Dans ce captivant recueil de récits qui est aussi un livre de vie, Russell Banks, explorateur impénitent, invite son lecteur à l'accompagner dans ses plus mémorables voyages - des Caraïbes à l'Himalaya en passant par l'Écosse. Entretien avec Fidel Castro à Cuba, folles virées en voiture à l'époque hippie, expériences diversement radicales, relations entretenues avec ses quatre épouses successives, autant d'étapes formatrices aux allures de quête de soi qui ouvrent chez le lecteur un chemin vers le coeur et l'âme d'un romancier aussi fameux que respecté.
Compilation de dix récits de voyage écrits dans le cadre d’articles destinés à des magazines.
Très imagés avec une description proche du guide touristique géographique, climatique, historique, politique en revenant sur les pas de mêmes circuits suivis par le passé pour en faire un bilan détaillé du temps qui passe tout en incluant une autobiographie ainsi qu’une réflexion philosophique personnelle sur la société, l’écologie et la connaissance de soi.
Dans la première partie, Russel Banks retourne aux Antilles et convoque ses souvenirs de jeunesse, nous parle de l’amour porté à quatre femmes qu’il épousera, essaie de comprendre ses trois ruptures, transmet son goût pour le voyage et dévoile sa vie d’écrivain.
Il nous embarque dans un pèlerinage à Chapel Hill avec une bande de vieux copains sur les traces de l’époque hippie et de Woodstock. (1964 vs 1986). « Nous étions tous plus chauves, plus gras, plus grisonnants et plus prudents qu’à cette époque, mais cette nuit-là, nous avions l’impression (…) d’avoir reversés dans le corps et le visage qui étaient les nôtres vingt ans auparavant (…) ». Un très bon précis si vous voulez visiter Chapel Hill à votre tour.
Puis, il offre au lecteur de visiter les Everglades avec ses îles mangroves et de se perdre dans une nature américaine superbe avec de nombreuses références à Thoreau et un regard sur l’écologie très affûté.
Ensuite, nous partons sur l’île de Goré au large de Dakar réputée pour sa maison aux esclaves. Un regard profond et émouvant sur l’origine des USA, des Américains et de lui-même.
L’auteur n’a de cesse de nous faire partager son regard sur la nature et c’est sur l’île La Digue aux Seychelles qu’il va nous faire rencontrer : « une telle abondance de beauté naturelle que cela m’a presque effrayé. » (…) « Et puis soudain il est apparu ! Le tchitrec des Seychelles – un mâle, un oiseau noir de jais aussi grand que ma main, avec de superbes plumes caudales longues et luisantes – était penché à deux mètres de mon visage ! Un spectacle stupéfiant. Devant moi se tenait un des oiseaux les plus rares de la planète. » Au-delà des descriptions d’une nature incroyablement belle, Russel Banks offre ici, un texte érudit sur l’Histoire des Seychelles.
Edinburg. Voilà une ville que j’affectionne particulièrement et l’auteur aussi. Avec sa quatrième et dernière compagne, ils décident d’aller s’y marier.
Réflexions sur ce dernier amour enfin rencontré sur le tard.
Toutes les infos au cas où vous aussi pensez à convoler en juste noce dans la ville de naissance de Stevenson..
Sur la commande d’un article pour un magazine auto, c’est au volant d’un Hummer rouge que nous visitons l’Alaska profonde.
Quito, 2830 mètres d’altitude. Russel Banks aime l’alpinisme. A Quito, il fait adapter son système vasculaire pendant trois jours et ensuite file vers les sommets des Andes avec entre autre, l’ascension de l’Acongara (6962 m). Passionnant… En Equateur en 1997, il fait l’ascension du Cotopaxi et Sincholagua et celle du Ruminahui, volcan à trois dents (4400 m). « A mi-chemin entre nous et le paramo, deux des 75 condors en vie en Equateur, tels des planeurs aux ailes noires, se laissaient porter par les courants aériens chauffés par le soleil et décrivaient de larges spirales. » Russel Banks décrira ses ascensions pas par pas, avec l’ambiance des autres grimpeurs, son équipement, ses joies et ses déboires.
Trois ans après, il revient dans les Andes pour s’attaquer à l’Aconcagua (6962 m).
Enfin, l’auteur nous invite à le suivre au Népal. « Le vol de Tata Air parti de Katmandu, était un véritable supplice pour l’estomac, et l’avion s’était déjà enfoncé dans l’Himalaya oriental lorsqu’il a brusquement plongé entre des montagnes aux terrasses verdoyantes près de Lukla. Quelques instants plus tard, le DHC-6 Twin Otter s’immobilisait en dérapant sur la piste de l’aéroport Tenzing-Hillary, piste pas plus grande qu’un pré (…)»
Il a 72 ans. Le groupe conduit par deux sherpas, « Nous escaladerions une demi-douzaine de montagnes dont trois dépassaient 5500 mètres : nous franchirions les célèbres trois cols : le Renjo-La, le Cho-la et le Kongma-La. Ponts suspendus, précipices d’où il voit en contrebas es jharals, petites chèvres rousses et il y a là avec le petit troupeau, un mâle « Un vieux bouc, me suis-je dit. Comme moi. »
Russel Banks évoque la vieillesse. Il réalise qu’après 80 ans il ne pourra peut-être plus faire ce genre de trek alors il profite d’un corps qui lui permet encore d’aller crapahuter bien que, il a rencontré descendant prudemment en sens inverse un homme âgé, probablement un septuagénaire comme lui. Ils se sont regardés bien en face sans se sourire ni se saluer. Ils étaient pareils et « ça ne plaisait à aucun des deux ». L’homme était accompagné d’une très jolie blonde d’une trentaine d’années qui finit par forcer la sympathie et ils finirent le trek ensemble. «Au début, il avait été ma Némésis, mon double, le moi que je craignais, quelqu’un de trop vieux pour se trouver là en train de grimper dans l’Himalaya en compagnie d’une personne beaucoup plus jeune, d’une superbe jeune femme, bon sang. A présent, j’admirais ce vieux bonhomme et j’espérais être un peu comme lui. Il ne faisait rien d’autre que prendre la mesure de ses limites physiques absolues, noter la proximité de la fin de tout, s’approcher autant qu’il le pouvait de ce saut dans le vide tout en restant debout sur la planète. »
Dix récits intéressants et agréables à lire, riches en informations et découvertes, à l’écriture plaisante, et surtout, Russel Banks est un écrivain voyageur érudit, simple, touchant et généreux !
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