Jean Cévenne, dans un long poème en forme d'Odyssée, nous fait faire le tour du monde et même nous entraîne bien au-delà des limites de notre planète natale pour ramener dans le filet qu'il projette sur tout ce que son désir aspire à posséder, à ressusciter, à retenir sur la page blanche, ce qui était perdu ou inaccessible. Mais cette invitation à l'errance n'empêche pas l'auteur de regretter, blessé à vif, le point de départ. On connaît l'attachement du poète pour le lieu de ses racines profondes. Le recoin du feu évoque en lui le génie du lieu où, tout proche se dresse ce morceau de planète presque abandonné, la montagne magique, celle de tous les éblouissements et de tous les abandons, l'Aigoual. C'est là que, comme moi, Jean Cévenne est enraciné, les pieds dans le roc des drailles, et le regard perdu au delà des horizons. Le lecteur ne trouvera pas dans ces pages une seule facilité intellectuelle mais une moisson capturée vivante, dans un vagabondage immobile plus rapide que les fusées interplanétaires. Les filets de Jean Cévenne retiennent le miracle de l'instant unique, perdu et retrouvé par la grâce d'une poésie sans complaisance, une poésie innocente accordée au premier matin du monde comme au dernier. - Jean CARRIERE.
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