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Vandam, le narrateur, est peintre en bâtiment. Il a connu la dépendance aux drogues et un séjour en prison. Il est fasciné par l'histoire militaire, voue un culte aux grands chefs de guerre et fait ses deux cents pompes par jour. Il se retrouve souvent à la taverne pour boire des bières ou se battre. Il vit une aventure avec la serveuse Lucka. Et il est fier d'avoir donné le premier coup lors de la manifestation praguoise de novembre 1989 qui a amorcé la Révolution de Velours et la chute du communisme tchèque. Dans ces pages, il livre ses « leçons de vie » et déverse ses obsessions, entre rage et autodérision. Épopée universelle pleine d'une poésie brutale et mélancolique, portée par une écriture dense et hallucinée, Avenue nationale plonge le lecteur dans la tête d'un néoextrémiste perdu dans une démocratie en quête d'identité et reflète les paradoxes des idéologies contemporaines.
Ce qui marque avant toute chose, c'est le style de l'auteur. Résolument moderne et oral. Brutal parfois, direct et poétique. J'ai peu de références en la matière, mais je le rapprocherais d'un écrivain étasunien dont j'ai lu quelques livres, Larry Fondation (ici, ici, et là). C'est âpre, rugueux et ça dérange. Heureusement que le livre est court et aéré, 500 pages du même calibre et j'aurais sans doute abandonné, mais je dois dire que le rythme, le style, et l'énergie qui se dégage m'ont largement tenu jusqu'au bout.
Ce sont les propos et la vie d'un homme qui a sans doute eu de l'espoir en 1989 et qui n'en a plus. Il a toujours vécu dans le lotissement préfabriqué, n'en est que peu sorti et n'espère plus grand chose de la vie. Les espoirs sont derrière lui, oubliés avec la came et la taule. Lorsqu'il parle avec ses copains de boisson, on se rapproche des brèves de comptoir, qui parfois sont plus profondes qu'il n'y paraît : "Quand t'es jeune, tu détestes ton père. Et plus tu vieillis, plus tu lui ressembles. Et pour finir t'es la même brute que lui. La vie, c'est rien que des mystères cosmiques, pas vrai ?" (p.85)
Voici donc la vie d'un néoextrémiste, mal dans sa peau, violent et irritable. Un type ordinaire totalement perdu dans le monde contemporain qui va trop vite pour lui. Il sait d'où il vient, mais tout a tellement changé vite qu'il ne sait plus où il est, où il va et ce qu'il va transmettre à son fils. Alors, il transmet ce qu'il connaît bien : la peur de l'autre, la violence : frapper avant de se faire frapper. Pour lui la paix n'est qu'une période entre deux guerres. Il s'inscrit totalement dans la montée des fanatismes et des extrémisme à laquelle on assiste depuis plusieurs années un peu partout en Europe, en France itou, puisque nous avons l'un des -sinon le- partis d'extrême droite le plus fort.
Jaroslav Rudis met tout cela en mots très brillamment. Vandam n'est pas tout noir, ce serait trop facile. Il n'est pas vraiment fréquentable, certes, il est perdu, largué. La lecture est dure mais belle et rapide, et si certains passages sont un peu longs, eh bien on les passe vite pour se retrouver quelques pages plus loin.
Mirobole m'a habitué à des textes forts, barrés, décalés, ce roman ne déroge pas à cette règle. Dérangeant et pas confortable. Bonne pioche pour la maison d'édition.
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