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Je ne vais jamais en librairie assister à des rencontres avec des auteurs. D’abord parce qu’il y en a peu près de chez moi et puis que dirais-je à un auteur ou autrice que j’affectionne particulièrement ? « J’aime beaucoup ce que vous faites », « J’ai lu tous vos romans »? Il y a ceux qui savent poser la bonne question, savent disséquer une oeuvre. Moi j’en suis incapable. Ça ne m’empêche pas pour autant de vouloir en savoir plus sur le travail d’écriture, sur la personne qui écrit.
Les bonnes questions, c’est exactement ce que l’on trouve dans cet entretien d’Yvan Robin avec Le Corre. Pour les fans de l’auteur, tout est passé au crible. Après une courte bio, l’échange entre les deux hommes (qui semble un peu crispé au début) éclaire le travail, les inspirations, l’engagement de l’auteur. De ses débuts dans les méandres de l’édition à l’auteur reconnu d’aujourd’hui, Le Corre répond sincèrement et de plus en plus longuement.
J’ai pris grand plaisir à découvrir des anecdotes sur chaque livre, j’ai souvent sourit quand il cite des auteurs que j’affectionne également et j’en ai noté un paquet.
Mais ce que j’ai préféré, c’est quand les questions l’amènent à ne plus être écrivain mais simple citoyen avec ses colères, ses doutes.
C’est passionnant, ça se lit d’une traite et j’aime encore plus Le Corre après avoir lu ce petit bouquin. Je vais tranquillement découvrir les quelques titres qui me restent à lire et attendre impatiemment le prochain dont il dit deux mots (à prendre au sens littéral) à la fin.
J'avais lu récemment un ouvrage de portrait et d'entretien d'auteur : Philippe Djian, l'incendiaire de Nicolas Bérard et avait apprécié lire l'entretien et les questionnements que les deux hommes ont abordé et bien sûr, cela m'avait incité à (re)lire les textes de Philippe Djian.
C'est le même cas avec ce texte qui est la rencontre entre deux écrivains, Hervé Le Corre et Yvan Robin.
Pour Philippe Djian, le sous titre était l'incendiaire, pour Hervé Le Corre, c'est une mélancolie révolutionnaire. Et ce titre correspond très bien à l'univers, aux textes de cet auteur de livres noirs.
Une présentation de l'auteur et de ses différents romans, puis un entretien, où l'on découvre la vie, les lectures, les références, les influences, les engagements. Mais aussi la manière de travailler, son rapport au monde de l'édition, à la critique littéraire, aux lecteurs. Un entretien avec des questions pertinentes, des questions qui surprennent l'auteur, des passes d'arme entre gens bien élevés, mais aucune langue de bois. Et j'ai apprécié les colères, les doutes, les piques d'Hervé Le Corre.
Un auteur dont j'affectionne les textes et cet entretien m'incite de (re)lire ses textes.
Je vais continuer mes lectures de ses entretiens et vais découvrir celui sur "Doa, rétablir le chaos" de Elise Lépine, dans cette même maison d'édition et ceux consacré au cinéma.
L’adolescent se débarrasse de sa carapace
Ce que j’aime chez un écrivain, reconnaître sa patte dès les premières lignes et être surprise. Je n’ai plus l’âge du public visé par ce roman, mais le plaisir a été dense et les émotions fortes.
C’est l’histoire de Milo, 14 ans, qui comme tous les étés passe ses vacances chez sa grand-mère. Cette année est particulière car Milo n’est plus un enfant, pas encore un homme, cet entre-deux à la fois inconfortable et exaltant va se vivre sur un mystère, celui du grand-père disparu, envolé, un été sans ce héros aux yeux de ce petit fils.
« — Ton grand-père est parti se balader avec chien et fusil…
Elle poussa un soupir fataliste.
— Et Chougare est revenu sans lui. Il a dû tomber dans une crevasse, se jeter dans les gorges, ou se…On saura sans doute jamais. La vieille dame montrait rarement ses émotions, elle les gardait enfouies en elle comme un trésor.
— Mais…
— Les flics et les pompiers ont ratissé la zone de long en large, et…Rien. À croire qu’il voulait pas qu’on le retrouve. »
C’est la trame, mais Yvan Robin joue avec ses lecteurs, avec les émois de cet âge, l’atmosphère estivale entre copains et petite copine, les relations affectives avec cette grand-mère adorée avec laquelle il partage des moments privilégiés et cette interrogation qu’il sait ne pas devoir verbaliser sans faire mal.
Cet ado qui admirait ce grand-père et qui emprunte sa mobylette comme pour suivre ses traces.
Les jours s’écoulent dans une chaleur de plomb, les jeux et les enjeux se nouent et se dénouent au fil du temps.
L’écriture épouse parfaitement le sujet, et nous rappelle notre adolescence, même si les moyens de communication ont changé, nous plongeons dans un tourbillon d’émotions.
Une écriture qui nous invite à tourner les pages, une construction judicieuse, un ton juste sans excès d’écriture orale, un roman qui est un oxymore : un soleil noir.
Et Yvan Robin nous mène par le bout du nez jusqu’au final avec malice et brio.
Un auteur qui sait nous surprendre.
Ce livre est parfait pour faire aimer la lecture.
A offrir sans modération.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/11/27/bonhomme/
Si tu cours dans une meute, même si tu ne peux pas aboyer, remue la queue
Montcalme un trou de campagne, dit zone blanche, car tout le monde a un portable mais ne peut s’en servir que lorsqu’il sort de ce trou.
Une bande d’hommes, des purs et durs, de ceux qui exercent leur force sur plus les faibles, femmes, enfants et migrants sans papiers.
Leur culture, en dehors des terres de moins en moins cultivables, faute de repreneurs, est faite d’un ramassis de préjugés. Ceux-ci forment le matelas de leur bonne conscience, car il faut bien trouver une bonne raison à la création de ce Comité de vigilance citoyenne.
« La peur, entretenue grâce à une perfusion télévisuelle constante, orientait chacune de ses décisions. La peur de l’autre. La peur de manquer. La peur de l’abandon. De la maladie. De la mort. Du mauvais sort. Du mauvais coup. »
Comme dans tout village il y a un idiot mais au fur et à mesure de l’histoire, le lecteur s’interroge.
En tête de ce comité Lionel, employé de mairie, qui a de hautes ambitions, ce n’est pas un homme, juste de la haine sur pattes. Il est épaulé par le médecin, l’instituteur et le seul agriculteur survivant. Des épis de blé ont disparu et c’est la guerre, ils courent tous après l’étranger : Souleymane caché dans les bois. Bois qui a sa propre légende celle de La Fauve, bête qui rôderait depuis des siècles.
Mais en quelques heures c’est la descente aux enfers.
Yvan Robin mène ses lecteurs par le bout du nez en un récit rapide comme un précipice, précis dans un vocabulaire travaillé, en images et dialogues justes, il n’en rajoute pas , la curée est déjà assez sanglante.
La révolte des femmes était en sommeil, mais je ne pense pas qu’ici elle soit « l’avenir de l’homme ».
« Les femmes, d’ailleurs, en nombre, contribuaient à la perpétration de l’injonction. Il n’y avait pas d’alternative, Blanche se devait d’éprouver du désir, ou de feindre. C’était la moindre des politesses. »
Les éditions Lajouanie nous disent « Roman policier mais presque… » c’est dans ce presque qu’est caché le sel de l’histoire qui vous précipite dans les abymes, et vous interroge néanmoins sur un monde qui se dessine et dont vous ne voulez surement pas.
Si je devais définir ce roman en une seule phrase je dirais que Yvan Robin a réussi un brillant strike à vous donner le tournis.
Merci à Masse Critique de Babelio et aux éditions Lajouanie pour ce privilège de lecture.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2022/11/11/la-fauve-yvan-robin/
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