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Manfred Baumann est un solitaire. Timide, inadapté, secret, il passe ses soirées à boire seul, en observant Adèle Bedeau, la jolie serveuse du bar de cette petite ville alsacienne très ordinaire.
Georges Gorski est un policier qui se confond avec la grisaille de la ville. S'il a eu de l'ambition, celle-ci s'est envolée il y a bien longtemps. Peut-être le jour où il a échoué à résoudre une de ses toutes premières enquêtes criminelles, qui depuis ne cesse de l'obséder.
Lorsque Adèle disparaît, Baumann devient le principal suspect de Gorski. Un étrange jeu se met alors en place entre les deux hommes.
Une affaire en apparence banale, des vies, une ville, qui le sont tout autant... Graeme Macrae Burnet nous démontre ici avec une incroyable virtuosité que la banalité n'existe pas : elle est la couverture de l'inattendu. À la façon des grands maîtres du noir, de Simenon à Chabrol, il transfigure avec un incroyable talent l'histoire de ses deux héros, paralysés par un passé mystérieux, dont la délivrance réserve bien des surprises.
Manfred Baumann est un homme d’habitudes. Directeur d’une agence bancaire à Saint-Louis dans le Haut-Rhin, il mange tous les midis à La Cloche où il se rend aussi le soir pour prendre un ou plusieurs verres au comptoir. Solitaire depuis sa plus tendre enfance, il ne parle à personne, se contentant d’observer Adèle, la jeune serveuse.
Quand elle disparait mystérieusement, Manfred est interrogé par l’inspecteur Gorski, un policier désabusé qui ne s’est jamais vraiment remis de sa première affaire d’homicide qui a vu condamner un SDF, coupable tout désigné mais innocent.
Même s’il n’a rien à se reprocher, si ce n’est d’avoir espionné Adèle, Manfred ment au policier, lui cache le peu qu’il sait et s’enferre dans ses mensonges, faisant de lui le principal suspect de Gorski.
Ambiance désuète à la Simenon pour un duel entre deux hommes qui ont finalement plus en commun qu’ils ne le pensent, deux hommes malheureux et gris dans une ville qui l’est tout autant. Car ce polar, sombre et addictif, se concentre plus sur l’atmosphère que sur l’action. On est à Saint-Louis, une petite ville sans intérêt particulier, un endroit figé dans le temps où les personnages végètent sans autre ambition que de ne pas mourir d’ennui.
Les deux personnages ont renoncé au bonheur, à la joie, à la vie. Ils se contentent de jouer leur rôle, banquier pour l’un, policier pour l’autre. Leur rencontre ne fait pas d’étincelles, c’est un face à face psychologique entre deux taiseux.
Des gens ordinaires dans des situations extraordinaires, des secrets et une certaine vision de la province pour un polar original au dénouement étonnant. A découvrir si l’on aime Maigret, Chabrol et les surprises.
C’est un roman étrange, un peu hors du temps, que l’on verrait bien adapté au cinéma en noir et blanc… par Chabrol?
Manfred Bauman est un triste sire. Accoudé au comptoir du restaurant de la Cloche, l’esprit accaparé par une auto-analyse du moindre de ses propres gestes, et de l’effet qu’ils ne manqueront pas de produire sur les habitués, on ne peut pas dire que le personnage inspire la sympathie. Quant à cette curieuse impulsion qui le conduit à épier Adèle, la serveuse lorsqu’elle quitte son travail pour aller rejoindre un jeune homme à scooter…
Quand l’inspecteur Gorski entre en scène, c’est pour tenter de résoudre l’énigme de la disparition d’Adèle, et le projet lui tient particulièrement à coeur, dans le but à peine avoué d’exorciser un échec ancien, peut-être lié aux insuffisances d’un enquêteur débutant.
Alors Manfred, toujours dans le calcul subtil des conséquences de ses dires, avec une marge d’erreur confortable, s’enferre dans les mensonges, induits par ses précédentes allégations. Alors que la vérité l’aurait sans doute exclu de la liste des suspects, ou pas….
Je ne lis pas les préfaces, et en tout cas, pas avant d’entamer la lecture du roman proprement dit. Mais suffisamment intriguée par le ton et l’histoire, j’ai voulu en savoir plus sur cet auteur. Et là, on se demande si ce n’est pas Manfred Bauman lui-même qui a pris la plume pour nous embobiner! C’est signé des initiales de l’auteur affiché sur la couverture, mais on y découvre la vie romanesque de Raymond Brunet qui serait le véritable auteur. Quant à Chabrol…..
Tout cela pour dire que cette préface -là, il ne faut pas la manquer.
C’est avec beaucoup de talent que Graeme Macrae Burnet entraine son lecteur dans un tourbillon de miroir aux alouettes, qui empêchera ce roman de tomber dans une oubliette de la mémoire! Et incitera à découvrir les autres écrits de l’auteur
La disparition d'Adèle Bedeau captive d'entrée par son atmosphère tendue,suffocante où la banalité du quotidien règne sur une petite ville d'Alsace.
Dès le prologue, le lecteur est pris dans la toile que tisse avec beaucoup d'intelligence Graeme Macrae Burnet.
Un incipit qui questionne le lecteur et qui initie un jeu entre lui et ‘' l'auteur ‘' du roman.
Un roman policier dans la veine de ceux du grand Georges Simenon avec toute une galerie de personnages haut en couleurs qui contribuent à maintenir tout le long de l'intrigue une ambiance tendue et malsaine à souhait.
J'ai notamment apprécié les face à face à couteaux tirés entre le principal suspect qui dissimule des éléments importants susceptibles d'éclairer la disparition de la jolie serveuse et l'inspecteur qui n'a toujours pas accepté l'échec de sa toute première affaire.
Macrae Burnet a remarquablement su créer l'ambiance oppressante d'une ville dans laquelle on a l'impression que rien ne se passe mais où l'inommable a déjà été commis et est tu. J'ai également apprécié la grande finesse d'analyse de l'âme humaine de l'auteur et ses description très cinématographiques des lieux dans lesquels se déroule l'intrigue et où le lecteur est transporté.
Bref, un polar écossais aux accents très français et à l'ambiance années 50 qui m'a séduite.
Ce roman noir est un hommage à Simenon et à Chabrol. J'ai adoré l’atmosphère de ce livre que l'auteur instille grâce à ses descriptions détaillées et très fines. Je m'imagine très bien cette petite ville de Saint-Louis, déserte et sombre et ses bouges un peu lugubres comme le Pot ou la Cloche. Un endroit où l'on n'aimerait pas s'arrêter tant cette ville semble inquiétante.
La psychologie des individus est très fouillée. J'ai beaucoup aimé le personnage très énigmatique et un peu inquiétant de Manfred Baumann. Un homme asocial qui a du mal à trouver sa place dans la société. Son isolement et son aversion pour les autres font de lui un coupable idéale dans la disparition de la jeune serveuse Adèle Bedeau. L'auteur alterne plusieurs périodes de la vie de cet homme afin que le lecteur saisisse sa personnalité. Le portrait de l'inspecteur Gorski est intéressant également. J'ai apprécié son coté humain et ses intuitions souvent très justes sur les personnes qu'il rencontre.
Le rythme de ce roman est plutôt lent. L'avancée de l'enquête n'est pas centrale. L'auteur a privilégié les descriptions et j'ai beaucoup apprécié l'ambiance du livre.
L'auteur arrive même à nous faire douter. Je me suis demandé jusqu'au bout si Manfred avait tué Adèle. La fin est assez inattendue et surprenante. Il faut se méfier des apparences et des préjugés.
J'ai eu beaucoup de plaisir à la lecture de « La disparition d'Adèle Bedeau » pour son style surprenant et son ambiance atypique.
Ce roman commence par une étrange préface, honorant lauteur oublié de ce roman remis au goût du jour par un film de Chabrol de 1989 (qu'on ne trouve pas dans sa filmographie !)
Ce roman ressemble à un roman policier des années 60, avec quelques intonations de Simenon, dans la façon de décrire longuement et précisément le personnage principal en lui tournant lentement autour, puis en divulgant brièvement certains faits majeurs de son passé, des fulgurances qui font fi de la chronologie ...
Manfred Baumann est un personnage terne, orphelin de ses deux parents, élevés par les aprents de sa mère, à Saint Louis, petite ville endormie frontalière de la Suisse et de l'Allemagne.
Il est devenu employé de banque, a ses habitudes au café restaurant La Cloche où il prend ses repas et occupe la place d'un mort aux parties de cartes du jeudi soir.
Il apprécie (de loin) la jolie serveuse, Adèle Bedeau, se surprenant même à la suivre certain soir et découvrant son jeune ami motorisé.
Lorsqu'Adèle disparaît, Baumann est déstabilisé ; l'inspecteur Gorski entre en scène et commence tisser sa toile autoutr de Baumann.
Un roman aux débuts un peu lents, puis son rythme s'accélère doucement, ...et il devient impossible de le poser.
J'ai effectué de nombreux déplacements professionnels à Saint Louis au début des années 80, et j'ai bien retrouvé dans ce roman l'atmosphère un peu empesée et vieillotte de cette ville à cette époque-là.
Un auteur que je découvre, et dont je vais m'empresser de rechercher les autres opus.
Brillant mais on ne le comprend vraiment qu'à la fin.
Commençons donc par le roman et nous reviendrons à la préface ultérieurement.
C'est l'histoire de la disparition d'une serveuse de restaurant, Adèle, dans la petite ville alsacienne de St Louis et du face à face de Manfred Baumann, directeur de la petite agence bancaire de la ville et Gorsky, le directeur de la police.
Manfred Baumann est un asocial qui a peur des femmes, du regard des autres, qui ne sait pas établir des relations normales avec ses congénères, même pas avec ses grands parents qui l'ont hébergé après la mort de ses parents. Tout changement l'angoisse alors il a établi des rituels dont il ne déroge pas : déjeuner tous les midis au restaurant de la Cloche, vin au verre, menu du jour, partie de cartes le jeudi soir. Et puis tout dérape, le jour où Adèle met une mini-jupe.
Gorsky, le policier hanté par une affaire de crime non élucidé à St Louis il y a vingt ans, a lui aussi des relations difficiles avec autrui : ses subordonnés à qui il n'ose rien dire, sa femme qui le rabaisse. Lui aussi a des rites comme boire un verre ou plusieurs à la fin du travail au bar le Pot avant de rentrer chez lui, se retrouver régulièrement sur les lieux du crime non élucidé.
Le rythme est lent mais permet d'installer une atmosphère lourde, pesante, dans une petite ville de province qui sue l'ennui, où chacun épie son voisin, où celui qui n'est pas comme les autres est le coupable idéal.
On a la sensation, recherchée par l'auteur, d'être dans un roman de George Simenon dans lequel la résolution d'un meurtre n'est que prétexte à camper des personnages et une ambiance. Pas d'hémoglobine, pas de « gore » mais une sourde angoisse qui s'installe car ces gens sont tellement ordinaires qu'ils pourraient être nos voisins.
On a également la sensation d'être dans un film de Chabrol avec l'inspecteur Lavardin et sa peinture d'une petite bourgeoisie étriquée qui cache bien ses secrets, ses mesquineries.
Retournons maintenant à la préface qu'il faut relire, une fois le livre terminé pour prendre conscience de l'art de l'auteur : il prétend que ce roman a été écrit en 1982 par Raymond Brunet (bel anagramme !), et il pousse le détail jusqu'à minimiser son rôle en signalant au lecteur que ce roman n'est qu'une nouvelle édition préparée par lui-même et sa traductrice. Il prétend que le roman aurait été mis en scène par Claude Chabrol en 1989 ; une citation attribuée à George Simenon clôt cette préface : « tout est vrai sans que rien ne soit exact ». le soi-disant auteur, Raymond Brunet, est un presqu'un double du personnage de Manfred Baumann et ils auront la même fin dramatique. Tout le roman est déjà dans la préface et ses références mais on ne le sait pas lorsqu'on commence le livre, cette préface a plutôt tendance à nous désorienter, ce qui est un état psychologique favorable pour lire ce policier atypique.
Je reste cependant frustrée par la disparition d'Adèle pour laquelle aucune explication ne sera donnée même si j'ai été happée par cette histoire et ses personnages baignant dans une atmosphère inquiétante de normalité provinciale.
La disparition de la jeune serveuse du restaurant La Cloche, Adèle Bedeau, nous entraîne sur les bords du Rhin, dans la petite ville d'Alsace de Saint-Louis.
Nous suivons, tout au long de ce roman, deux hommes, dont l'un, l'inspecteur de police Georges Gorski, paraît marcher dans les pas de l'autre, Manfred Baumann le directeur d'une petite banque, qu'il croise depuis 20 ans.
Dans un style littéraire et drôle, Graeme Macrae Burnet nous plonge dans la vie, d'apparence très banale, de nos deux personnages, enfermés dans un carcan d'habitudes qu'ils partagent avec les habitants de cette ville de province.
Les descriptions des lieux et des gens qui y vivent sont tellement imagées qu'on a la sensation de ne pas être seulement un spectateur mais de faire partie intégrante de l'histoire.
Un superbe roman, dans la digne tradition de Queneau, où sous une apparence de grande banalité, tout se joue sur la profondeur et les obsessions des personnages.
J'ai dévoré ce livre avec un plaisir jubilatoire tant il n'a cessé, jusqu'à la dernière page, de m'attacher et de me faire sourire. Son originalité et son ambiance théâtrale m'ont définitivement conquise.
Signée GMB (Graeme Macrae Burnet), la préface de La Disparition d’Adèle Bedeau donne de nécessaires précisions sur la biographie de Raymond Brunet, l’auteur quasi inconnu du roman policier que vous allez commencer. Personnage assez falot selon GMB, Brunet finira par se suicider en se jetant sous un train après avoir entrevu une manière de vivre autrement plus excitante que la sienne, et y avoir renoncé par devoir. Claude Chabrol adapte l’unique roman de cet auteur en film l’empêchant de sombrer dans un oubli total et permettant à cette « [n]ouvelle édition établie par Graeme Macrae Burnet et Julie Sibony » de voir le jour… Hum...
Quand on tape dans un moteur de recherche La Disparition d’Adèle Bedeau plus Chabrol, on tombe sur le site https://physicalimpossibility.com/2015/08/27/la-disparation-dadele-bedeau-claude-chabrol-1989/ qui propose une curieuse bande annonce du film de Chabrol inspiré du roman éponyme de Raymond Brunet, film qui n’a d’ailleurs eu le succès escompté… On y voit défiler certains des acteurs fétiches de Chabrol, entre autres Isabelle Huppert, Bernadette Lafont et Jean Poiret (dans le rôle de l’inspecteur Gorsky) ainsi qu’Isabelle Adjani ; on entend la trompette de Miles Davis, un phrasé reconnaissable entre tous, surtout quand il s’agit bizarrement de la bande-son d’Ascenseur pour l’échafaud… Malheureusement, ce film de Chabrol est introuvable, même sur la Toile. Hum...
En fait, Brunet, pardon, Burnet nous propose une très brillante variation sur fond de roman policier. La préface accentue l’effet de réel, installe une connivence avec le lecteur qui pourra établir des liens entre la vie de l’auteur et celle du personnage. Par ailleurs, on se croirait parfois dans un exercice de style « à la manière de » Georges Simenon dont Burnet est un éminent spécialiste : les descriptions minutieuses, l’économie d’adjectifs, l’immersion dans les pensées erratiques du personnage, la mise en valeur de ses contradictions, le sentiment du ridicule, le souci du regard des autres, autant de caractéristiques qui appartiennent plus aux personnages des romans dits psychologiques qu’à la série des Maigret. Simenon n’est pas le seul écrivain auquel Burnet rend hommage. Le déterminisme qui pousse les personnages de Zola à agir passionne le jeune Manfred jusque-là plutôt porté vers Camus, Sartre ou Hemingway : « Lui aussi était prisonnier des forces qui l’avaient façonné » pense-t-il de lui-même.
Le roman se construit sur l’alternance des points de vue des protagonistes : nous allons suivre tantôt Manfred Baumann tantôt l’inspecteur Gorsky, voir par leurs yeux et pénétrer dans leur tête. On aura la surprise de constater que, sous beaucoup d’aspects, ils se ressemblent… et que Manfred Baumann ressemble tant à son créateur Raymond Brunet que le destin de l’un peut passer pour une mise en abyme de celui de l’autre ! De fréquents retours en arrière éclairent en partie la paranoïa et les pratiques sexuelles du premier, ainsi que le manque d’assurance et le sentiment d’échec du deuxième : ces deux hommes estiment avec raison ne pas avoir choisi leur vie.
J’ai bien aimé ce roman et la qualité du jeu littéraire qu’il induit. Malgré leurs manques, leur lâcheté, leur tristesse, ou peut-être à cause de ces faiblesses, je me suis attachée à ces deux personnages carencés et profondément blessés. Baumann se trouve englué dans un véritable piège qu’il a lui-même posé. Gorski refuse d’évoluer et se cantonne dans les a priori qui le font douter de ses collègues : « Le Credo de Gorski était que le travail de la police était une affaire de routine, de suivi strict de la procédure, mais il craignait que son mépris pour les conjectures ne soit au fond qu’une façon de se protéger contre le fait qu’il ne se sentait pas capable d’une approche plus intuitive ».
Le décor des deux bars (chacun le sien !), La Cloche et Le Pot, ramène au cinéma de Chabrol et aux romans de Simenon, mais aussi, bien que le roman de déroule en France dans une petite ville frontalière (la Suisse est à côté), il m’emporte dans les tableaux de Hopper, ceux avec ces bars chichement éclairés où tout semble immobile, même le temps…
Mais savez-vous où a bien pu passer Adèle Bedeau ?
Merci au Grand Prix des lectrice de Elle et aux éditions Sonatine
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