La guerre frappe là où on ne l'attendait pas : des soldats ont l'ordre d'évacuer les civils qui n'ont qu'une heure pour préparer un seul sac...
La guerre frappe là où on ne l'attendait pas : des soldats ont l'ordre d'évacuer les civils qui n'ont qu'une heure pour préparer un seul sac...
"Ce sujet résonne dans l’actualité, mais il est éternel."
Si vous deviez partir pour toujours avec un seul bagage: que mettriez-vous dedans ?
C’est autour de cette question fondamentale qu’Avril Bénard a construit son roman. Une guerre éclate, de nos jours, dans un lieu et une année inconnus. Des soldats demandent à la population de quitter leur foyer dans une heure, des camions partiront avec eux et leur unique valise. Ce roman est le récit de cette heure fatidique, le point de bascule de toute une vie. Au fil des chapitres, nous suivons la destinée de plusieurs personnages d’un même immeuble. Nous ressentons leur fragilité, leur force aussi, leur abnégation face à l’insoutenable. Chacun nous raconte un condensé de son histoire, et ce qui est précieusement glissé dans son sac.
Que prendre pour transmettre son histoire familiale ? Les bijoux ont-il plus de valeur que les photos ou les doudous ? Comment partir sans son animal de compagnie, ce compagnon d’une vie interdit de voyage ? Comment choisir des symboles qui nous donneront une identité et un passé ? Choisir c’est aussi renoncer, laisser derrière soi « Et je ne peux pas emmener le bruit que fait mon parquet quand je rentre ! Et je ne peux pas emmener la tâche de soleil qu’il y a juste sur le haut de la couverture quand j’me réveille ! »
Durant toute ma lecture, j’ai été assaillie par ces questions, en totale empathie avec les personnages. Avril Bénard se focalise dans son récit sur des points de détails, pour que le récit résonne en chacun de nous, traitant de ce qui fait l’essentiel de notre vie. Cela pourrait être notre pays, la guerre pourrait être à notre porte. Et si cela nous arrivait ?
Dans ce premier roman, Avril Bénard fait preuve d’une grande maturité, avec une écriture fine et poétique. Le titre qui sonne comme une dédicace: « A ceux qui ont tout perdu », des personnes ordinaires, comme vous et moi, avec leurs paradoxes et leurs angoisses, entre tragédie, tendresse et espoir. C’est un roman poignant, troublant, universel. Un énorme coup de coeur.
Je remercie infiniment lecteurs.com et les éditions « J’ai lu » pour la mise en lumière et l’envoi de cette merveille. Sans eux ce livre ne serait peut être pas tombé entre mes mains. Je me dis qu’il y a certainement encore de nombreux livres de cette qualité à découvrir dans les rayons des bibliothèques et librairies, qui attendent qu’on les lise. C’est vertigineux et tellement enthousiasmant !
Dans un pays riche, qui semblait ne pas pouvoir sombrer dans la violence, où on parle français, la guerre fait rage. Les habitants d'un immeuble doivent être évacués, de force s'il le faut; ils ont une heure pour préparer un seul sac par personne, pour abandonner les animaux avant de partir pour un ailleurs inconnu et tout laisser derrière eux sans se retourner.
L'auteure nous fait vivre cet arrachement au travers de personnages très différents, aux comportements très différents :
*Manon, qui vient de perdre son mari dans un massacre et sa fille Jeanne, 5 ans qui doit surmonter son immense douleur pour sa fille
*Un couple de septuagénaires où le mari est odieux, où la femme est soumise, humiliée, dont la seule consolation est un vieux chien que le mari veut abandonner à une mort certaine et pour la vie duquel, elle se révolte pour la première fois
* Marek, d'origine polonaise, qui a déjà connu l'exil et qui refuse de partir et d'abandonner ses livres qui sont toute sa vie
* Suzanne, une dame âgée, qui est résignée et s'offre un dernier moment de bonheur, de couleur, en achetant un bouquet de tulipes alors qu'elle manque de tout
* Une famille nombreuse de cinq personnes
* Shoresh, réfugié kurde avec sa compagne et son frère sourd et muet, qui vivent un deuxième arrachement
* Deux âmes, Guy, SDF, et son chien Totem qui ont uni leur solitude en une relation profonde
Ce roman a les caractéristiques d'une tragédie grecque, fondée sur une unité de lieu (un immeuble) et de temps (1 heure), renforcée par la désolation d'un hiver très rude qui maltraite les corps. Les raisons de la guerre ne sont pas évoquées car nous ne sommes pas dans une étude géo-politique mais dans l'humain, dans la réalité de ceux qui souffrent au quotidien de la folie de leurs dirigeants, quelle qu'elle soit. Ce qui m'a frappée, en premier lieu, c'est la très grande dignité (à part le septuagénaire) de ceux qui sont brutalement arrachés à leur vie, sans espoir de retour, face à une sorte de mort.
Ce que chacun emporte dans l'unique sac montre qui il ou elle est, sans masque, sans faux-semblants. Les objets sont porteurs d'instants de vie, certains doivent être écartés, laissés derrière comme les souvenirs qu'ils évoquent .
Les chiens jouent un rôle majeur ; les militaires refusent de les emmener pour des raisons sanitaires. Mais un chien pour quelqu'un qui est seul, dépouillé de tout (Guy, le SDF) ou se sent seul (la vieille dame maltraitée par son mari), c'est un compagnon, un ami, de la chaleur de la confiance, du partage et l'abandonner, c'est comme abandonner un membre chéri de sa famille. J'ai eu les tripes nouées, le coeur au bord des lèvres, lorsque les militaires abattent le chien de Guy, le vouant au désespoir sans fin.
J'ai gardé le premier chapitre pour la fin alors qu'il ouvre le roman mais il me paraît être porteur du message que veut transmettre l'auteure comme une prédiction de pythie ; il est d'ailleurs intitulé « Je ». C'est un réquisitoire qui fait mouche, contre la société actuelle, fragile, matérialiste, aveugle aux signes précurseurs et un avertissement sur ce qui vient et pourrait être la guerre ou toute autre violence de masse. C'est un roman à portée universelle, intemporel et qui parle à chacun d'entre nous car personne n'est à l'abri, qui nous fait immanquablement nous poser la question : « Et moi, qu'est-ce que j'aurais emmené ? »
Cela faisait longtemps que je n'avais pas été aussi émue, secouée par un roman et surtout par l'écriture. Elle est incandescente, et malgré l'arrière-plan dramatique, empreinte de poésie. C'est un primo-roman magistral qui laissera longtemps sa trace dans mon esprit et dans mon cœur.
Merci infiniment à lecteurs.com et et aux éditions J'ai Lu pour cette magnifique découverte et les émotions ressenties.
Un livre fort qui m'a captivée et bouleversée .
Une écriture fluide , poétique parfois qui décrit l'intimité de personnes obligées d'abandonner derrière elles toute leur vie ..
Emouvant et tellement ancré dans la réalité puisque la guerre touche de nombreux pays .
Merci ! je suis ravie d'avoir reçu ce roman de la part de lecteurs.com moi qui vis sur le littoral des hauts de France et qui assiste, impuissante ,aux départs de migrants par la mer , bravant la dangerosité de la traversée de la manche.
"J'écris ces lignes pour rien, je ne les emmènerai pas avec moi, je les laisse ici, personne ne les lira. Je les écris parce qu'il m'a semblé pouvoir comprendre où ça avait capoté. Mais j'ai perdu le fil. Je l'ai senti me glisser entre les doigts, et je n'ai pas le temps de reprendre ces phrases pour le retrouver."
La fête de l'Occident, bonne conscience, trop loin, le désenchantement, crédulité et fragilité, la philosophie de comptoir, tout qui bascule, un tressaillement des corps, le début de l'effondrement, le marasme du chaos, un chemin de sortie, faire de son mieux, un visage clos, le son des pétales, la maison, des mauvais songes, une fade lumière, une nuée de corbeaux, le nécessaire et l'utile, un froid givré, une douleur sourde, les piles de livres, l'espoir comme une âme sans mot, un manteau bleu de libellule, les larmes d'une mère, la guerre affamée, une enfant sans âge, chiner ses restes, l'éclaboussure des mitraillettes, la couleur du passé...
Un grand et sincère merci à lecteurs.com et aux Éditions J'ai Lu pour ce roman humain avec des cendres, du cœur, et une douloureuse poésie.
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