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Au coeur de la région des Grands Lacs, au milieu du chaos qui dévasta le Rwanda, le Burundi et l'est du Congo où des centaines de milliers de personnes furent assassinées, où des centaines de milliers d'autres durent fuir pour tenter de survivre dans les plus grands camps de réfugiés d'Afrique, où des dizaines de milliers de personnes remplirent les prisons, où des centaines de milliers de vies furent détruites par la misère et le sida, dans ces ténèbres qu'on craignait sans fin, une femme burundaise, Marguerite Barankitse, dite Maggy, apporta une lueur d'espoir en créant un avenir pour des milliers d'orphelins de la guerre et du sida. Il y a quinze ans, Maggy échappa aux machettes des Hutus. Il y a dix ans, pendant la guerre civile, elle risquait quotidiennement sa vie pour sauver des enfants dont les parents avaient été assassinés à cause de leur appartenance ethnique. Aujourd'hui, enfin, c'est toute une société, voire un monde, le monde de la Maison Shalom, que Marguerite Barankitse continue de bâtir autour de plus de 10 000 orphelins qu'elle a recueillis. Cette princesse tutsi, fervente catholique, a appris à « ses » enfants orphelins hutus, tutsis et twas à vivre ensemble. Pour qui rêve d'un renouveau du Burundi, la réconciliation entre les victimes et les bourreaux reste la condition sine qua non. Pour y parvenir, Maggy a toujours enseigné aux enfants la nécessité de pardonner, malgré l'atrocité de leurs souvenirs. Cette grande bâtisseuse a construit sur les terres héritées de sa famille 550 maisons pour accueillir et abriter des « familles » composées d'orphelins, un hôpital qu'on dit l'un des meilleurs de toute l'Afrique, une salle de cinéma ainsi que des fermes. Pour Marguerite Barankitse, que ses ennemis traitent de « folle », la vie et l'espoir seront toujours plus forts que tout. « La haine, promet-elle, n'aura pas le dernier mot au Burundi.» Ce sont les histoires d'un ami de son grand-père, de retour d'Afrique, qui firent naître chez le jeune Pascal Maitre son engouement pour les pays lointains. Depuis 1987, Pascal a réalisé plus de 75 reportages pour Géo, un record parmi les photographes travaillant pour notre magazine. Il a voyagé sur tous les continents, mais, par leur beauté et leur intensité, ses photos d'Afrique suscitent la plus grande admiration. Une seule de ses images peut synthétiser une histoire très complexe. En 1990, Pascal se rend pour la première fois dans la région des Grands Lacs. S'en suivront d'autres voyages. En homme chaleureux, c'est avec le coeur qu'il photographie. En homme lucide, il semble toujours voir un peu plus, un peu plus loin... PAR RUTH EICHHORN Directrice photo Géo Allemagne.
Introduction par Agnès de Gouvion Saint-Cyr et Jean-François Leroy.
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