C'est la séance rattrapage : tout ce qu’on avait envie de vous dire, et qu’il ne fallait pas manquer
Quelle femme de soixante ans, aujourd'hui, peut sans grimacer s'entendre appeler "mamie" ? Pas Chouquette, qui a réglé le problème en recyclant le surnom de ses tendres années, au grand dam de sa fille Adèle, laquelle rêve pour son petit Lucas d'une vraie grand-mère.
N'empêche, vraie ou fausse, c'est bien Chouquette qui doit jouer les baby-sitters de luxe auprès de son petit-fils renvoyé de sa colo pour cause de varicelle... pendant qu'Adèle est partie sauver le monde au fin fond de l'Afrique. Bling-bling tropézien sur fond de crash financier, c'est le décor plein soleil dans lequel Chouquette se retrouve en tête à tête forcé avec Lucas... et la réalité. Trois jours de la vie d'une sexagénaire en perte de repères, pour tirer le portrait au vitriol d'une femme qui se noie, d'une époque qui boit la tasse et d'une génération qui tente coûte que coûte de garder les yeux grands fermés.
Où la satire sociale, légère, féroce et réjouissante vire progressivement à quelque chose de plus grave, de plus profond, de plus amer, de bien plus intime aussi. Et cette fantaisie sur une grand-mère au bord de la crise de nerfs devient alors le roman d'un monde en crise, du déni, de la peur de mourir et, au bout du compte, de l'héritage que nous laissons à nos enfants.
C'est la séance rattrapage : tout ce qu’on avait envie de vous dire, et qu’il ne fallait pas manquer
Emilie Frèche, lauréate du Prix Orange du Livre 2013 pour "Deux étrangers"
Ca y est, le nom du lauréat de la cinquième édition est connu, le jury et les internautes ont élu Emilie Frèche pour son roman Deux étrangers (Actes sud).
Catherine est une femme riche, mais pauvre en amour... Elle attend désespérément à plus de soixante ans l'attention de son infidèle de mari. Elle s'enferme dans un monde d’illusions ! Un monde où il n’y a pas de place pour son rôle de grand-mère…
En lisant le résumé, on s’attend à une histoire sarcastique et drôle, mais le roman est plutôt dramatique. Cette histoire présente les conséquences que peuvent avoir un profond désespoir sur et un besoin désespéré d'amour sur l’entourage proche. On oscille entre les illusions et obsessions de Chouquette et les reproches de sa fille. Mais au fil du récit notre héroïne va progressivement évoluer… C’est l'histoire d'une femme qui s'est perdue au cours de sa vie et qui, à plus de soixante ans, entrevoit de reprendre enfin le contrôle de sa vie.
L'auteure ne nous offre pas une histoire cousue d’avance mais aurait pu peut-être approfondir certains points comme le passé et la jeunesse de Chouquette ou les relations mère/fille… Cela manque d’un regard plus élargi sur notre personnage principal.
C’est un roman qui se lit tout de même très agréablement et qui montre surtout qu’il n'est jamais trop tard pour être heureux !
Je remercie Lecteurs.com ainsi que les éditions Babel pour l'envoi de Chouqette d'Emilie Frèche.
Chouquette, c'est Catherine et Catherine, c'est cette femme très riche, mais tellement pauvre. La soixantaine passée, sa vie se résume à attendre désespérément de l'amour de la part d'un mari volage dont elle n'accepte pas le départ. Alors, elle s'enferme dans ses illusions ! Dans le monde de Chouquette, son Jean-Pierre continue à l'aimer et son absence ne s'explique que par la masse de travail qu'il accumule. Elle ne supporte donc rien qui pourrait entraver sa "relation" avec un mari fantôme, à commencer par un statut peu sexy de grand-mère. D'ailleurs, ce n'est pas une grand-mère, c'est Chouquette ! Que sa fille ou son petit-fils aient besoin d'elle n'y change rien, ce qui compte c'est Jean-Pierre...
Je dois avouer avoir été assez surprise par le contenu du roman. A la lecture du résumé, je m'étais attendue à une histoire plus sarcastique et plus drôle. Or à part quelques passages qui prêtent à sourire, la tristesse est omniprésente dans la vie de Chouquette. Que cette femme m'a fait de la peine à attendre désespérément de l'attention d'un mari qui l'ignore et qui l'a cocufiée des années durant ! Elle a en effet tout simplement mis sa vie et sa famille en attente pour une chimère... Je ne suis pas psychiatre ou psychologue, mais son obsession pour Jean-Pierre a ce quelque chose de pathologique et de pathétique qui ne m'a pas permis d'en rire. Certains pourront peut-être se jouer de ses illusions dont personne n'est dupe, mais je n'ai pas pu.
De la même manière, j'ai eu du mal à compatir avec la fille de Catherine qui regrette l'égoïsme de sa mère quand elle-même, n'essaie à aucun moment de la comprendre ou du moins, de compatir, et surtout de lui tendre la main. Là où Adèle ne voit que pur égoïsme, je lis un profond désespoir et un besoin désespéré d'amour et de contacts.
Il est vrai que même Chouquette ne semble pas saisir ses vrais besoins puisqu'elle met son bonheur entre les mains de son mari qui n'en a que faire. Heureusement, au fil du récit et de ses interactions avec Diane, ancienne maîtresse de son mari qu'elle a invitée à Saint-Tropez, et de son petit-fils, elle va progressivement évoluer. Cela ne se fera pas consciemment, mais petit à petit, elle va réaliser qu'il y a des choses en dehors de Jean-Pierre comme ce petit bonhomme de cinq ans qu'elle connaît si peu.
J'ai beaucoup aimé le fait que Catherine ne fonde pas immédiatement au contact de son petit-fils se transformant en mamie gâteau adepte du tricot. L'auteure ne nous offre pas un feel-good, mais bien l'histoire d'une femme qui s'est perdue au cours de sa vie et qui, à plus de soixante ans, entrevoit enfin un moyen de reprendre les rênes de sa vie. La scène de fin est, à cet égard, d'une grande sensibilité. Sans tomber dans le pathos ou la surenchère de sentiments, je l'ai trouvée belle et synonyme d'espoir.
Il y a néanmoins deux choses qui m'ont un peu chagrinée dans le roman. La première est une scène qui m'a quelque peu mise mal à l'aise d'autant qu'elle n'apportait rien au récit. Je n'ai rien contre la nudité, mais je ne suis pas certaine que celle d'une femme d'âge mûr, en pleine épilation intégrale devant un garçon de cinq ans, soit très saine... La seconde chose que j'ai regrettée est que l'auteure est peut-être restée trop en surface. Il y aurait eu tellement de choses à exploiter comme le passé et la jeunesse de Chouquette qu'on entrevoit sommairement à la fin du livre et qui apporte un regard nouveau sur cette femme, la relation mère/fille, les relations intergénérationnelles...
En conclusion, Chouquette met en scène cette mamie malgré elle et son obsession pour un mari qui ne l'aime pas et qui ne la respecte pas. Au gré du récit, le lecteur va assister à ses vains espoirs, mais surtout à son désespoir. Sans être particulièrement joyeux, ce roman offre toutefois une réflexion sur la famille et sur ce qui compte dans la vie. Et comme le découvre Chouquette, il n'est jamais trop tard pour être heureux !
Roman court, déroutant, déjanté, très loin de mon idée du rôle de grand-mère. Le choix de Catherine de ne pas se faire appeler "Mamie" ne me choque pas (je choisirai certainement une autre appellation). Par contre son attitude très détachée vis-à-vis d'Adèle et de Lucas me déplaît. Très vite on comprend le contexte et trouve des excuses. Catherine devient attachante.
Des moments drôles, divertissants, ironiques, humains avec une touche d'émotion, ainsi qu'un côté incisif. L'écriture est simple, fraîche. Une lecture sympathique.
Ma chronique complète dans quelques jours sur mon blog Vie quotidienne de FLaure
Chouquette, c’est Catherine, la mère d’Adèle. Chaque été, dans sa vaste et somptueuse maison de Saint Tropez, elle attend son mari Jean-Pierre. Bien que ce dernier ait fini par la quitter, elle continue à attendre cet homme, le seul amour véritable de sa vie. Mais cette année, Adèle voudrait qu’elle s’occupe de son petit-fils Lucas car elle part en Afrique avec son mari s’occuper des miséreux.
Emilie Frèche déroule les affres de Chouquette, cette grand-mère qui refuse de voir le temps qui passe, qui n’accepte pas de devenir davantage mamie qu’un amante et ferme les yeux sur son âge. Prétexte à nous montrer le désespoir d’une femme amoureuse, trompée, humiliée, abandonnée, et qui ne veut pas regarder la réalité en face, préférant se perdre dans ses rêves. Voilà un court roman qui nous fait passer agréable moment de détente, porté par l’écriture d’une auteure que j’avais découvert avec « Un homme dangereux » et qui saura encore me séduire, c’est certain.
Avec « Chouquette », son héroïne-roman, Emilie Frèche parle, en creux, de la condition féminine actuelle.
Le roman paraît d'abord aussi superficiel que Chouquette, son personnage principal. En effet cette grande bourgeoise de 60 ans a tout pour plaire. Egocentrique, déconnectée des réalités, elle n'a qu'une chose en tête partir, comme chaque 14 juillet, pour Saint-Tropez.
C'est l'urgence de garder son petit-fils qui va l'obliger à se regarder en face et à regarder autour d'elle. Car, au même moment, l'économie mondiale coule à pic. Un trader participe à lui ouvrir les yeux : «Cette crise n'a rien à voir avec ce que l'on connaît. Ce n'est pas une crise financière, c'est une crise d'avidité, tout va s'effondrer.» Une phrase qui résonne avec l'effondrement intérieur de cette épouse de banquier trompée, meurtrie et amère au point de penser certaines horreurs, voire vérités : « Catherine portait le même jugement sur les bonnes que sur les hommes, elle considérait que la difficulté n'était pas de les trouver, mais de les garder et que, de ces êtres ingrats, il ne fallait pas attendre la moindre moralité : du jour au lendemain, il pouvait vous quitter. »
D'antipathique, Chouquette nous devient peu à peu familière. Derrière les apparences qu'elle tient tant à préserver, elle est finalement une femme comme les autres, en quête d'amour, et qui affronte, seule, la vieillesse et son injustice biologique. « Les hommes ne possédaient pas d'horloge, pas de limite, rien d'autre ne les guidait que leur désir, ils pouvaient donner la vie bien après que leur fille n'en était physiquement plus capable, être à la fois père et grand-père… »
Une colère qu'elle va consommer pendant ces trois jours à Saint-Tropez avant de conclure : « Nous disons je veux profiter, je veux jouir, je veux continuer d'exister, et tous ces mots nous donnent l'illusion d'être immortels, et nous oublions que l'histoire est en marche, que les jours coulent entre nos doigts comme l'eau dans le clepsydre, que, entre la mort et nous, il n'y a que nos enfants. »
« J’adore mon petit –fils ». L’incipit quasi-proustien même d’emblée la danse, dans ces pages manichéennes, troublées au goût de larmes. L’ambiance de ce roman est vive, de silences et de frustrations. Chouquette soixante ans est un peu l’image de l’océan qui se retire. Solitaire, abandonnée par son mari, elle semble amère, de sel et de tempêtes enfouies. Son caractère vif est une porte qui claque contre sa figure. Son petit-fils arrive. Et là, le roman monte en gamme majeure. Il sera pour Chouquette, rédemption, tendresse, et soupape de sécurité. Emilie Frèche transforme ce qui aurait pu être une satyre, en un hymne de renouveau. Ce roman est âpre, puis calme. Il est symbiose avec Chouquette. Les lignes de l’auteur tourbillonnent en ouragan et arrachent tout sur leurs passages. C’est une réussite qui délivre mots à maux les souffrances de Chouquette mal-aimée mal comprise, mal désirée. Ce lever de rideau qui se lève subrepticement est un crépuscule devenu un apaisement lumineux. C’est un outil pour chaque femme qui ne sait plus et dont l’âge marginalise les émois. Ce court roman est puissant et palpitant par ses forces qui ressurgissent en levier formateur. Emilie Frèche nous délivre un pan de vie dans une écriture aérienne et volontaire. Publié par Les Editions Actes-Sud collection Babel Poche ce roman devenu un grand film est à offrir à chaque femme ou grand-mère qui doute. Un grand merci à Lecteurs.com pour l’envoi de ce roman actuel et sincère.
l'auteur a l'air si jeune!!! je voudrais participer au concours pour gagner ce roman, mais je ne sais pas si je suis au bon endroit. soit. Vieillir! tel est le sujet de ce roman, ou plutot, accepter de vieillir, on n'a pas le choix de toute facon, mais chacun aborde ce cap a sa facon. Je n'ai pas vu le film, mais l'histoire a l'air intriguante, et donc le livre doit etre mieux encore que le film... Bonne chance a tous les participants!!!
Une interview d'Emilie Frèche :
http://actualitte.com/blog/sophielit/2010/05/03/5-questions-a-emilie-freche/
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