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Second roman de Inge Schilperoord, Le ciel était vide, traduit la fascination que peut représenter l’islamiste radical pour de jeunes gens fragilisés par leur adolescence et des souffrances difficilement dépassées.
Au Vingt-quatrième sourate du coran et plus particulièrement au vers trente-cinq
« An-Nur, la lumière sur lumière, Allah propose aux hommes des paraboles et guide vers sa lumière qui il veut« . C’est le leitmotiv de ce roman.
Son travail portait le titre » Les véritables causes du djihadisme chez les jeunes Néerlandais », leur chahada, leur conversion à un islam 2.0. Mort à 45 ans d’un accident de vélo, cet avocat des causes perdues des djihadistes laisse sa fille, Sophie, surnommée So, Fifi et moineau, seule et orpheline. Elle a l’âge de ces adolescents qui cherchent un futur dans le rejet d’une société où ils n’arrivent pas à trouver leur place. En plus, il leur offre une soif d’absolu correspondant aux envies inassouvies qu’ils ressassent sans relâche.
Sa tante Lulu, pour Lucienne, de trois ans plus jeune que son père, l’a recueillie. Un dossier récupéré dans des affaires pour la ressourcerie l’obsède :
« 10894-Isra El Hannouri, et une date de naissance, deux ans pile avant la sienne. Et, en dessous : Article 140a du Code Pénal, participation à une organisation terroriste ».
Sophie est à la fois attirée par l’histoire d’Isra, qui lui ressemble, son amour de la langue arabe et son attirance pour l’islam. Appréhendant l’absence d’un père aimé, elle célèbre à la fois la beauté de la culture arabe mais flirte dangereusement avec un réseau islamiste, se mettant en danger, comme seul sait le faire l’adolescence.
Adolescence et radicalisme
Inge Schilperoord sait séparer la réalité de la culture arabe et le courant islamiste radical qui corrompt le message de cette religion de bonté. De plus, elle approche avec beaucoup de sensibilité l’attirance qu’il représente pour des jeunes qui cherchent leurs propres chemins. Le lecteur passe de l’inquiétude à la sérénité pour cette jeune fille ayant perdu ses repères, montrant ainsi combien l’équilibre de l’adolescence est précaire.
Son personnage principal est décrit avec beaucoup de précisions, rendant son portrait très juste. Son style, fouillé et travaillé, montre tout le désarroi né de l’absence, de la solitude adolescente renforcée par le deuil et du besoin essentiel de trouver réconfort dans les relations entre pairs. Ici Zana, jeune émigrée d’un pays subissant le joug de l’obscurantisme, permet à Sophie de trouver l’attache qui la ramène dans le monde des vivants.
De la lumière fondamentale au radicalisme mortuaire, Inge Schilperoord montre toute la fragilité de l’adolescence confrontée à des pressions si fortes et qui répondent souvent parfaitement à un malaise existentiel. Une belle découverte pour moi !
Chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2024/08/28/i-schilperoord-le-ciel-etait-vide/
« Maintenant je dois faire bien attention. Cela commence maintenant. » Voilà ce que se répète Jonathan dans le bus qui le ramène chez lui.
Il se fait la promesse de devenir un homme meilleur, de s’occuper davantage de sa mère asthmatique, de superviser leur déménagement, de retourner travailler dans l’usine à poissons, de continuer à faire les exercices préconisés par le psychologue…
Car Jonathan pense qu’un emploi du temps rigoureusement organisé l’empêchera de récidiver et de retourner en prison.
Or dans son quartier promis à la démolition, où il pensait qu’il ne restait que lui et sa mère, vit une fillette délaissée par sa mère.
Après m’être demandée ce qui pouvait bien se cacher derrière « La tanche », en lisant le résumé j’avoue que j’ai hésité à le lire. Il y a des sujets qui vous hérissent l’épiderme.
Mais assurément je serai passée à côté d’une claque littéraire comme je ne m’en suis pas prise depuis longtemps !
Inge Schilperoord réussit l’exploit d’emmener son lecteur dans la tête d’un homme qui lutte contre ses pulsions sans empathie ni voyeurisme. Elle instaure une tension accentuée par l’atmosphère irrespirable d’une été caniculaire qui trouve son dénouement dans une pluie tragiquement libératrice.
Un premier roman remarquable qui démontre sans conteste une rare maîtrise des mots. D’ailleurs, il faut ici souligner la traduction irréprochable du néerlandais par Isabelle Rossellini.
« Il avait toujours aimé les poissons. Sa mère ne leur trouvait aucun intérêt, mais lui, il les trouvait apaisants. Les cercles lents, calmes qu’ils décrivaient, le glissement de leurs nageoires dans l’eau. Comme s’ils gobaient le temps pour lui, le temps dont il ne savait que faire. »
Alors qu'il est libéré faute de preuve, Julien se retrouve livré à lui même pour suivre son protocole d'exercices en vue de se déprogrammer de son "problème". C'est donc dans la tête de Julien que se passe ce roman.
On sent bien toute l'envie que le personnage a d'avoir une vie normale mais il revient dans sa maison pour vivre avec sa mère asthmatique et diminuée, juste avant un déménagement et juste à coté d'une maman vivant seule avec sa fille livrée à elle même.
C'est un vrai combat intérieur que même Julien en plus du soutien à sa mère, l'envie d'aider cette fillette, la gestion de ses pulsions.
Un roman fort, bien écrit, aucours duquel la tension monte au fil des pages pour un final surprenant.
Jonathan a trente ans et a purgé une peine de prison pour pédophilie. Il va sortir et rejoindre sa mère dans la maison de son enfance pour la dernière fois, le déménagement dans un autre quartier étant imminent. Il a pour tout trésor son manuel et son cahier : il faut suivre les règles conseillées par la psychologue pour ne pas replonger ...
Oui mais il y a un hic : une petite voisine va entrer dans son périmètre vital, c’est elle qui a pris l’habitude de promener Milk, le chien, et elle n’a pas envie d’y renoncer ! Jonathan sait pourtant qu’il n’a pas le droit d’approcher un enfant et tente de se conformer aux règles, mais petit à petit il va glisser vers le néant ...
Le rythme est lent, assez monotone, l’atmosphère lourde des non-dits du fils et de la mère. Une ambiance littéraire pesante, inquiétante, notamment lorsqu’on entre dans les pensées du protagoniste. Jonathan lutte à chaque instant contre ses démons et oui, à ce moment-là, on éprouve une grande compassion pour ce malade qui ne semble plus distinguer les horribles pulsions de la réalité ...
Inge Schilperoord, qui fut psychologue judiciaire sait de quoi elle parle et son roman fait froid dans le dos. Quelle chance peut avoir un pédophile de sortir victorieux de cette bataille contre la maladie ?
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