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Un an après son départ pour le Brésil, Serena, personnage emblématique de l'oeuvre de Ron Rash, revient dans les Great Smoky Mountains. Selon le contrat qui la lie à la compagnie de Brandonkamp, tous les arbres de la dernière parcelle qu'elle possède aux États-Unis doivent être abattus avant la fin de juillet. Il ne reste que trois jours. La pluie incessante qui fait de ce flanc de montagne un véritable bourbier, les serpents impitoyables, l'épuisement des bûcherons en sous-effectif rendent la tâche presque impossible. La «Lady Macbeth des Appalaches» sera-t-elle à la hauteur de sa sinistre réputation ?Autour de ce diamant noir, six nouvelles âpres mais traversées d'éclairs d'un humour parfois grinçant disent la vie rude et privée d'horizon des enfants oubliés de l'Amérique que sont les habitants de cette contrée.
Plus bas dans la vallée est la plus longue des sept nouvelles du livre de Ron Rash, c’est elle qui donne son titre à l’ouvrage, petit roman noir à elle seule.
Elle est la suite d’un précédent roman intitulé Serena que je regrette de ne pas avoir lu. J’aurais sans doute encore plus savouré ce dernier car il m’aurait permis de connaître encore davantage cette héroïne qui avait donné son nom au livre. Néanmoins, j’ai vite appris de quel bois elle était faite !
Nous sommes en 1931 et Serena Pemberton après être partie au Brésil est de retour en Caroline du Nord. Tout en étant séduisante et féminine, elle en impose par sa taille et surtout par sa dureté et son ambition sans limite.
Si cette femme intraitable est revenue, c’est pour superviser un gros chantier d’abattage d’arbres et il ne lui reste que trois jours pour tenir les délais du contrat signé avec la compagnie de Brandonkamp.
Les conditions de travail déjà effroyables, avec un flanc de montagne transformé en bourbier par la pluie, des serpents qui pullulent, des bûcherons en sous-effectif vont dès lors, pour assouvir les ambitions de Madame, se transformer en un véritable enfer dans lequel les hommes devenus esclaves, tenus à une cadence infernale, dans un espace hors du temps ne seront que des pions remplaçables à souhait.
Plus bas dans la vallée nous plonge à la fois dans un chaos de la nature et dans un chaos humain.
Chaos humain, notamment le dernier jour fixé par les délais. Des hommes privés de la notion du temps, des hommes jetés sur la route par la crise recrutés sans formation se meuvent dans le brouillard, tels des fantômes, en proie à tous les dangers et dominés et dirigés par un personnage implacable, incapable d’apitoiement. La description faite par Ron Rash est pour le moins apocalyptique.
Quant à la nature, elle est dévastée au mépris de toute loi. Nous assistons impuissants, avec horreur, à l’abattage de toutes ces essences et à chaque arbre abattu, notre cœur est révulsé. En italique, entre les chapitres, Ron Rash intercale de petits messages annonçant la fuite des quadrupèdes, puis des poissons, puis des oiseaux pour finir par les reptiles, des sortes de métaphores pour annoncer la destruction de notre planète, un thème on ne peut plus actuel.
Le titre complet de l’ouvrage est Plus bas dans la vallée & quelques courts récits des Appalaches. Six nouvelles suivent donc, toutes de genres différents, à des époques différentes. Elles racontent la difficulté, la rudesse de la vie et l’absence d’horizon des enfants oubliés de l’Amérique que sont les habitants de cette contrée.
Si la première, Les voisins se situe pendant la guerre de Sécession, Le baptême met en scène un révérend aux prises avec sa conscience et L’envol décrit la lutte pour se faire respecter entre une jeune stagiaire garde-forestière encore un peu fragile et un pêcheur grande-gueule.
Le dernier pont brûlé raconte l’histoire d’un homme libéré des affres de l’alcool qui donne sa chance à une paumée droguée.
Les deux dernières , Une sorte de miracle et Leurs yeux anciens et brillants sont celles que j’ai le plus appréciées, notamment avec cet humour noir déployé dans l’une avec ces deux frères indolents en partance pour une chasse à l’ours avec leur beau-frère et ce beau moment de surprise et d’émotion dans l’autre avec ce pied de nez final des anciens.
Ron Rash est passé maître dans l’art des nouvelles. En peu de pages, il parvient à mettre en situation ses personnages, à développer leur psychologie et à construire une intrigue souvent pleine de suspense, dans un environnement où la nature occupe une grande place, tout en assurant à chaque fois une chute mémorable.
Comme dans Par le vent pleuré et Un silence brutal que j’avais eu le plaisir de lire, je me suis une nouvelle fois régalée à la lecture de Plus bas dans la vallée.
Ron Rash, ce chantre des Appalaches plein de compassion pour les âmes meurtries, excelle encore une fois à explorer l’âme humaine et met l’accent ici sur les ravages et les conséquences engendrées par la déforestation tout en nous faisant réfléchir sur l’insignifiance de la vie humaine.
Chronique illustrée à retrouver sur https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2023/04/ron-rash-plus-bas-dans-la-vallee.html
S'il y a un auteur dont je ne raterais à aucun prix les publications, c'est Ron Rash ! Et comme les bibliothèques n'oublient pas non plus de se procurer ses livres, je n'ai jamais trop longtemps à attendre. Cette fois, j'ai eu le plaisir de retrouver Serena, le personnage du roman du même nom lu il y a une dizaine d'années en version originale. Enfin, un plaisir tout relatif, car jamais, au grand jamais, je n'aurais envie de rencontrer réellement Serena.
Elle est revenue du Brésil pour exploiter les parcelles de forêt qui lui restent, et elle soumet les bûcherons à un rythme de travail effréné pour terminer la coupe avant la date-butoir d'un contrat qu'elle a passé. En une centaine de pages, les points de vue varient autour de plusieurs personnages, certains connaissant déjà Serena, d'autres la découvrant. La conclusion inattendue de cette nouvelle m'a ravie, ainsi que les ambiances pleines de tension dramatique, et la description toujours juste des personnages, des paysages, de la forêt martyrisée…
Dans les autres nouvelles, les atmosphères rudes du coeur des Appalaches restent noires, mais l'humour est bien présent aussi. Une sorte de miracle m'a évoqué les films des frères Coen, avec des personnages vraiment réjouissants ! Les autres textes, où les époques et les protagonistes sont des plus divers, ne m'ont pas déçue non plus. On y retrouve toujours l'empathie de Ron Rash, et une noirceur jamais gratuite.
Amateurs de nouvelles noires, à vos carnets !
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