorieux ancêtres, des guerriers capables, sur leurs frêles esquifs, de se mesurer aux océans et aux gigantesques baleines, l’Empereur en même temps soucieux de détourner l’attention de dépenses somptuaires de plus en plus contestées réquisitionne l’historienne et professeur d’université Martabée Gaeldish pour qu’elle se fasse le chantre, sous son contrôle bienveillant, de l’immense portée de cette découverte. Afin qu’elle puisse publier ses bulletins d’information dans les meilleures conditions, il lui donne les pleins pouvoirs sur le chantier de fouille et l’ensevelit sous les cadeaux princiers.
Flattée et elle-même enthousiasmée, la scientifique étouffe sa gêne face aux intrusions dirigistes et souvent ridicules du monarque pour se consacrer à ses nouvelles tâches. Tout va pour le mieux, jusqu’à ce que, donnant soudain corps au malaise jusqu’ici imprécis et insidieux persistant à infiltrer le texte en même temps que l’esprit de Martabée, l’avancement des fouilles finisse par dévoiler un visage inattendu et pour le moins ignominieux des tant fantasmés Morgondes. Le dilemme est cruel pour l’historienne. Aura-t-elle le courage de publier la vérité, elle qui a désormais tout à perdre, en plus de son indépendance ?
Toujours aussi envoûtante et sensorielle, la plume de Perrine Tripier excelle à suggérer atmosphères et sensations. D’un côté la minéralité des vestiges, de l’autre les variations de la lumière, du vent et de la mer, viennent refléter la diffraction entre l’effrayante pesanteur de la réalité historique et l’immatérialité du temps et de la mémoire. Ecrire l’Histoire est un pouvoir, de l’Histoire l’on ne retient toujours que ce que l’on veut bien, son récit est indissociable du regard et de l’interprétation de l’auteur. Alors, à l’ère post-vérité où les leaders politiques usent du langage et de l’émotion davantage que des faits et de l’argumentation, ce conte imaginaire pointe l‘instrumentalisation politique des mythes, dans un jeu de pouvoir trouble et violent évoquant aussi bien les grandes dictatures que le nouveau storystelling idéologique à l’américaine.
Aussi dérangeante que somptueusement écrite, une fable dont l’imaginaire renvoie aux réalités passées et contemporaines des manipulations politiques de la mémoire collective.
C'est la première fois que je lis cette autrice et l'expérience a été à la fois déroutante et captivante.
L'histoire nous entraîne dans une grande aventure archéologique où une équipe de chercheurs découvre une civilisation ancienne, les Morgondes. Très vite, ces trouvailles sont utilisées par le pouvoir en place pour glorifier le passé et renforcer la fierté nationale. Mais au fil des pages, ce qui semblait n’être qu’une célébration de héros antiques se transforme en quelque chose de bien plus sombre.
Le début du roman m’a un peu déstabilisé, principalement à cause du style d’écriture que j’ai trouvé parfois trop chargé. Les descriptions détaillées ralentissent le rythme et m'ont semblé superflues. Cependant, l’intrigue prend une tournure inattendue et captivante. Ce qui commence comme une simple exploration archéologique devient une réflexion profonde sur la vérité historique, les manipulations politiques et les mensonges que le pouvoir est prêt à camoufler.
Ce basculement est la vraie force du roman. L’auteur nous pousse à questionner notre propre relation avec le passé et à réfléchir sur les récits historiques que l’on glorifie ou occulte, pour des raisons politiques ou idéologiques.
Malgré les longueurs initiales, le roman parvient à marquer les esprits par ses thématiques d’actualité et ses révélations troublantes. Une lecture qui dérange et fait réfléchir sur notre société moderne, où l'Histoire peut être réécrite selon les besoins du moment.
Martabée est enseignante en histoire et elle est engagée par l’Empereur dans des fouilles archéologiques mettant à jour des vestiges des Morgondes, des anciens guerriers marins, symboles et légendes locales. Ces fouilles sont une opportunité pour l’Empereur de mettre en avant son territoire, de renforcer son emprise en confirmant son lien familial avec ces anciens guerriers. Tout d’abord perplexe sur ces découvertes, notamment pour le coût que cela va engendrer, le peuple va suivre semaine après semaine le cheminement de ces travaux. Ils vont éprouver une certaine passion à ce sujet et cela va décupler leurs attentes. Seulement, voilà, après toutes les découvertes qui mettent en joie les archéologues, l’Empereur et le peuple, les découvertes vont faire apparaître un tout autre pan de l’Histoire que personne ne doit savoir.
Je suis clairement sortie de ma zone de confort et parfois, ça fait du bien. Je me suis mise à aimer cette passionnante histoire d’un empire à la recherche d’un symbole d’un roman national. J’ai été emportée par cette histoire, qui peut aisément nous ramener à un contexte politique, pas bien éloigné du nôtre : on suit les dessous de la politique et de ses institutions, de la communication ou de la censure envers le peuple, le mutisme sur ce que le peuple ne doit pas savoir.
Il y a pas mal de descriptions qui permettent de s’immerger dans l’histoire mais parfois, elles sont alambiquées et contemplatives. Je me suis un peu perdue quelque fois, dans des détails qui n’apportaient pas grand-chose à l’intrigue. En tout cas, je n’y ai pas été sensible, même si j’avoue que certaines descriptions « de trop » pouvaient laisser à penser qu’elles étaient là pour mettre en valeur le bonheur des personnages dans leur travail de recherche, leurs découvertes de plus en plus incroyables et passionnantes.
En bref, avec ce roman relativement court, j’ai apprécié les dessous d’une recherche archéologique, la pression que cela engendre quand la politique s’en mêle, les principes que se fixent certaines personnes mais qui sont prêtes à y mettre fin et ce, pas toujours pour de bonnes raisons. La fin m’a profondément marquée. Ce livre est à lire !
Un auteur inconnu pour moi, une decouverte à faire pourquoi pas ,est ue découverte de découvrir se peuple est ses intrigues
J'attendais avec impatience son deuxième roman. Franchement j'adore cette auteure. Son savoir écrire est époustouflant. Laissez vous emporter!
Connaissez-vous les Morgondes, ce grand peuple de guerriers qui a disparu au Moyen-Age ? Dans un pays imaginaire gouverné par un Empereur, Martabée est désignée pour superviser un chantier de fouilles qui a mis à jour la capitale de ce peuple.
Sous les ordres de l’empereur, elle loge à la villa Brumèse, seule face à l’océan.
J’ai aimé suivre Martabée dans les différentes zones du chantier de fouilles, découvrir les vestiges de cette civilisation étrangement disparue du jour au lendemain sans explication.
Et qu’elle fut grandiose cette civilisation qui enterrait ses guerriers au coeur des ossements des baleines qui montent vers le ciel. Qu’elles sont raffinées ces colonnes sculptées du palais royal.
J’ai aimé cet empereur qui se promène dans le chantier comme un enfant gâté qui touche à tout et se fait prendre en photo tout le temps ; cet empereur dont les discours comportent décidément trop d’adjectifs.
J’ai aimé l’odeur du café matinal sur le champ de fouille et le thé aux herbes de l’après-midi, le jus d’orange du matin de Martabée.
J’ai aimé l’intuition de Martabée : il n’y a pas de femmes dans les corps retrouvés. Et quand les femmes seront découvertes, s’en sera fini de la grâce dont jouissait Martabée auprès de l’empereur.
Bien sûr, les chercheurs découvrent de magnifiques conques en or qui font un bruit trop fort mais l’empereur s’en servira comme symbole.
Un symbole, ce coquillage berceau et tombeau, où se niche, caché, le grain de sable.
Une lecture qui m’a embarqué dans un univers féérique et tragique.
Un roman qui pose la question de l’utilisation des traces du passé (ce qu’en fait l’empereur, ce qu’il en attend).
Un roman qui pose la question de la place des femmes dans les Grandes Civilisations disparues.
L’image que je retiendrai :
Celle des couleurs vertes et bleues de l’océan qui se retrouvent de partout dans le roman. J’ai préféré ces couleurs à celle de la chevelure de feu de l’empereur.
https://www.alexmotamots.fr/conque-perrine-tripier/
Deuxième roman pour la jeune romancière Perrine Tripier qui avait fait son entrée parmi les grands avec Les guerres précieuses. Dès le second opus, l’écrivaine montre qu’elle ne va pas se cantonner dans un seul domaine mais offrir un éventail de toutes les imaginations possibles.
D’exploratrice du passé intime elle se convertit en une exploratrice du passé universel. Dans un temps qui doit être le nôtre, nous découvrons un pays digne géographiquement du désert des Tartares – la mer en prime – et où règne en maître un Empereur absolu. Jadis, ce lieu a été la villégiature d’un peuple antique : les Morgondes, des guerriers-marins millénaires, des êtres qui fascinent l’Empereur dont il se proclame un descendant.
Des vestiges sont découverts et l’Empereur nomme une historienne et universitaire de renom, Martabée, et non le vulgarisateur Darius. Pour Martabée, cette promotion signe à la fois l’espérance et le doute, la joie et la crainte… Cadeau impérial ou cadeau empoisonné…
Perrine Tripier d’une sagacité hors-pair et d’une plume virevoltante décortique ce qu’est le fléau de la post-vérité. Par cette fiction en forme de fable, elle décrit le fil tenu qui existe entre vérité et histoire, ce fil agité par le pouvoir politique. L’historienne respecte le passé, l’Empereur veut en faire un conte merveilleux. Le résultat peut devenir effroyable. Royaume imaginaire mais parfois si proche de la réalité.
« Conque » est une histoire qui vous emporte, vous surprend ; permet de créer des parallèles avec le présent et le passé et déploie des images dans un subtil jeu subliminal. C'est aussi une histoire d'écriture qui porte au sommet l'art des belles lettres, qui se fiche des modes et de la popularité ; une plume créative où l'encre se love dans les mots pour faire jaillir poésie et narration. C'est un voyage vers l'inconnu, vers le fantasmagorique et pourtant si concret dans ses formes abstraites.
Blog Le domaine de Squirelito ==> https://squirelito.blogspot.com/2024/08/noisette-archeo-politique-conque.html
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