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Simple vannier, Félix Canelon ne veut pas rester toute sa vie dans son village, il a envie de découvrir le monde. Il décide d’embarquer comme matelot sur le « Courrier ». Mais après une longue traversée, le capitaine Sanot perd son cap dans la tempête et se retrouve sous la menace des canons d’un vaisseau battant pavillon noir à tête de mort et tibias entrecroisés au large du territoire des « Morticoles », des hypochondriaques étranges qui ont donné tous pouvoirs à une corporation de médecins tous plus tyranniques et déjantés les uns que les autres. Le « Courrier » n’a pas touché terre que déjà l’équipage est mis en quarantaine, douché au détergent et privé de ses vêtements et de ses quelques restes de nourriture. En échange, on lui fournit des biscuits bizarres au goût infâme. S’ensuivra un internement dans un hôpital pour nécessiteux pour Félix qui sera séparé de ses compagnons. Pour essayer d’obtenir un meilleur avenir, il tentera de devenir étudiant en médecine, échouera à un examen humiliant et finira par se retrouver domestique chez plusieurs médecins en rêvant toujours de pouvoir enfin rentrer chez lui, loin de ce territoire de tyrannie sanitaire.
« Les Morticoles » est un roman en forme de fable satirique, un réquisitoire implacable du monde médical dans tous ses états. Il faut préciser que Léon Daudet connaissait très bien ce milieu. Qui aime bien, châtie bien, dit-on. Là, il y va à gros traits, à grands coups de serpe. C’est un brin outré voire caricatural, mais non dépourvu de vérité quand même. Les Morticoles se veulent anticléricaux et athées militants. Ils ne veulent plus croire en Dieu, mais en la Matière. Ils se revendiquent de la science alors que la médecine est plus un art empirique qu’autre chose. Ne dit-on pas que le médecin soigne, mais que la Nature guérit ? On est tout à fait dans la veine humoristique grinçante des Diafoirus et autres fanatiques de la saignée et de la purge du génial Molière. Tous les aspects du problème passent à la moulinette du polémiste : la spécialisation à outrance, l’obsession de l’enrichissement personnel, la peine de mort, la stérilisation des masses (oblation des ovaires pour offrir plus de liberté sexuelle aux femmes riches), les expérimentations loufoques et cruelles sur humains et animaux, les trafics d’organes, les vaccinations bizarres, la justice corrompue, la prostitution, la psychiatrie avec toutes ses outrances et même les déviances sexuelles, mais de manière plus discrète. À noter les patronymes amusants des personnages : Cloaquol, Burnone, Loupugan, Lebide, Clapier, Cudane et autres Ligottin (spécialiste de la camisole de force et du jet d’eau glacée). Datant de 1899, ce texte bien écrit se lit toujours agréablement en se disant qu’avec les derniers exploits de la caste, rien n’a vraiment changé avec le temps !
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