Les Correspondances de Manosque sont lancées malgré les difficultés liées à la situation sanitaire, et ce n’est pas un mince exploit pour ce rendez-vous incontournable de la rentrée littéraire. Bien sûr, les discours inauguraux insistent sur l’importance des mesures en place et on ne peut qu’encourager tous les visiteurs à respecter ces protocoles, par solidarité d’abord, et ensuite dans l’espoir que cela permette à d’autres événements culturels d’exister à l’avenir.
Pour ouvrir ces Correspondances, un invité de marque : Enki Bilal, venu présenter son intrigant Nu avec Picasso, publié dans la collection « Ma nuit au musée » des Editions Stock.
Auteur de bande dessinée, peintre, réalisateur, Enki Bilal captive l’assistance manosquine par la richesse de son imaginaire mais aussi son franc-parler. Il nous raconte ainsi les coulisses de cette nuit au musée - sans alcool, regrette-t-il mi-frustré, mi-amusé – et explique avoir en réalité réinventé cette expérience a posteriori, au moment de l’écriture.
Il est donc à nouveau question de mémoire dans l’œuvre de Bilal : « dans mon album Bug, j’étais encore dans la thématique de la mémoire, mais sans m’en rendre compte : il a fallu qu’on me le dise » ! Cette fois-ci, l’artiste « s’invente » donc des souvenirs avec Picasso, « peintre si incontournable qu’on le connaît avant même d’avoir vu sa peinture ». Enki Bilal insiste sur le rôle qu’il attribue à la muse Dora Maar : « Elle a été l’œil de Picasso, j’en suis convaincu. Un artiste, seul, ne peut pas s’en sortir. »
Picasso est-il pourtant son peintre favori ? Si le dessinateur né à Belgrade l’admire, il aime par-dessus tout un autre maître espagnol, Goya, lui aussi convoqué dans son récit. Enki Bilal s’y délecte même de « l’odeur rance de l’huile de Goya », et ajoute au passage : « j'ai l'impression d'avoir une meilleure mémoire olfactive que visuelle. C'est mieux pour un artiste, cela laisse de la place à l'imaginaire ! »
Interrogé sur la science-fiction dont il semble provisoirement s’éloigner, Enki Bilal s’explique : « Avant, les gens disaient "la science-fiction, c'est ce qui ne peut pas arriver." Ils ne le disent plus car c'est arrivé ! J’ose affirmer qu’on y est, et c’est une façon de dire que désormais ça nous concerne tous. »
D’ailleurs, Bilal n’hésite pas à défendre avec passion cette SF qu’il a tant aimée et si magistralement illustrée : « Pourquoi la science-fiction est-elle méprisée ? On croit que c’est de l’imaginaire, enfantin, moins profond. C’est faux ! L’auto-fiction, ce serait plus fort ? Mais non, c’est de la paresse ! ».
Si Enki Bilal reconnaît qu’il y a un zeste de provocation dans sa formule, on retiendra avant tout qu’il défend ici plus que jamais un droit au rêve et à la création, lui qui conclura cette belle rencontre en revenant à son face-à-face nocturne avec Picasso : « Vous savez, en l’écrivant, j'ai fini par croire que j'avais vraiment vécu cette nuit… »
j'étais aux Correspondances et malgré le mistral et le virus, ce furent de bons moments, belles rencontres; souvent il fallait choisir entre trois rencontres: cruel!
Je ne connais pas ,très interessant le récit a de ouvrir
Bonjour . Merci beaucoup pour cette présentation de cette belle aventure littéraire et porteuse. Je ne connaissais pas ce récit qui semble des plus passionnants . Bon vent livresque à Manosque!!
Bonjour et merci. J'adore Enki Bilal!
Bonnes correspondances !
Un compte-rendu qui retrace parfaitement cette superbe rencontre avec Enki Bilal.
Magnifique et très complète présentation de la première soirée des Correspondances de Manosque 2020 !