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Inutile de présenter Alfred Hitchcock, « le Maître du Suspense », interviewé par Andy Warhol pour sa revue Interview Magazine, en avril 1974. De quoi peuvent bien parler l'artiste le plus emblématique de la pop culture et le cinéaste légendaire, quand tout semble les opposer ? De cinéma, bien sûr, mais d'une manière nouvelle.
Des grands magasins et de la prolifération des enfants de stars à Hollywood. Mais aussi de Jack l'Éventreur.
Ce long entretien est l'occasion pour Alfred Hitchcock de déployer tout son humour, sans jamais tarir d'anecdotes de tournages, face à un Andy Warhol qui apparaît tantôt nerveux, tantôt fébrile en diable.
Le montage de l'interview, que nous avons choisi de reproduire au plus proche de celui de l'époque, plonge le lecteur au sein d'une pièce de théâtre, parfois absurde, où Warhol et Hitchcock n'hésitent pas à emprunter les habits d'un meurtrier, et à s'imaginer les crimes qu'ils commettraient.
Cet entretien ne se réduit pas à la lumineuse rencontre de deux artistes majeurs, loin de là. Le regard d'Andy Warhol apporte un éclairage nouveau sur l'oeuvre de l'auteur de Sueurs Froides, révélant les obsessions intimes de l'interviewer comme de l'interviewé.
Le vendredi 26 avril 1974, Andy Warhol retrouve Alfred Hitchcock au Park Lane Hotel, à New York.
Cette courte accroche a suffi à susciter mon intérêt lors de la dernière opération Masse critique proposée par Babelio. Je les remercie d'ailleurs pour l'occasion ainsi que les éditions Marest. Il faut dire qu'avec une telle mise en bouche, cela ouvre tous les champs du possible. Deux figures mythiques, deux personnalités hors du commun réunis en un même lieu même si l'un des deux fait ici figure d'intervieweur. La rencontre en question a eu lieu en 1974. Hitchcock a sorti deux ans plus tôt "Frenzy" et Warhol a renoué avec la peinture grâce notamment aux portraits sérigraphiés de Mao Zedong.
C'est donc cette rencontre que les éditions Marest nous propose de revivre, une rencontre qui a eu lieu dans un hôtel et plus précisément dans le restaurant de cet hôtel puisqu'aucun détail de nous est omis. L'interview est précédée d'une longue préface de Pierre Guglielma dont j'ai, personnellement, eu beaucoup de mal à comprendre la pertinence. D'une part, les éléments qui y sont traités reprennent les meilleurs moments de l'interview, et de plus, le décryptage proposé donne parfois l'impression d'interpréter plutôt que d'analyser. Je peux bien évidemment me tromper et suis d'ailleurs assez mal placé pour en juger étant donné ma connaissance moindre de ces deux artistes, mais cela a quelque peu réfréné mon plaisir de lecture. Il aurait été plus judicieux, à mon sens, de placer cette préface à la suite de l'interview et non en prélude.
Une fois le contexte de cet échange assimilé, le parti-pris du réalisme digéré, l'ensemble des protagonistes identifiés, le plaisir de lecture arrive enfin. Pas de classique questions-réponses, mais une conversation au cours de laquelle Warhol s'efface souvent devant le maître du suspense, se contentant de quelques mots, quelques phrases, orientant parfois son interlocuteur vers des sujets aussi variés que l'avortement, la pornographie ou la littérature policière en Angleterre avec à la clef quelques théories sur l'identité de Jack l'éventreur. Il y a bien évidemment de nombreuses anecdotes, toutes plus passionnantes les unes que les autres, sur les décors, les actrices, les contraintes des films de commande ou sur les techniques de mise en scène que je n'énumérerais pas ici pour ne gâcher le plaisir du lecteur. Le tout est entrecoupé de blagues, de silences ou d'interventions de tiers (serveurs, fans, épouse d'Hitchcock qui part faire du shopping).
À l'image de ces deux artistes hors norme, la forme de cet ouvrage est pour le moins original et la lecture qui en découle, déstabilisante. Comme je l'ai mentionné en amont de ce billet, je suis loin d'être un spécialiste d'Hitchcock et j'ai donc apprécié chacune des anecdotes que contient cette interview, des anecdotes que je ne connaissais pas pour la plupart. Toutefois, je me suis posé durant toute la lecture deux questions. La première : À qui s'adresse cet ouvrage ? N'est-il pas trop léger pour le spécialiste et trop ciblé pour le profane ?
La seconde : au-delà de réunir deux légendes, cette interview méritait-elle un livre à part entière. Est-ce que le sens de cet échange n'aurait pas été plus éclatant dans une anthologie d'interviews d'Hitchcock ?
Je laisse aux spécialistes de ces deux monstres sacrés le mot de la fin pour trancher.
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