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Je suis Maïmouna. Je suis sénoufo et malienne. J'ai treize ans. J'ai quatre frères et trois soeurs. Et je suis montée sur le bateau, il y a longtemps, je crois. Un jour, je ne sais pas quel jour, je suis montée sur le bateau car Ma m'a dit, monte. La France ; le Djinn aux cheveux longs couleur de blé t'attend...
Un bien joli conte, sachant que les contes ne finissent toujours pas très bien, où il est question évidemment de voyage , de tempête et de traversée ... une écriture volontairement épurée , un petit opus qui se lit d’une traite où l’émotion est bien au rendez-vous . Un petit ouvrage que nous refermons en nous posant des questions sur ces drames qui ont lieu tous les jours dans l’indifférence ...
Tel le vent marin qui s’abat sur la mer, provocant des déferlantes, ce livre m’a fracassé contre son phare. Celui d’Ulysse. Celui de cet homme, passionné d’écriture, qui a décidé de changer de vie, de s’isoler dans ce haut lieu pour en devenir son gardien. Un ex-financier métamorphosé en « écrivain novice et gardien de phare solitaire. »
Comme Elle, j’ai été ballottée, elle dans les flots, moi dans les pages de son histoire, celle d’un voyage, d’un exil en quête d’une vie meilleure. Quitter son pays, ses racines, sa famille. Pour la France. Accomplir ce voyage long et périlleux à bord de ce bateau, cachée dans une cale puante, à l’issue terrifiante. Grâce à lui, à son courage, elle sera sauvée. « Le Petit Prince ».
Maïmouna a 13 ans, elle est Malienne. Et je peux vous dire que lorsqu’elle va s’ouvrir à Ulysse, pour lui raconter son périple, je me suis retrouvée en mode apnée. J’ai failli me noyer dans ses paroles. Alors j’ai pris une profonde inspiration et je l’ai écoutée, captivée et si émue. « Le pays, c’est là-bas. Où Ma va mourir. »
Ce livre est un condensé puissant : une atmosphère marine dont on ressens les embruns et la solitude des lieux, les mots pudiques puis plus libérés de cette enfant si jeune qui a déjà tant vécu.
Vous l’aurez bien compris, cette lecture fut pour moi une véritable vague géante, sur laquelle j’ai surfé avec un immense plaisir, la boule au ventre et l’émotion intense omniprésente dans mes yeux.
Chère Mona, j’ai découvert votre plume à travers ce roman qui, pour beaucoup, pourrait être un récit. Quelle puissance. Quelle intensité dans un livre si court. Quel est donc votre secret ?
Je remercie Mona Azzam, Babélio et les Éditions La Trace pour ce formidable cadeau.
« Naufragés, nous l’étions tous deux, d’un monde chaotique ».
https://littelecture.wordpress.com/2020/10/02/ulysse-a-dit-de-mona-azzam/
https://www.alombredunoyer.com/ulysse-a-dit-mona-azzam/
Ulysse a dit... est le nouveau roman de Mona Azzam publié aux éditions La Trace fin août 2020.
Immédiatement séduit par la superbe couverture, mon envie de le dévorer a été démultipliée à la suite de la rencontre dédicace avec l'auteur à la librairie l'instant fin août.
« Ulysse sourit. Il revoit à l'instant, comme dans un film, le déroulé de cette journée cruciale où, nommé officiellement dans ses nouvelles fonctions d'adjoint de direction, il s'était levé brusquement, interrompant le discours du directeur en souriant et, sous les regards ébahis des membres du comité de direction, avait prononcé deux mots : JE PARS ! Nul ne comprit sa décision. Certains virent en lui un fou. D'autres évoquèrent un burn-out. Seul Ulysse savait : il était libre et ce phare était la fenêtre ouverte sur la liberté, la liberté d'une vie choisie loin de tout faux-semblant ou diktat. La liberté de pouvoir vivre pleinement sa seule et unique passion : l'Ecriture. »
(Re)Vivre
Ulysse a dit... est découpé en deux parties. La première moitié relate la vie d'Ulysse, sa nouvelle vie, la vie qu'il s'est choisie abandonnant un poste à haute responsabilité et tout le confort moderne pour revenir à l'essentiel en s'isolant sur un phare au milieu de l'océan. Ulysse aspire à revivre, à vivre tout simplement.
Son quotidien est routinier, les visites minimales, les événements rares. L'encéphalogramme est relativement plat.
Et puis … une nuit, son destin bascule. Ce « bruit fracassant », ce bateau échoué, ce corps aperçu. le coeur s'accélère, le compte à rebours est lancé, le danger est omniprésent et pour autant, rien n'arrête Ulysse.
Il doit sauver cette petite fille coûte que coûte.
« C'est l'heure elle a dit. Tu vas partir. Je vais t'accompagner. On va marcher, jusqu'à trouver la mer. Là-bas, le bateau t'attend pour t'emmener, loin. En France. Tu seras en sécurité. L'homme blanc aux cheveux d'or t'attend, au milieu de la mer. Tu auras une vie meilleure. Je me suis levée et j'ai suivi Ma, sans rien comprendre. Je l'ai suivie en me demandant si l'homme blanc, le djinn aux cheveux couleur du soleil, c'était le Petit Prince. Je l'ai suivie dans la nuit, pieds nus et la lune éclairait notre chemin. »
(Sur)Vivre
La seconde moitié de Ulysse a dit..., c'est l'histoire de Maïmouna, cette jeune fille aux yeux caramel. C'est l'histoire d'une migrante « ordinaire », c'est l'histoire d'un rêve d'une vie meilleure pour sa fille, d'une volonté de sauver son enfant, d'une forte détermination d'une mère.
C'est l'histoire de la terreur et du malheur, de l'espoir…
C'est un appel à agir, c'est une volonté de vivre, de survivre. Marcher des kilomètres vers la lumière, vers la liberté.
C'est la voix des oubliés, des « sans-rien », ce sont les mots de leur combat de chaque minute, de chaque seconde pour s'en sortir…
« Ceci n'est pas un mythe homérien. Ceci est une danse primitive, danse des mots nus et envoutés, danses des rimes écumeuses du chant Un.
Ceci est le refrain percutant et dérouté.
Ceci est la voix de Maïmouna qui se lève, porteuse d'embruns, une voix frêle qui essaime et hèle, sans relâche et rebelle, l'inconnu égaré et le passeur de sel.
Ceci est la voix d'Ulysse qui vibre et tournoie au rythme épique. Une voix qui s'insurge, vibrante d'émoi et qui s'élance, en un cri : le cri du griot. »
Hommage à la vie
Ulysse a dit... est un texte si sincère, si fort, si dur… et duquel perce un soleil dans la nuit, des écrits poétiques ensoleillant la nuit noire, des mots sensibles décrivant l'enfer…
Mona Azzam sait parfaitement communiquer par ses mots l'espoir, la peur, la vie, la mort… transmettre des émotions, susciter des interrogations.
Truffé de références littéraires, Ulysse a dit... est bouleversant et tellement, terriblement, tristement d'actualité. C'est un vibrant hommage à la vie servi par une écriture remarquable.
Je le referme les larmes aux yeux, le ventre noué et le Petit Prince guidant mes pensées. Dessine moi un mouton Ulysse.
Ne pas oublier, ne pas banaliser… aller à l'essentiel, aider l'autre.
Je vous le dis : j'ai eu énormément de mal à rédiger cette chronique, à trouver des mots justes.
Je vous le dis : ne passez pas à côté de ce court opus.
Je vous le dis, votre voyage, votre Odyssée sera agitée.
Je vous le dis : le chant de Maïmouna vous accompagnera longtemps…
« Un, deux, trois, nous irons en France
Quatre, cinq, six, oublier l'errance
Sept, huit, neuf, une fois en France
Dix, onze, douze, c'est la délivrance. »
Merci Mona, merci les Editions La Trace.
4/5
L’auteur a une plume ronde et polie comme un galet roulé par les flots ; cela donne une musicalité à ce roman celle des Negro Spirituals, livre de l’exode et de l’émancipation du peuple.
Ulysse se résume à cet acte : « A quarante-cinq, il n’aspirait plus qu’à ceci, cet isolement au milieu de nulle part, entre ciel et mer avec, pour seuls compagnons désormais, les vents et les oiseaux. »
Il en avait assez de sa vie parisienne et de son travail de direction. Alors un jour il largue les amarres pour devenir gardien de phare au large de Gibraltar.
C’est sa liberté.
Puis une nuit, un cri déchire sa solitude. Un naufrage a eu lieu, il ne prévient pas les autorités et va seul porter secours. Trop tard une coque éventrée et échouée, des corps disparus, seul demeure visible un Coran et au moment où il va abandonner il aperçoit un corps frêle qui lutte, c’est Maïmouna, il pense à une enfant de 7 ou 8 ans. En fait elle en a 13.
Maïmouna est l’exemple type de l’enfance sacrifiée.
Elle vient du Mali…
Je n’en dirai pas plus.
C’est un roman court, sûrement trop à mon goût.
Mon bémol de lectrice, mais c’est mon ressenti uniquement, c’est la construction en deux parties, j’aurai aimé que les chapitres s’entrelacent, comme peuvent le faire deux êtres au milieu de nulle part, qui avancent l’un vers l’autre sans le savoir et qui se trouvent pour finir dans un embrassement humanitaire.
©Chantal Lafon -Litteratum Amor 4 septembre 2020.
"Ulysse a dit…", le dernier roman de Mona Azzam, c’est d’abord une magnifique première de couverture, une mer, un ciel de couleurs fondues dans un camaïeu de bleus et de blancs sur lesquels veille un phare. "Ulysse a dit…", le dernier roman de Mona Azzam, c’est aussi un avant-propos plein d’amour, qui dit l’humanité, la vie, la mort.
"Ulysse a dit…" Il a quitté son poste au sein d’une start-up spécialisée dans les placements financiers pour devenir gardien de phare dans le détroit de Gibraltar. Un jour, "un bruit fracassant [le] força à ouvrir les yeux…". Et il le vit, "…semblable à une plume blanche…les flancs éventrés contre les récifs. Un voilier gisait là, prisonnier marin…". Et "C’est alors qu’il l’aperçut, au travers d’un rideau d’écume…Là-haut, au-dessus de sa tête, hissée à une corde, se balançait un corps frêle." Et le destin d’Ulysse bascule.
C’est un chant que Mona Azzam nous donne à écouter, un chant d’une rare beauté, le chant d’amour pour une petite fille et son peuple. Maïmouna, treize ans, a quitté son pays de misère et de terreur, laissé sa maman derrière elle, pour rejoindre un paradis rêvé et pourtant inaccessible, un paradis qui sera bientôt un enfer. Les mots s’emmêlent, se tordent et sombrent au gré des vagues de cette mer, cet océan porteurs de mort. Ils se cognent contre les rochers que surveille le phare. Tel le ressac ils vont et viennent en une musique triste et pourtant mélodieuse. L’écriture est sublime, poétique et riche des divers degrés de langue utilisés selon le narrateur. C’est d’abord la voix de Maïmouna que nous entendons, fragile, hésitante, apeurée. Puis c’est Ulysse "Le Djinn aux cheveux longs, couleur de blé…" qui parle ou plus exactement écrit. Il écrit l’Odyssée, une odyssée contemporaine, la dit, la vit, la fredonne :
"Le bateau plongeait dans les abîmes/ Et je chantais./ Des bruits fracassants retentissaient sans cesse./ Et je chantais./Abdou ne me porta pas mon repas./Je chantais quand même./Le capitaine ne revint pas cogner à ma porte./Moi, je chantais./Ma nuit noire me plongea dans les ténèbres./Et moi, au cœur des ténèbres, je chantais."
Et les mots se transforment, deviennent autres, le rythme s’accélère, et le cœur bat plus fort.
"Ulysse a dit…" est le chant d’un aède, qui berce et nous enveloppe de références littéraires nombreuses, flamboyantes. Homère et Du Bellay veillent. La lecture se fait mélodie et la bienveillance nous caresse. Maïmouna est là, près d’Ulysse pour toujours. Et dans son chant vivent tous les migrants.
"Ulysse a dit…" hommage éblouissant, vibrant, émouvant, à ces femmes, hommes et enfants qui perdent leur vie à espérer gagner un éden inaccessible.
https://memo-emoi.fr
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