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Manfred Baumann est un homme d’habitudes. Directeur d’une agence bancaire à Saint-Louis dans le Haut-Rhin, il mange tous les midis à La Cloche où il se rend aussi le soir pour prendre un ou plusieurs verres au comptoir. Solitaire depuis sa plus tendre enfance, il ne parle à personne, se contentant d’observer Adèle, la jeune serveuse.
Quand elle disparait mystérieusement, Manfred est interrogé par l’inspecteur Gorski, un policier désabusé qui ne s’est jamais vraiment remis de sa première affaire d’homicide qui a vu condamner un SDF, coupable tout désigné mais innocent.
Même s’il n’a rien à se reprocher, si ce n’est d’avoir espionné Adèle, Manfred ment au policier, lui cache le peu qu’il sait et s’enferre dans ses mensonges, faisant de lui le principal suspect de Gorski.
Ambiance désuète à la Simenon pour un duel entre deux hommes qui ont finalement plus en commun qu’ils ne le pensent, deux hommes malheureux et gris dans une ville qui l’est tout autant. Car ce polar, sombre et addictif, se concentre plus sur l’atmosphère que sur l’action. On est à Saint-Louis, une petite ville sans intérêt particulier, un endroit figé dans le temps où les personnages végètent sans autre ambition que de ne pas mourir d’ennui.
Les deux personnages ont renoncé au bonheur, à la joie, à la vie. Ils se contentent de jouer leur rôle, banquier pour l’un, policier pour l’autre. Leur rencontre ne fait pas d’étincelles, c’est un face à face psychologique entre deux taiseux.
Des gens ordinaires dans des situations extraordinaires, des secrets et une certaine vision de la province pour un polar original au dénouement étonnant. A découvrir si l’on aime Maigret, Chabrol et les surprises.
Après le suicide de sa sœur aînée, une jeune londonienne décide de piéger le psychothérapeute de cette dernière, Collins Braithwaite. Celui-ci est célèbre et également très controversé.
Dans cette optique, elle s'invente un "nom de scène", Rebecca Smyth (en référence au roman de Daphne du Maurier).
Le récit est partagé entre les écrits de la jeune sœur (cinq cahiers ayant échu à l'auteur du roman) et la biographie de Collins Braithwaite, dont on sent la personnalité borderline.
Le mélange des deux est absolument fascinant et réjouissant : la propriétaire des carnets s'y livre-t-elle vraiment ? Ou bien ment-elle comme elle ment à son thérapeute ? Est-elle réellement saine d'esprit ?
La frontière entre les deux personnalités, d'une part la jeune sœur et de l'autre l'indépendante et décidée Rebecca Smyth, se fait de plus en plus fine, et nos interrogations plus intenses.
Quel régal de se laisser prendre à nouveau dans les filets de Graeme Macrae Burnet !
Après L'Accident de l'A35 qui m'avait beaucoup plu, j'ai retrouvé l'auteur écossais en grande forme.
Le Londres des Swinging Sixties est bien restitué et ajoute un parfum de liberté et de transgression à l'ensemble. Une réussite !
Reconstitution historique de l'auteur sur les traces de l'un de ses ancêtres, ce livre nous fait découvrir la vie d'un misérable village écossais au 19ème siècle, et on fait la connaissance de Roderick Macrae, jeune paysan de 17 ans.
Certainement un travail de recherche long et méticuleux sur le quotidien des paysans de l'époque dans un système quasi féodal tout d'abord, puis sur la conduite d'un procès après un triple meurtre dont tout accuse Roderick Macrae.
Mais Graeme Macrae Burnet a plus d'un tour dans son sac, il ne manque pas d'humour ni de malice, comme on finit par le découvrir !
Si j'avais su au début de ma lecture ce que cela cachait en réalité, je ne me serais pas intéressée aux mêmes éléments, et cela aurait été dommage
C’est un roman étrange, un peu hors du temps, que l’on verrait bien adapté au cinéma en noir et blanc… par Chabrol?
Manfred Bauman est un triste sire. Accoudé au comptoir du restaurant de la Cloche, l’esprit accaparé par une auto-analyse du moindre de ses propres gestes, et de l’effet qu’ils ne manqueront pas de produire sur les habitués, on ne peut pas dire que le personnage inspire la sympathie. Quant à cette curieuse impulsion qui le conduit à épier Adèle, la serveuse lorsqu’elle quitte son travail pour aller rejoindre un jeune homme à scooter…
Quand l’inspecteur Gorski entre en scène, c’est pour tenter de résoudre l’énigme de la disparition d’Adèle, et le projet lui tient particulièrement à coeur, dans le but à peine avoué d’exorciser un échec ancien, peut-être lié aux insuffisances d’un enquêteur débutant.
Alors Manfred, toujours dans le calcul subtil des conséquences de ses dires, avec une marge d’erreur confortable, s’enferre dans les mensonges, induits par ses précédentes allégations. Alors que la vérité l’aurait sans doute exclu de la liste des suspects, ou pas….
Je ne lis pas les préfaces, et en tout cas, pas avant d’entamer la lecture du roman proprement dit. Mais suffisamment intriguée par le ton et l’histoire, j’ai voulu en savoir plus sur cet auteur. Et là, on se demande si ce n’est pas Manfred Bauman lui-même qui a pris la plume pour nous embobiner! C’est signé des initiales de l’auteur affiché sur la couverture, mais on y découvre la vie romanesque de Raymond Brunet qui serait le véritable auteur. Quant à Chabrol…..
Tout cela pour dire que cette préface -là, il ne faut pas la manquer.
C’est avec beaucoup de talent que Graeme Macrae Burnet entraine son lecteur dans un tourbillon de miroir aux alouettes, qui empêchera ce roman de tomber dans une oubliette de la mémoire! Et incitera à découvrir les autres écrits de l’auteur
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