C’est au tour de Benoît Duteurtre de nous ouvrir la porte de la matrice de son écriture. Si on ignore que cet écrivain est aussi musicien et critique musical, on passera à côté de ce qui compose son univers mélancolique et vagabond. Beckett, lui, ne s’y est pas trompé en lui mettant le pied à l’étrier. S’ensuivent 21 romans, dont un prix Médicis pour Le Voyage En France en 2001, et Livre pour adultes, son nouveau roman publié en septembre 2016 ; plusieurs nouvelles et recueils, et sept essais dont Pourquoi je préfère rester chez moi qui vient de sortir chez Fayard avec une couverture signée Sempé.
Vous êtes écrivain. A quand remonte votre première tentative d’écriture ?
Très jeune, j'ai eu le goût d'écrire et l'idée que ce serait le centre de ma vie. Plus précisément, vers 14/15 ans, je me suis jeté dans la poésie, après avoir découvert le surréalisme, et m'être persuadé qu'on pouvait improviser n'importe quoi sur la page blanche, librement et sans règle... Depuis, je ne me suis jamais arrêté, mais j'ai appris que les choses n'étaient pas si simples.
Comment pourriez-vous décrire la nécessité d’écrire qui vous anime ?
L'envie de faire partager mon regard sur l'existence, mes bonheurs, mes plaisirs, mes colères, mes enchantements. Mais aussi le désir d'inventer des histoires, d'imaginer, de construire des mondes, d'agencer des intrigues : tout ce qui fait la magie particulière du roman.
Un écrivain est d’abord un lecteur, dit l’adage. Le confirmez-vous ?
Pas sûr. On pourrait dire, inversement, qu'à certains moments, il faut choisir entre lire et écrire. Je connais beaucoup d'amoureux de la littérature qui rêvent d'écrire, mais sont comme paralysés par le poids de leurs lectures et de leurs admirations. On peut dire aussi qu'un écrivain lit ce qui lui est utile... et que tout ce qu'il lit devient utile à son propre travail...
Quels sont vos goûts littéraires ?
Je lis et relis souvent les écrivains que j'aime (Molière, Balzac, Aymé...) ; mais je passe aussi pas mal de temps, pour mon plaisir et pour les journaux où j'écris, à essayer de découvrir des auteurs. Notamment, parmi mes contemporains, ceux qui cultivent les qualités qui me sont les plus chères : fantaisie, imagination, humour, clarté du style. Car je trouve que le goût littéraire français, de nos jours, est souvent au contraire un peu trop narcissique, sérieux, autobiographique, sophistiqué !
Vous êtes juré du Prix Orange du Livre cette année. Comment décririez-vous l’expérience à ce stade des délibérations ?
Des moments très sympathiques, qui m'ont justement permis de comprendre un peu mieux le goût des uns et des autres, à travers ce mélange d'écrivains, de lecteurs, de libraires. L'accueil était parfait, et la présidence d'Orsenna des plus chaleureuses. J'en conserverai donc un excellent souvenir.
Propos recueillis par Karine Papillaud
Retrouvez également :
"Je dirais que j'écris pour des raisons liturgiques" Laurence Cossé
A la rencontre de Carole Martinez, auteur, jurée du Prix Orange du Livre 2017