Des conseils de lecture qui sentent la fin de l'été... et la rentrée littéraire !
Ça l'a surpris tout gosse, ce virage du hasard ; rien ne le prédestinait à devenir champion. Repéré à douze ans pour son talent au triple saut, Victor quitte sa petite ville, son père ouvrier, leur duo-bulle. L'aventure commence : entraînements extrêmes, premières médailles, demain devenir pro, pourquoi pas les JO ? Victor court, saute, vole. Une année après l'autre, un sacrifice après l'autre. Car dans cette arène, s'élever vers l'idéal peut aussi prendre au piège.
Des conseils de lecture qui sentent la fin de l'été... et la rentrée littéraire !
Arnaud Dudek a trouvé le ton juste pour disséquer la passion dévorante d'un jeune homme confronté à la pression du haut niveau. Victor a une révélation à douze ans en observant à la dérobée un athlète s'entraînant dans un parc. Puis en regardant à la télévision un sauteur cubain s'envoler lors d'un concours de saut. Il fera de l'athlétisme, puis se spécialisera dans le triple saut, avec une rigoureuse dévotion. Une quasi religion exigeant des sacrifices, mais jusqu'où ?
Si les personnages secondaires sont quelque peu convenus ( le papa solo ouvrier alcoolique, la maman abandonnante qui n'a jamais essayé d'être maman, le meilleur ami cool et friqué, la petite amie patiente mais dépassée ) et peu approfondis, celui de Victor est réellement attachant. On le suit dans son parcours sportif jusqu'à sa chute, au plus près de ses émotions et ressentis, cherchant à échapper à un quotidien triste et un avenir platement tracé.
« Il y a toujours une bonne raison de se faire mal, pense Victor en se massant les poignets. Pour braver le grand ventre du néant. Pour oublier les rires sales qui ont planté leurs crocs dans nos muscles. Pour défier les peurs qui grignotent nos nuits. Pour cela à la fois et pour tout le reste. Les premiers tours de piste l'ont plongé dans un sentiment de profond décentrage, mais il est parvenu à s'ajuster à son corps, à s'y réinstaller, à coïncider à nouveau avec sa chair. Il se sent mieux, à présent. Presque bien. »
Le lecteur est en totale empathie avec ce jeune triple sauteur doué, broyé par le harcèlement moral d'un coach maltraitant, thématique de moins en moins tabou depuis que des sportifs de la vie réelle ont osé briser la loi du silence et dénonçant des pratiques scandaleuses. Même un lecteur peu féru de sport trouvera une résonance à la question universelle de la confrontation idéaux / réalité, tant l'auteur décrit parfaitement les coulisses du sport entre blessures physiques morales et blessures physiques.
Arnaud Dudek va à l'essentiel. La construction narrative épouse pertinemment les différentes étapes techniques du triple saut : « course d'élan », « premier saut », « deuxième saut », « troisième saut », « suspension » et « réception ». Si les quatre premières parties sont assez attendues dans leur déroulé du parcours de Victor, la dernière, la plus courte, surprend, touche par sa lumineuse épure qui met en valeur la prose précise et sensible, une très belle façon de conclure ce roman initiatique construit dans la douleur de l'effort et du sacrifice.
C'est l'histoire de Victor, un garçonnet discret et attendrissant, un enfant un peu gauche et timide qui vit seul avec son père, ouvrier en usine, depuis le départ de la mère du foyer. Une vie de peu, simple et austère, banale. Mais quand par un enchaînement de hasard Victor découvre le triple saut c'est une révélation. C'est ce qu'il veut faire et c'est dans cette discipline qu'il veut briller et être le meilleur. À force de détermination et de ténacité, du club de sa ville à l'institut de sport-études, il brûle les étapes, démontre des prédispositions incroyables jusqu'à être repéré par un entraîneur à la réputation sulfureuse capable de lui ouvrir les portes de son rêve.
Autant aller droit au but, j'ai adoré ce livre. Encore une fois les Avrils me surprennent avec un roman sublime et me font découvrir un auteur à la plume parfaite. C'est un roman plein de finesse qui nous conte le parcours exigeant d'un adolescent ivre de rêve. Avec juste ce qu'il faut de mots l'auteur dit les heures et les heures d'entraînement, les brimades, les espoirs, les succès et les échecs qu'il faut traverser pour arriver au plus haut niveau. Les efforts, les renoncements, l'abnégation et les blessures dans ce sport difficile et méconnu, parent pauvre de l'athlétisme, quasi invisible derrière l'aura écrasante du 100 mètres et de ses stars ultra médiatisées .
Mais c'est aussi un portrait plein de sensibilité, tout en pudeur d'un jeune malmené par la vie pour qui l'ascenseur social passera par la réussite sportive. Un garçon solide et fragile à la fois, avec autant de forces que de fêlures, un garçon « qui se croyait roc et qui était argile, qui se pensait insubmersible, mais qui réalisait que les digues pouvaient rompre à tout moment ». Un enfant solitaire et mésaimé enfin, orphelin de mère à mi-temps, broyé par des exigences sportives démesurées, que le manque tant matériel qu'affectif fragilisera jusqu'à altérer son « coeur arrière », « pas le coeur qui bat, l'autre, derrière, celui qui se serre quand on perd ».
Pendant ma lecture j'ai pensé à « ne t'arrête pas de courir » de Mathieu Palain qui lui aussi décrivait les rudes exigences de l'athlétisme, j'ai pensé à « ce qu'il faut de nuit » de Laurent Petitmangin qui avait pour point commun une peinture sociale tendre et pudique et un attachant duo père fils, mais ce roman est finalement bien singulier et il est réducteur de s'arrêter à une comparaison. Belle découverte d'un auteur à l'écriture juste et poignante. Une pépite à ne pas manquer!
Un gamin issu d'un mileu modeste , délaissé par sa mère, élevé par un père ouvrier qui fait ce qu'il peut, découvre l'athlétisme par hasard et décide d'en faire son avenir. De repérage en centre de formation privé, on suit ce jeune garçon, entre réussite, pression et déception. Un très bon roman. Simple et clair.
La passion d'une vie : le triple saut. Ou comment un centre de formation de sportifs de haut niveau peut conduire un gamin doué à une perte totale de repère dans la vraie vie si les bases familiales ne sont pas d'une solidité à toutes épreuves. Un livre remuant qui me pose question sur les motivations et les dérives possibles de coaches à l'ego démesuré. Le sport oui mais jusqu'à quel point? Encore un très bon livre choc des éditions Avril!
Prendre un chemin plutôt qu'un autre et voir où cela nous mène...
C'est ce qu'il se passe pour Victor le jour où son père décide de ne pas prendre le chemin habituel pour rentrer de l'école, et de passer par le parc. Victor découvre alors l'athlétisme par le biais d'un homme qui s'entraîne comme n'importe qui le ferait lors de son temps libre. Il se dit que" cela doit être extraordinaire de courir, puis de s'élever ainsi. On doit se prendre pour le fils du vent." Son père, qui l'élève seul et travaille à l'usine, se saigne alors pour l'inscrire au club d'athlétisme de la ville. Victor ne vivra alors plus que pour cela. On le suit années après années, à travers ses entraînements, avec ses différents entraîneurs, dans différents lieux, car le triple saut, pour Victor, c'est comme une drogue, un moment de bonheur et beaucoup de souffrances, qu'elles soient physiques ou morales.
Ce roman m'a passionnée! Moi qui ne suis pas vraiment intéressée par l'athlétisme, je ne verrai plus jamais ce sport de la même façon, et encore moins les athlètes, tous sports confondus.
A travers la plume de l'auteur, sèche et directe, nous suivons l'évolution de Victor, de jeune garçon à jeune homme, à travers son sport, la relation qu'il a avec son père et celle qu'il n'a pas avec sa mère, ses amis, son premier amour. On souffre avec lui, on jubile aussi, lorsqu'il se surpasse.
Le style est vif et percutant pour parler de dépassement et de l'estime de soi, d'amour filial, de premier amour et d'amitié, mais aussi de la réalité économique et du rendement qui se trouve derrière tout sport de haut niveau.
Le choix du titre est éclairé par un passage qui m'a bouleversée...
Ce livre est un coup de cœur! Lisez-le, vraiment!
Souvent lorsque je lis les commentaires moqueurs ou haineux des soi-disant supporters ou plus justement spectateurs de manifestations sportives, mon premier réflexe est de me dire que ces gens ne savent pas ce que signifie vraiment la construction d'un parcours sportif. L'effort et surtout le renoncement. L'engagement total, parfois très jeune l'éloignement de sa famille. Et les aléas, le corps qui lâche, le pépin physique qui gâche tout. C'est un mélange inouï d'infinie douleur et d'immenses joies. A l'origine il y a une passion mais ensuite. Ensuite il y a la vie et ça, personne n'est capable de la prédire.
Voilà sur quoi est bâti le roman d'Arnaud Dudek qui s'empare du destin de Victor avec une infinie délicatesse, une attention de tous les instants. Le sport de Victor c'est le triple-saut. Méconnue, pas la plus noble des disciplines de l'athlétisme, complexe, mais Victor l'a d'abord aimée du regard avant de s'y essayer et de s'y révéler habile. Son père a consenti l'effort financier d'une inscription au club et au fil des mois, les espoirs s'affirment, Victor pourrait bien aller loin. Des concours, le repérage, le sport-études et l'entraîneur réputé, exigeant mais il faut ce qu'il faut. De ceux qui pensent "qu'une graine de champion n'a pas besoin de bonheur pour pousser, juste de l'effort, rien que de l'effort, toujours de l'effort, et puis de la violence aussi". Tant pis pour l'adolescence et ses explorations, les émois amoureux, les sorties avec les copains. Victor s'y plie parce que le sautoir est l'endroit où il se sent bien, la performance est sa récompense autant que le regard satisfait de son entraîneur. Pourtant, un autre regard l'émeut, celui de la belle Calypso. Et si le maître mot du triple-saut est l'équilibre, il ne faudrait pas oublier de l'étendre à l'ensemble des spectres de la vie du champion en herbe. Au risque d'aller dans le mur.
A travers cette histoire et ce personnage si touchant, Arnaud Dudek ausculte la réalité du sportif ordinaire, loin des stars qui cachent la forêt. Il touche à la pureté de la passion, à une forme de joie brute face à la perfection du geste accompli. Alors qu'autour s'agitent les éléments aptes à pervertir cette pureté : la férocité du milieu, les fausses promesses, l'emprise, les envies de gloire, l'appât du gain. La complexité de la vie. L'équilibre est précaire, et c'est sur ce fil ténu que l'auteur tient son lecteur aux côtés de Victor, attentif à la moindre variation de ses sentiments.
Un roman délicat, aussi fragile qu'un bref instant de plénitude au moment de l'exploit.
(chronique publiée sur mon blog : motspourmots.fr)
Ce roman n’a rien d’une biographie soporifique d’un Zinedine Zidane, il met en avant la vie et la qualité du sportif, à travers son personnage principal, et sa capacité à rebondir (je ne pouvais pas passer à côté de ce jeu de mots de qualité…) après les échecs, les blessures, et la maltraitance du système. Arnaud Dudek a déjà quelques titres derrière lui, mais c’est a priori une première aventure pour lui son aventure chez Les Avrils. Il me semble qu’il a choisi une discipline qui peut-être ne le montre pas forcément, lors de sa course d’élan et de ses trois sauts, la quantité de travail nécessaire pour effectuer trois bonds d’affilés, cloche-pied, enjambée puis saut, ainsi que sa course d’élan, demande un effort concentré sur quelques secondes et une précision d’horloger maniaque. C’était pour moi aussi l’occasion de découvrir les Éditions Les Avrils, qui publient essentiellement de la littérature contemporaine.
Sur la ligne de départ, il y a Victor et son père, l’un et l’autre quittés par celle qui officiait dans le rôle de mère et d’épouse. Une vie trop petite, trop étriquée, trop modeste, le désenchantement de la vie familiale a fait son œuvre sur celle qui est partie et a laissé derrière elle deux champs de mines. Une famille monoparentale donc, le fils et son père unis dans la même solitude, dans un minuscule appartement, dans une vie sans bien de goût pour l’un aussi bien que pour l’autre. Jusqu’à l’épiphanie, jusqu’à ce que Victor tombe en admiration devant un triple-sauteur, une expérience, qui va jouer le rôle de détonateur : vous l’aurez sans doute compris, Victor va se révéler dans ce sport bien mal considéré comme ne manque pas de le souligner Arnaud Dudek : car, en athlétisme, la discipline reine, c’est le 100 m, et d’autres disciplines plus spectaculaires comme le saut à la perche ne manquent pas de fasciner et d’attirer jusqu’aux moins initiés.
Victor est un athlète plein de promesses, mais l’univers du sport, et on ne manque pas d’exemples qui ont fait jour ces dernières années pour appuyer le propos de l’auteur, est un monde rempli d’ego surdimensionnés, et pourri par des manager aux méthodes et comportements toxiques, ou même déplacés, pour faire dans la litote. L’athlétisme ne fait pas exception, Arnaud Dudek démontre à quel point ces jeunes sportifs en devenir peuvent être broyés par des exigences inconsidérées dès lors qu’ils n’ont pas une carapace en acier forgé.
L’auteur a justement choisi un héros avec des fêlures qui n’ont jamais été colmatées, et ne manquent pas de devenir des trous béants, un jeune avec des capacités hors-normes, un futur champion national, peut-être même international si dans son ombre ne se cachait pas un entraîneur en mal de reconnaissance. On parle beaucoup, de plus en plus en fait, de la toxicité du monde professionnel, on parle de burn-out, de dépressions, de suicides même, Arnaud Dudek nous donne l’occasion de vivre de près les conséquences psychologiques, sociales, et financières de la descente aux enfers du jeune homme. C’est un peu l’image de l’oiseau qui se brûle les ailes, par naïveté, par excès de confiance, par inexpérience, par ambition. Arnaud Dudek dresse là un récit simple, mais qui n’enlève rien à la force de sa genèse, et simplement poignant d’une passion subite et inouïe, de sa force, de la grandeur de la révélation d’un talent, mais de l’envers des choses, l’exploitation, l’humiliation. Les âmes mal intentionnées qui jouent en catimini sur le dos de Victor, qui attendent argent, gloire, pouvoir, domination qu’ils touchent du bout des doigts, qui rêvent des gros titres de L’Équipe, les ouvertures de Sport 3, des contrats toujours plus juteux auprès des fédérations nationales et des sponsors qui ne demandent qu’à trouver le partenariat le plus avantageux possible.
Il est de ces destins personnels, qui passent inaperçus, qui auraient pu passer à la trappe, mais c’est dans la simplicité de Victor que réside le charme de ce roman : pour une non-initiée comme moi (les cours de triple-saut en EPS au lycée commencent sérieusement à dater.), je découvre la place de la discipline au sein de l’athlétisme, qui occupe la place ingrate du lot de disciplines qu’elle réunit. A priori, on pourrait penser que la concernant, les mentalités évoluent, puisque le penta-bond – c’est-à-dire l’enchaînement de cinq sauts – est enseigné au lycée, sans qu’elle soit pour l’instant une discipline reconnue officiellement par la fédération française d’athlétisme.
Il ne suffit parfois que d'une simple promenade pour que notre chemin prenne une nouvelle direction. C'est comme ça que le petit Victor Valetudik, découvre l'athlétisme, discipline inconnue jusqu'alors pour lui. D'une simple passion, les performances du jeune garçon au triple saut l'emmena vers les plus hautes cimes mais garde à ce que le soleil ne lui brûle pas les ailes...
Voici un très bel ouvrage qui montre toutes les facettes auxquelles sont confrontées les sportifs. Derrière les articles publiés dans L Equipe ou les gazettes locales, le quotidien de ces athlètes est rythmé par les entraînements pour viser toujours plus haut. Bien plus qu'un mode de vie, le sport devient une religion dont Victor est devenu un véritable disciple.
En lisant "le coeur arrière", je me suis remémorée mes anciennes années de gymnaste et j'ai retrouvé de nombreuses sensations évoquées dans ce livre.
J'ai beaucoup apprécié la plume d'Arnaud Dudek qui nous offre un récit sensible où l'on s'attache très facilement aux personnages qui apportent énormément malgré leurs discrétions.
Je tiens à remercier Les Avrils, Arnaud Dudek et Netgalley France pour avoir accepté ma demande car j'ai passé un très bon moment de lecture qui m'a rappelé de nombreux souvenirs...
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