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Dehors, le bruit des tirs s'intensifie. Rassemblés dans la cour de l'école, les élèves attendent en larmes l'arrivée de leurs parents. La jeune narratrice de ce saisissant premier chapitre ne pleure pas, elle se réjouit de retrouver avant l'heure « son géant ». La main accrochée à l'un de ses grands doigts, elle est certaine de traverser sans crainte le chaos.
Ne pas se plaindre, cacher sa peur, se taire, quitter à la hâte un appartement pour un autre tout aussi provisoire, l'enfant née à Beyrouth pendant la guerre civile s'y est tôt habituée.
Son père, dont la voix alterne avec la sienne, sait combien, dans cette ville détruite, son pouvoir n'a rien de démesuré. Même s'il essaie de donner le change avec ses blagues et des paradis de verdure tant bien que mal réinventés à chaque déménagement, cet intellectuel - qui a le tort de n'être d'aucune faction ni d'aucun parti - n'a à offrir que son angoisse, sa lucidité et son silence.
L'année des douze ans de sa fille, la famille s'exile sans lui à Paris. Collégienne brillante, jeune femme en rupture de ban, mère à son tour, elle non plus ne se sentira jamais d'aucun groupe, et continuera de se réfugier auprès des arbres, des fleurs et de ses chères adventices, ces mauvaises herbes qu'elle se garde bien d'arracher.
De sa bataille permanente avec la mémoire d'une enfance en ruine, l'auteure de ce beau premier roman rend un compte précis et bouleversant. Ici, la tendresse dit son nom dans une main que l'on serre ou dans un effluve de jasmin, comme autant de petites victoires quotidiennes sur un corps colonisé par le passé.
Pour son premier roman, Dima Abdallah nous emmène à Beyrouth, au Liban, le pays où elle est née en 1977.
Si, Mauvaises herbes est un roman, il est clair que l’auteure qui vit à Paris depuis 1989 a mis beaucoup d’elle-même dans celui-ci.
Nous voici donc à Beyrouth en 1983, pendant la guerre civile, avec une enfant de six ans que son père vient chercher à l’école car les bombardements ont repris. Sitôt là, elle s’accroche fermement au doigt de son géant de père qui l’escorte vers la sortie pour atteindre la voiture et rentrer à l’appartement. Elle nous fait part de ses sentiments vis-à vis de ce père qu’elle vénère et qu’elle observe intensément pour faire abstraction du décor et être seule avec lui : « la terre est dépeuplée de tout le reste ». Elle a une confiance absolue en lui, il est la personne la plus forte qu’elle connaisse, même si, une fois, un soldat l’a frappé et l’a fait saigner, qu’il ne s’est pas défendu, mais c’est donc que les soldats sont vraiment très dangereux.
À son tour, le père évoque son amour pour la fillette, vérifiant encore et encore que sa petite main douce et chaude se cramponne bien à son doigt. Cette main, il en connaît chaque détail et dit « Je crois qu’elle sait que j’ai autant besoin de sa main qu’elle a besoin de la mienne ».
Ces premiers chapitres peignent une relation père-fille magnifique, une relation étroite où les mots sont quasi inutiles tant la compréhension mutuelle est évidente.
Il faut dire que tous deux sont sur la même longueur d’ondes. Elle est très intelligente, comprend très vite, à la différence des autres écoliers, qu’il est inutile de pleurer lors des détonations et qu’il vaut mieux en attendant les parents, cacher sa peur et être forte, elle s’entraîne d’ailleurs pour que les larmes ne montent pas. Incomprise donc par ses camarades d’école comme par les enseignants. Elle a la hantise d’être abordée par d’autres enfants, ceux-ci lui demandant toujours sa confession avant son nom. N’étant ni chrétienne, ni musulmane, n’appartenant à aucun groupe, elle ne sait que répondre. L’isolement est sa seule façon d’être au monde.
Son père, quant à lui, journaliste, est poète. Cet intellectuel libre et indépendant qui n’appartient à aucune faction , aucune confession se trouve étranger parmi les siens.
Cette différence que tous les deux partagent se révèle extrêmement difficile à vivre… Les plantes que le père achète, qu’ils arrosent ensemble sont un lien qui les unit et un moyen de communication qui se maintiendra toute leur vie, même une fois séparés.
Lors de leurs incessants déménagements, les plantes, les fleurs, les arbres seront toujours leur refuge. Et si elle s’est toujours intéressée aux adventices, ces mauvaises herbes, « ces hôtes de lieux incongrus, ces hôtes que personne n’a invités, que personne n’a voulus, qui dérangent mais s’en moquent bien et n’en finissent pas de pousser », c’est bien parce qu’elle s’identifie à elles.
En 1989, à l’âge de douze ans, elle connaîtra l’exil à Paris avec sa mère et son petit frère, le père restant au Liban. Pour elle, ce sera une double déchirure, la perte de son père et de sa patrie.
Mauvaises herbes est un livre douloureux et bouleversant, une histoire d’amour et de souffrance.
Beaucoup de poésie traverse ce roman avec en apogée ces mains qui sont tout un symbole et qui évoquent l’immense tendresse partagée par cette fille et son père.
Dima Abdallah montre combien il est difficile de trouver sa place dans un monde standardisé où il est particulièrement difficile de vivre si l’on ne se coule pas dans le moule et comment alors on doit vivre un véritable exil intérieur.
J’ai savouré l’écriture de Dima Abdallah et particulièrement apprécié la manière dont la jeune adolescente décrit son départ de Beyrouth en taxi, pour l’aéroport. Pour recenser tout ce qu’elle quitte et qu’intérieurement elle se refuse à quitter, elle emploie la forme négative. Une douloureuse énumération de ce qu’elle ne veut pas voir, de ce qu’elle ne veut pas ressentir, de ce qu’elle ne veut pas imaginer donne alors une puissance évocatrice immensément forte et bouleversante.
Un roman prégnant dans lequel l’amour, la peur, l’angoisse, la solitude, la marginalité, les regrets, le déracinement sont fort bien évoqués.
Je me suis néanmoins légèrement enlisée vers la fin, trouvant redondants les derniers chapitres.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Le sujet central de ce livre est la relation père/fille.
C’est une sorte d’huis-clos, les chapitres alternent la voix du père et celle de la fille. Nous sommes en pleine guerre civile au Liban où le père se sent étranger dans son pays car n’appartenant à aucun parti.
Le lien père/fille est très fort mais il y a un grand mutisme de la part de la fille face à son mal-être et à sa souffrance car elle sent qu’elle ne doit pas en parler afin de protéger son père dont elle devine la grande vulnérabilité.
Leur terrain commun est les plantes, et les mauvaises herbes qui sont des étrangères parmi elles, tout comme l’est son père dans son pays.
Ce livre, d’une écriture délicate, nous fait alternativement partager les pensées du père et de la fille avec leur souffrance, leur mal-être, les regrets et leur impossibilité à communiquer. Tout est dans le non-dit de chacun, mais ce non-dit est malgré tout entendu par l’autre.
Je recommande ce livre, bouleversant de souffrance et d’espérance, dont le thème de l
Ces Mauvaises herbes poussent n’importe où, aux endroits les plus improbables et peuvent donner ensuite, malgré tout, de belles plantes. Pour la principale narratrice de ce premier roman de Dima Abdallah, ce qui ressort d’emblée, c’est le terrible traumatisme de l’enfance, dans Beyrouth, en 1983, alors que la guerre civile fait des ravages.
Là, il faut choisir sa confession, choisir son camp, sa faction et la petite fille de six ans que son père, son géant, va chercher à l’école, refuse de choisir. Elle prie son Dieu à elle, pas celui des autres qu’elle n’aime pas trop. Elle s’accroche à l’index ou à l’auriculaire de ce père qu’elle admire. Elle est solitaire, parle peu, se fait punir à l’école et elle sent que les maîtresses ne l’aiment pas.
Jusqu’à l’âge de onze ans, la vie de la narratrice se déroule donc dans la capitale d’un Liban déchiré et c’est la partie que j’ai trouvée la plus intéressante. Dima Adballah est née là-bas et connaît donc bien son sujet, comme elle l’avait expliqué lorsque nous l’avions rencontrée lors des Correspondances de Manosque 2020.
Petit à petit, la narratrice parle des plantes, du potager de sa grand-mère puis de celles qui poussent sur leur petit balcon : jasmin, thym, romarin, eucalyptus, origan, marjolaine… Cela devient un vrai leitmotiv. C’est beau mais un peu lassant. Par contre, l’autrice me gratifie régulièrement de savoureuses réflexions, surtout pendant l’enfance de sa narratrice.
Ce n’est que trois ans plus tard, en 1986, toujours à Beyrouth, que le père, journaliste, écrivain et poète, prend la parole. Il avoue ses faiblesses, raconte la terrible crise d’asthme de sa fille et les urgences de l’hôpital où il a fallu la conduire en catastrophe. C’est là que commence à ressortir une incommunicabilité, une absence terrible de mots entre eux deux, un problème qui va grandissant alors qu’ils ont quantité de points communs.
C’est lui qui pousse sa femme dont on parle vraiment très peu, à partir, avec leur fille et son petit frère. Nous sommes en 1989 et c’est à Paris qu’ils se retrouvent tous les trois dans le studio qu’habite une tante.
Le père fera plusieurs voyages mais sans rester. Sa fille retrouvera Beyrouth avec son frère, dix ans plus tard, pour trois semaines, mais 33 degrés Celsius et 73 % d’humidité lui causeront une nouvelle terrible crise d’asthme.
Les années passent. À 18 ans, elle quitte le lycée, part en Espagne, au Portugal, ne donne plus de nouvelles et révèle un mal-être grandissant. Il faudra des années pour que tout s’apaise et c’est là le thème principal du livre, cette perpétuelle introspection, faite de nombreuses redites, d’une souffrance morale et physique, ce que j’ai trouvé un peu pénible.
Les mauvaises herbes, les souvenirs qui ressortent à n’importe quel moment, la solitude de cette femme déracinée qui s’aperçoit qu’elle oublie l’arabe, sa langue maternelle, tout cela est détaillé, dit et redit.
Dima Abdallah, avec Mauvaises herbes, néglige assez le récit factuel, se contente de suggérer par petites touches, préférant écrire des pages magnifiques sur le rôle des plantes et les tourments moraux et physiques de son héroïne.
Mauvaises herbes est un beau premier roman qui comporte sûrement une part d’autobiographie. Il démontre toutes les souffrances d’une enfant traumatisée par la guerre civile et les dégâts causés par le déracinement, dégâts qui mettent très longtemps à se résorber.
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un certain mal être s'empare du lecteur en lisant cette alternance de deux voix: celle d'un père et celle sa fille qui rentrent de l'école à Beyrouth sous les alertes à la bombe Ils jouent tout au long du livre à"aller bien" alors que peu à peu les traumatismes les anéantissent. Dur, noir et ,pour ma part ,une certaine difficulté à savoir qui parle ;les souvenirs du passé se mêlant aux angoisses du quotidien .Un livre marquant ,exceptionnel!!!!
Ce premier roman nous plonge dans le quotidien d’une famille à Beyrouth en 1983, donc au Liban en pleine guerre civile.
Le chapitres alternent entre la voix de l’enfant puis la voix de l’adulte. Chacun apporte son point de vue, ses sentiments, la façon dont il vit tout cela.
C’est un récit poignant, vu avec les yeux d’une enfant de 8 ans. Elle va avec la peur au ventre à l’école. Elle espère qu’on ne lui pose pas la question incontournable à laquelle elle ne sait répondre : de quelle confession est-elle ? chrétienne ou musulmane ? Elle n’est ni l’une, ni l’autre. Ses parents ne croient pas en Dieu. La famille de sa mère est un peu chrétienne et celle de son père un peu musulmane.
Selon la situation, sa mère montre ses papiers chrétiens ou musulmans. Elle est journaliste et professeure de français. Elle rentre souvent tard. C’est donc son père, écrivain, qui s’occupe d’elle et de son petit frère.
Elle essaie d’écrire des poèmes comme son père. Elle aime arroser les plantes sur le balcon avec lui. C’est son modèle, « son géant ».
« La poésie c’est peut-être ce qu’on écrit quand on n’arrive pas à pleurer comme les autres. »
Elle est différente des autres enfants. Elle est sensible. Elle a du mal à s’adapter à l’école dont elle ne comprend pas les règles. « Je suis un cube qu’on essaye de faire entrer dans le monde rond du matin au soir. »
Et un soir, elle n’arrive plus à effacer, oublier les moments difficiles de sa vie, la peur des bombes, des contrôles, les valises prêtes pour fuir à tout moment. C’est sa première crise d’angoisse. Son père impuissant, ne sait comment la rassurer. « J’aurais voulu être fort, et être fort, ici, c’est tuer, c’est torturer. »
Trois ans plus tard, elle part pour Paris avec sa mère et son frère, laissant son père au Liban.
Elle raconte alors sa vie à Paris, les choses qu’elle aime bien comme la bibliothèque de la rue Mouffetard où elle passe la majeure partie de son temps à lire des BD et des romans.
Peu à peu elle oublie les mots arabes et ne parle plus qu’en français, elle perd son identité. On la voit ainsi grandir, abandonner l’école, partir pour se perdre alors que les crises d’angoisses sont toujours présentes.
Père et fille n’arrivent pas à se parler, ils s’écrivent. Il boit beaucoup. On assiste à sa lente chute.
Un texte délicat, plein de grâce et de poésie, bouleversant.
Elle a reçu le prix « envoyé par la Poste » 2020.
C’est un livre à deux voix celle d’une jeune fille et son père, entre un journal intime et un roman épistolaire. Les mots valsent entre ce père, journaliste et écrivain, qui exprime ses tourments à tenter de protéger sa fille, et cette dernière qui résiste, ne pleure pas malgré les explosions, les corps déchiquetés ... et qui lui écrit des poèmes « La poésie, c’est peut être ce qu’on écrit quand on n’arrive pas à pleurer comme les autres ».
Elle est née à Beyrouth pendant la guerre civile et a appris à ne rien montrer de ses peurs, plongeant dans le regard de ce père, ce géant, lui tendant la main comme on s’accroche à un fil pour ne pas sombrer. Elle qui craint les fantômes plus que bombes, grandit au milieu de la désolation et trouve refuge dans les plantes, y compris (et surtout) les mauvaises herbes « celles qui poussent au mauvais endroit au mauvais moment, mais qui prolifèrent ailleurs […], qui s’acharnent à vivre dans les milieux les plus hostiles ». Car il faut vivre malgré tout et ne pas montrer sa peur.
Quand le départ s’impose, le déracinement va lentement immiscer son poison dans les veines et surtout le cœur de cette jeune femme, ce cœur qui garde tout, trop, qui gonfle et finit par devenir incontrôlable. Enfant, habituée pendant des années à déménager, à n’emporter que l’essentiel dans un sac à dos bleu, devenue adolescente puis adulte, elle est perdue devant ces objets, ces souvenirs qui s’accumulent et dont elle ne sait quoi faire.
Très beau premier roman sur la relation forte mais silencieuse entre un père et sa fille, séparés à cause d’une guerre civile qui dévisagea leur pays, sur l’arrachement à une terre (même sous les bombes) et sur le comment on se (re)construit malgré tout.
L’écriture est à la fois forte, poétique et d’une sincérité qui m’a profondément touchée.
Une dernière citation de cette auteure pour illustrer cette difficulté à vivre l’exil « De ce quartier peut-être, où on n’est pas seuls à être de nulle part. De ce quartier où, vu qu’on est nombreux à être un peu d’ici, un peu de là-bas, un peu de bientôt ailleurs, on en fait un petit pays, un endroit où l’on se ressemble et qui finit par nous ressembler ».
Premier roman de cette auteure libanaise qui, comme son géant de papa, écrit pour mieux se relever. Puissant et bouleversant !
Un premier roman très touchant.
Lu dans le cadre du Prix des lecteurs pour les Escales du Livre 2021 de Bordeaux.
L'oubli ou la persistance des souvenirs pour rester debout et affronter l'avenir : que faire, effacer, se souvenir, oublier, avoir des habitudes de "petit vieux" ou avoir l'esprit nomade et ne s'attacher à rien, à seulement aux quatre membres de la famille. Voici le dilemme des deux personnages principaux de ce récit.
Une enfance dans un pays en guerre, la narratrice, petite fille, jeune adolescente, jeune femme, mère nous raconte son enfance, ses silences, la gestion personnelle de sa "boule au ventre", de ses crises d'angoisse, ses façons personnelles d'affronter la peur, les fantômes, les autres, enfants ou adultes. Avec beaucoup de délicatesse, de poésie, elle raconte l'enfance et le rôle de ce père, ce géant qui vient la chercher à l'école et à qui sa petite main s'accroche pour aller se réfugier à la maison avec sa mère et son jeune frère, ses bouderies quand l'ascenseur ne fonctionne pas à cause des coupures incessantes d'électricité et qu'elle préfère rester sur la marche de l'entrée, les "leçons" de son père qui lui parle des plantes en pot sur les balcons des différentes maisons qu'ils occupent. Sa vie d'adolescente, dans un Paris apaisé, sa vie de jeune femme et de mère.
Puis en écho la voix du père, ce père qui ne se sent pas du tout un chevalier avec sa jeune enfant, qui doute de ses capacités de père, de son rapport à la guerre et de son incapacité de prendre partie pour l'un ou l'autre camps de cette guerre civile, il préfère s'installer le matin sur la terrasse, une tasse à café, une cigarette et des feuilles blanches pour écrire.. Il est assez taiseux et restera seul quand la famille décidera de s'installer à Paris.
De belles pages avec une écriture très imagée, on se retrouve sur les terrasses des cafés du Jardin du Luxembourg ou du Jardin des Pantes, sous le banc fantôme du cerisier japonais ou dans un simple café en bord de mer à Beyrouth.
Un beau portrait de fille et de père, de l'exil, de la vie sous les bombes. Un récit aussi sur Beyrouth et ses guerres civiles et son actualité.
Comment survivre avec ses peurs, ses doutes, ses questionnements, cette boule au ventre. Avoir l'impression que ses souvenirs, ses images sont un tonneau à la Sisyphe, qu'il faut perpétuellement remonter cette montagne.
Un premier roman très touchant, et le souvenir de belles pages sur de simples plantes, et pas que des mauvaises herbes.
…/…
J'ai aimé ce récit d'un attachement à la fois merveilleux et destructeur, d'un déracinement quel que soit le lieu où on habite. On connaît cette fidélité aux parents, à la famille dans laquelle on grandit, même si cet attachement est toxique. La plume de Dima Abdallah est douce et poétique. Elle traduit aussi la violence de la guerre et des drames qui se jouent dans les cœurs et les corps de la fillette et de son père. J'ai été touchée par la perception de cette angoisse et de cette inadaptation au monde et de la manière dont cela se traduit dans les corps et les comportements. Comment ils tentent de faire bonne figure et de continuer à vivre. Le lecteur suit leurs évolutions au cours d'une quarantaine d'années, de 1983 à 2019, les descentes aux enfers et les sursauts. L'incapacité du père à "se faire violence", selon la formule populaire, pour dépasser ses angoisses et être présent pour sa famille. Comment, d'ailleurs, "se faire violence" quand toute sa vie n'a été que violence et terreurs ? Le père, puis sa fille plus tard, écrit, noircit les pages les unes après les autres. Je me suis souvent demandée d'ailleurs pourquoi ces deux-là ne s'écrivaient pas. Pourquoi ils n'avaient pas alimenté une correspondance par delà la Méditerranée, pour s'écrire ce qu'ils étaient incapables de se dire. Cela m'a semblé tellement dommage.
…/…
Un premier roman riche, sensible et violent à la fois, touchant et poétique. Une nouvelle auteure à suivre très certainement.
https://itzamna-librairie.blogspot.com/2020/12/mauvaises-herbes-dima-abdallah.html
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