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Ludwig Wittgenstein nota un jour dans ses carnets intimes : " Le désespoir est sans fin et le suicide n'y met pas fin, à moins que l'on y mette un terme en se ressaisissant. " Il y a là comme la trace d'une double inspiration : Schopenhauer (avec la question de la vanité du suicide) et Kierkegaard (avec celle de l'infinité du désespoir) - cette inspiration donnant alors toute sa consistance à l'idée proprement wittgensteinienne de " ressaisissement ", sur laquelle se fondent l'origine et la fin de toute démarche éthique. Or, une telle généalogie suggère aussi que Wittgenstein fait partie de ces philosophes pour qui l'éthique n'est pas tant la résultante d'une réflexion rationnelle sur le malheur et le bonheur de vivre, que le fruit, peut-être amer, d'une épreuve cruciale et bouleversante, confinant au silence. Le présent essai voudrait montrer que cette épreuve indicible, qui est celle d'un " tout ou rien ", ne peut manquer de conférer à l'éthique une supériorité non seulement par rapport à la philosophie envisagée comme " critique du langage ", mais aussi par rapport à toute morale engageant face à soi la présence d'un tiers.
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