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Ce lundi 3 juin 1974, Livia et son petit frère Nino profitent du jour férié pour jouer en bas de leur immeuble. Ce sont deux enfants joyeux, aimés de leurs parents, Marcia et Marcello Pozzi. Mais au moment du déjeuner, Livia a disparu. Emmenée en voiture par un homme qui dit être à la recherche de son chien. Très vite les recherches commencent. Malheureusement, le corps de la petite fille est retrouvé quelques jours plus tard et un suspect très vite arrêté. La descente aux enfers n’en finira plus pour la famille Pozzi. Et cela même si le suspect est reconnu coupable et condamné à la peine de mort encore en vigueur en France.
Pour ce roman extrêmement prenant, Patricia Delahaie s’est très librement inspirée de l’affaire Christian Ranucci et de l’enlèvement et du meurtre de la petite Marie-Dolorès Rambla. Ainsi, si les grandes lignes et le déroulement des faits suivent la réalité, l’auteure y a insufflé une certaine dose de fiction, changeant par exemple les noms ou modifiant quelques éléments de l’enquête (le pull-over rouge immortalisé par Gilles Perrault est ainsi transformé en gourmette). Marquant ainsi qu’il n’est pas question d'affirmer la vérité sur cette affaire, mais d’en proposer une version, sa version.
Elle a aussi nourri ces personnages en leur prêtant des pensées, des paroles qui éclairent leurs personnalités, s’attachant notamment à la relation de Loïc (Christian) avec sa mère. Elle cherche ainsi à comprendre les mécanismes qui ont conduit le jeune homme, fils unique, élevé par sa mère dont il est très proche, vers ce destin de meurtrier.
Elle explore aussi la psyché de cette femme pour qui son fils est tout, un brin fantasque, peut-être aussi un peu mythomane et paranoïaque, longtemps persuadée, ou voulant se persuader de l’innocence de son fils.
Patricia Delahaie va, au fil des 62 chapitres qui composent ce livre, nous emmener dans les pas de Loïc, de sa mère, de la famille Pozzi mais aussi d’un journaliste qui suit cette affaire de près, Gus Demaison, et qui a le chic pour se faire ouvrir les portes et inciter à la confidence et obtenir ainsi des informations exclusives.
Ce livre est passionnant, on s’y accroche du début à la fin. Il est très intéressant par le focus qu’il fait sur cette relation mère-fils, donnant ainsi un éclairage et une nouvelle lecture de la personnalité du meurtrier.
Pour Patricia Delahaie, si la culpabilité de son Loïc ne fait aucun doute, elle n’en demeure pas moins attachée à comprendre les fondations sur lesquelles s’est construite cette personnalité, à faire émerger les démons qui l’habitent et le hantent. Comment, par exemple, en est-il arrivé à avouer son crime pour ensuite se rétracter et clamer son innocence ? Qu’est-ce qui l’a poussé vers la petite Livia puis à commettre cet acte dramatique ?
L’auteure propose aussi une analyse de ces années 70, durant laquelle l’affaire Ranucci devient une affaire politique, opposant pro et anti-peine de mort. Cela d’autant plus que l’opinion publique est, au même moment, frappée par une autre affaire d’enlèvement et de meurtre d’enfant, celle du petit Philippe dont sera accusée Patrick Henry (sans être condamné à mort contrairement à Ranucci).
C’est donc tout autant sur un axe familial, que social, policier et journalistique que ce roman est construit, d’où sa grande richesse et sa complétude.
J'avais déjà beaucoup aimé "La faussaire", premier thriller de l'auteur. Il était déjà inspiré d'une histoire vraie, moins connue que l'affaire Ranucci qui avait fait la une des journaux dans les années 1970 et dont est tiré le présent roman.
Les noms sont changés, l'histoire romancée, mais le fond est là et les descriptions de personnages sont bien faites, les ressentis bien imaginés, les milieux juridiques et journalistiques bien fouillés.
L'écriture est fluide, les sentiments crédibles, j'ai lu ce roman avec intérêt et curiosité.
Auteur à suivre.
L’autrice nous replonge dans l’affaire Ranucci, (autrement appelé l’affaire du pull-over rouge), en prêtant aux protagonistes de l’affaire des pensées, des opinions qu’on ne connaîtra jamais vraiment dans la réalité des choses. Tous les personnages sont renommés pour bien montrer qu’elle prend une certaine distance avec l’affaire, qu’elle créé un roman tiré de cette affaire : le pull-over rouge, symbole du fait divers réel, devient une gourmette dans ce livre, le suspect/coupable, Christian Ranucci devient Loïc Peyrat, etc
L’autrice offre une large place aux faits eux-mêmes pour ceux qui ne connaissent pas cette histoire. Pour ma part, je connaissais ce fait divers que par le biais des journalistes : l’émission Faites entrer l’accusé, le livre « Le pull-over rouge » de Gilles Perrault et le documentaire de Canal + tiré de l’histoire du petit frère de la victime. Je n’ai donc qu’une vision partielle de cette histoire. Le rappel était quand même bienvenu pour m’immerger complètement dedans.
Le parti pris de l’autrice est de nous livrer sa propre interprétation de la relation mère/fils Peyrat : ce fils qui avait une relation très ambiguë envers les enfants, mais sans que son entourage le sache réellement. Avec du recul, les langues vont se délier et certains vont reconnaître après coup, qu’il avait un comportement bizarre. Mais en attendant, avant que cette affaire n’éclate, Loïc était un jeune homme solitaire, qui vivait chez sa mère, semblant ne pas vouloir prendre son indépendance, et en grande partie en marge de la société.
La mère est donc le personnage central du roman et est particulièrement crédule : elle croit son fils et se laisse berner par les journalistes, eux qui cherchent à tout prix des informations exclusives dans leur propre intérêt et qui vont se comporter comme des personnes qui cherchent à la soutenir à ses dépens, tout en se moquant d’elle. Sa mère était une véritable mère poule, qui vouait un amour inconditionnel pour lui. Victime de harcèlement par le père de son fils, elle était très vulnérable et a consacré sa vie à lui.
Ce qui est particulièrement touchant est qu’elle ne prend pas conscience de ce qu’encourt son fils, de la situation dans laquelle il se retrouve. Elle est persuadée qu’il n’est arrêté que pour un fait anodin, et qu’il va ressortir rapidement. Elle l’exige même, auprès du commissariat car il doit reprendre le travail rapidement. Elle ne se rend absolument pas compte du danger que représente son fils vis-à-vis des enfants.
La personne qui va lui ouvrir les yeux est bien loin de ce qu’on aurait pu attendre d’elle mais des doutes vont quand même naître à un certain moment.
On entre également dans la tête du suspect sur certaines scènes, et c’est particulièrement effrayant. Ces chapitres portent sur certains passages du fait divers en lui-même dont l’enlèvement de la petite fille, mais pas au moment de la mort de la petite fille, comme pour laisser le doute, doute qui persiste encore aujourd’hui.
Le moment du procès est relaté rapidement vers la fin du livre, comme pour souligner la rapidité du jugement de cet homme : à l’époque, le procès a duré quelques jours seulement, alors que de nos jours, un procès de ce type dure plus longtemps. Le procès en appel n’était à l’époque pas possible. Le jugement était alors définitif. L’enjeu était pourtant grand : la peine de mort, en particulier pour ceux qui ne reconnaissaient pas leurs torts alors que tout les accablait.
Déjà à l’époque, les faits divers côtoyaient le monde politique. De fausses informations vont être diffusées et l’accusé et sa mère vont y croire.
Ce fut donc une bonne lecture pour redécouvrir ce fait divers par un autre biais. J’aurais néanmoins aimé moins de passages sur les personnages comme les enquêteurs, les journalistes ou la juge : l’autrice nous livre leur propre histoire également, là encore en interprétant leurs pensées. J’ai pu trouver ces passages un peu longs et me donnant l’impression d’une sorte de digression dans le roman, comme pour sortir du but principal du roman, nous relater la relation mère/fils. J’ai bien conscience que l’autrice a cherché à faire ressortir la complexité de l’affaire et des enjeux de tous dans cette histoire, comme pour montrer que chacun d’eux en tirer profit, ou pas. C’est particulièrement rageant d’ailleurs et cela m’a rappelé l’affaire du petit Grégory où les médias, la justice et les enquêteurs ont rendu l’enquête impossible à dénouer.
En bref, je recommande cette lecture pour les amateurs de fait divers, qu’ils connaissent cette affaire ou non. L’autrice ouvre un large panel des lecteurs potentiels car ce livre peut parfaitement se lire comme un roman en découvrant les dessous d’une affaire médiatique, dont tout le monde se souvient encore maintenant, même à ceux qui n’étaient pas nés d’ailleurs.
Je remercie les éditions Belfond pour cette lecture.
Le roman de Patricia Delahaie prend racine dans l'affaire Ranucci .En 1974, l'affaire avait suscité un débat national sur la peine de mort et sur le système judiciaire français. Malgré les appels à la clémence et les doutes quant à sa culpabilité, Christian Ranucci fût exécuté par guillotine en 1976. Des années plus tard, des enquêtes journalistiques et des recherches ont continué à soulever des questions sur l'équité de son procès et sur sa culpabilité réelle. Prenant pour base cette affaire, Patricia Delahaie fait entrer en scène Loïc Peyrat, accusé d'avoir enlevé et assassiné la petite Livia Pozzi de 8 ans. Situé dans les années 1970, une période où les moyens judiciaires ne permettaient pas toujours une identification nette des coupables, le récit, bien que romancé, s'appuie sur une recherche approfondie pour ancrer sa narration dans la réalité. On y retrace les événements et les phases de l'enquête et du procès, rigoureusement documentés, le récit se plonge surtout dans l'évolution du personnage de Loïc et de ses relations, en particulier avec sa mère. Cette approche offre une dualité captivante, confrontant la perception du "monstre" à celle du "fils". En se penchant sur l'entourage immédiat de l'accusé, le livre soulève de multiples questions sur la psychologie humaine et la notion de culpabilité. La presse, la justice sont aussi questionnées dans leur faille. C'est une lecture fascinante qui explore la culpabilité d'un angle parfois négligé, celui de la mère de l'accusé mais aussi l'étude des mécanismes de reproduction qui sont passionnants.
Avec une belle écriture , on est rapidement plongé dans le récit. J'ai particulièrement apprécié les monologues intérieurs du présumé coupable qui viennent donner un rythme au récit. L'exposition des pensées du suspect est une opportunité pour nous rentrer dans la tête d'un pédophile et c'est édifiant. Bonne lecture.
http://latelierdelitote.canalblog.com/2024/04/un-lundi-de-pentecote.html
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