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L'artiste, c'est Masugi Ono, vieux maître de l'art officiel nippon, narrateur de ce livre, et le monde flottant, c'est le quartier des plaisirs de la vie nocturne qu'il a beaucoup fréquenté au temps de sa jeunesse. Aujourd'hui, il tente de donner un sens à sa vie il dialogue avec ses contemporains, dans le Japon de l'immédiat après-guerre et interroge son passé. Grâce au ton insidieux et indéfinissable du narrateur, ce livre exerce un charme envoûtant sur le lecteur. Discret comme un film d'Ozu, ce roman ressemble à du Proust revu et corrigé par Kawabata, la modernité en plus.
Peintre reconnu et respecté avant et pendant la seconde guerre mondiale, Masugi Ono coule désormais une retraite qu'il espère paisible auprès de sa plus jeune fille Noriko. Cette dernière est sa seule source d'inquiétude. A 26 ans, elle n'est toujours pas mariée. Son dernier prétendant s'est désisté pour une raison obscure mais des négociations sont en cours avec une nouvelle famille. Se pourrait-il qu'il soit à l'origine des déconvenues de Noriko, comme le suggère son aînée Setsuko ? En visite chez son père, celle-ci a en effet glissé une petite phrase dans la conversation qui le fait réfléchir. Masugi Ono n'a pas honte de son passé mais les temps ont changé. Le Japon veut oublier les souffrances de la guerre et la honte de la capitulation pour se tourner vers l'avenir. Le bel élan patriotique, dont l'artiste s'était fait le chantre, n'a plus cours. Pour s'assurer que rien ne vienne contrarier les projets matrimoniaux de Noriko, le vieil homme va chercher le soutien d'anciennes connaissances, c'est l'occasion pour lui de se remémorer l'époque révolue où son nom, ses œuvres, ses idées avaient un certain poids, auprès de ses élèves comme des décideurs politiques.
A travers les souvenirs de Masugi Ono, Kazuo Ishiguro raconte le Japon de l'après-guerre, un pays en pleine mutation qui a abandonné l'impérialisme et l'expansionnisme pour se tourner vers une occidentalisation synonyme de progrès et de modernité. En déambulant dans sa ville, le peintre se souvient du quartier animé qu'il fréquentait en d'autres temps, le ''monde flottant'' où il avait sa place réservée aussi bien dans les bars que dans les maisons de plaisir. Les bombardements ont laissé des ruines fumantes, le progrès a rasé ce qu'il restait. Désormais les immeubles sont en passe de remplacer les maisons traditionnelles. Tout change, même les héros des enfants ne sont plus les samouraïs d'autrefois. En observant son petit-fils, Masugi voit un petit garçon plein de vie qui rêve de cow-boys, essaie de parler anglais, rejette inconsciemment tout ce qui faisait le monde de son grand-père. Pourtant, le vieil homme sait mieux que personne qu'il faut s'avoir s'affranchir du passé. Lui-même a mené sa carrière de peintre en ''trahissant'' ses anciens maîtres. Dans son jeune temps, il a refusé de continuer à peindre des geishas évanescentes pour préférer un art plus militant, plus moderne. A lui maintenant, de s'adapter à un Japon aux idées nouvelles, bien loin de l'idéal patriotique qu'il a tant vanté. Ceux qui ont partagé ses valeurs sont dorénavant mal vus, accusés d'avoir mené le pays à la guerre et à la ruine, d'avoir sacrifié la jeunesse sur l'autel des conquêtes guerrières, d'être responsables de la défaite...
Une évocation toute en délicatesse, comme une conversation avec un homme qui digresse, mêlant souvenirs et moments présents, qui aime aime divaguer dans le ''monde flottant'' de sa jeunesse. A déguster, pour le plaisir des mots et pour le voyage dans ce Japon à la croisée des chemins.
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