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Écrit en 1897-1898 à la suite des Nourritures terrestres - «en matière d'antidote ou de contrepoids» -, Saül est le premier texte important composé pour la scène par André Gide. Si le texte fut publié en 1903 au Mercure de France, la pièce ne fut créée qu'en juin 1922 par Jacques Copeau, au Vieux-Colombier. Gide attendait ce moment avec fébrilité. La lecture assez libre qu'il y donne de l'épisode biblique de la succession de Saül, mettant en scène son fils Jonathan et le jeune David, provoquerait un scandale sans égal, dans le prolongement duquel il envisageait de publier la première édition « commerciale » de Corydon (NRF, 1924), son essai sur l'homosexualité. Ces deux textes, d'époque distincte, portaient, sur des registres singuliers, l'une des clés morales de son oeuvre, ce dialogue rare entre abandon de soi et intégrité personnelle, rigueur morale et libres moeurs. Aussi Gide vécut-il comme un échec personnel l'incompréhension du thème central de la pièce, son manque d'impact réel sur le public et le détournement de sens qui put résulter de la mise en scène lors de sa création. Mais l'expérience, toute manquée qu'elle pût être, fut inaugurale (même si, de fait, celle du Roi Candaule l'avait précédée) ; elle faisait dire à Gide en 1929 : «Si Saül avait réussi, qui sait ! je ne me serais peut-être plus occupé que de théâtre.» Voilà qui engage à redécouvrir un drame puissant, profondément ancré dans l'ensemble de l'oeuvre gidienne.
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