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Depuis sa plus tendre enfance, Florence ignore tout ce qui se passe... en-dessous de la ceinture. Elle imagine que le papa met la petite graine dans le nombril de la maman, et puis de toute façon, il est tacitement interdit, dans la famille, de parler de « la chose qui ne doit pas être dite ».
Alors... Florence imagine des scénarii terribles, parfois idiots ; Florence s'angoisse devant le poids de la tradition qui place inéluctablement la femme dans une position inférieure ; Florence, à sa façon, résiste pour ne pas sombrer.
Une BD féministe sur l'enfance d'une petite fille dans une famille catholique traditionnelle.
Un certain nombre de questions la travaille et personne pour lui apporter des réponses : comment on fait les bébés, le pouvoir de père, la soumission des mères, la bêtise des garçons et puis les règles, les règles, les règles.
Nous suivons le balbutiement d'une remise en questions de son éducation, du poids de la religion, du racisme, des traditions et des non-dits.
Je ne suis pas très familière des BD et les dessins simples voire caricaturaux servent les questionnements de l'enfant.
Je me suis bien amusée mais en espérant que les adolescentes vivent mieux leur puberté que Florence.
Malgré le graphisme qui ne me plait pas beaucoup, j'ai trouvé cette BD pleine d'humour et de réalisme sur l'ignorance de tout ce qui est sexuel chez beaucoup de jeunes filles et jeunes garçons. Cette lecture m'a rappelée ce que ma mère me racontait à propos de ce qu'on leur apprenait sur la sexualité : les garçons naissant dans des choux, les filles dans des roses et aucune idée de ce que sont les règles même le jour où ça lui est arrivé. L'auteure évoque bien tout cela, ça sent vraiment le vécu et ça fait peur du coup. C'est là que je me dis, qu'aujourd'hui encore, le sujet reste tabou, qu'il n'est pas tant évoqué que cela en famille et que les séances d'éducation à la sexualité proposées en établissement scolaire semblent primordiales et je suis contente d'être une actrice de cette éducation bienveillante et décomplexante auprès des jeunes.
Un bébé disloqué au chant dissonant ou l’on raconte la petite graine de passer par le nombril pour pousser en bébé et paf un garçon réveille la torpeur c’est quand même mieux qu’une fille dit
dit qui?
l’habitude père mange le pouvoir à la mère qui se soumet
le mépris de tourner en boucle et l’incompréhension
un chant dissonant résonne le dire tordu tabou
protéger les petits enfants et de crier la culotte à retirer quand l’ignorantisme se marie contradictions
amen
Les enfants s’éduquent, l’ignorance ne protège pas elle fantasme, crée du risque, une potentielle exposition à la violence et une absence d’amour de soi pour les sociétalement dominés.
Dès les premières pages j'ai été happée par cette BD. Premier point essentiel : c'est un album autobiographique, et cela rend très réelles les difficultés rencontrées par cette enfant qui vit au coeur d'une famille où la sexualité est tabou. Tout est présent pour que les changements de la puberté soient traumatisants : morale religieuse, absence de figures féminines fortes (à part Jeanne d'Arc auréolée de son surnom de Pucelle), et silence sur tous les sujets concernant de près ou de loin la sexualité.
J'ai beaucoup aimé la façon dont les dessins, qui paraissent si naïfs au premier regard, parviennent à donner vie aux peurs et aux sentiments de la narratrice. C'est un album puissant, à lire absolument.
https://animallecteur.wordpress.com/2020/11/03/pucelle-florence-dupre-la-tour/
Vous aussi vous avez un dossier « lecture » dans votre téléphone avec un tas de capture d’écran de livres dont on entend parler sur internet, dans la presse ou ailleurs ou je suis la seule ? Pucelle était évidemment dans ce dossier et par hasard en allant acheter des livres pour le collège, la libraire m’a naturellement conseillé cette BD. J’étais doublement ravie : je pouvais le lire et en plus le partager avec les élèves.
Alors non, pour ceux qui se posent la question, ce n’est absolument pas une BD pornographique puisqu’elle peut être proposée aux collégiens. C’est une BD sur les tabous de la sexualité encore très présent de nos jours.
Pucelle raconte l’histoire de Florence, l’auteure. ça commence à ses 5 ans lorsqu’elle vit en Argentine puis en France et enfin en Guadeloupe. Florence grandit dans un milieu bourgeois, surprotégé et surtout dans une famille catholique rétrograde. Les enfants sont à la fois surprotégé et livrés à eux-mêmes et leur ignorance, la mère est soumise et le père est absent ou lorsqu’il est là, humiliant. Bref un sublime modèle du patriarcat comme on l’aime avec en plus de cela un prêtre pour qui la femme ne peut pas être épanouie sans avoir d’enfants. Vous pensez que ça se passe aux début du 20ème siècle et bah non pas du tout, l’auteure est née en 1978 autant vous dire que ce n’était pas il y a si longtemps !
Florence s’interroge sur les règles, la maternité, la soumission et le « sexe-faible ». Son ignorance se traduit par une honte et une peur de tout ce qu’il se passe en dessous de la ceinture. Elle va finir par se révolter lorsque son corps va commencer à changer à l’adolescence. Le tout avec humour et tendresse pour la petite fille qu’elle a été.
« Un récit autobiographique puissant, grave et drôle. » La 4ème de couverture résume parfaitement le contenu de cette bande dessinée. Le poids de l’éducation et de la religion, la parole empêchée...toutes ces choses entravent durablement et profondément la découverte du corps, l’entrée dans la sexualité, le rapport à la féminité. C’est cette expérience que l’auteure nous partage, avec un humour plutôt grinçant. Une vraie réflexion, nécessaire, intéressante... Hâte de découvrir la suite...
Sachant que ce roman graphique est autobiographique et que l’auteure est née en 1978, cela fait froid dans le dos dans le sens où ce récit fait penser à ce qu’il pouvait se penser dans les familles dans les années 40 et non de nos jours (à quelques années près). Dans « Pucelle », Florence Dupré la Tour dénonce le tabou autour de la sexualité, la position du père de la famille, la religion chrétienne et ses extrêmes, le racisme. Cela fait beaucoup pour une petite fille mais c’est malheureusement bien réel. C’est la réalité de l’auteure.
En lisant « Pucelle », je fus bouleversée par ce qu’il arrivait à la petite fille, à tous ces non-dits, à ce désarroi, à cette peur qu’elle ressent. Je me suis demandée comment des parents pouvaient laisser leurs enfants dans une telle ignorance. Et comme quoi, le milieu social n’en est pas la cause… Ce récit est brutal, difficile et perturbant. Florence enfant dégage une violence incroyable pour son âge, une violence choquante, une violence que ses parents ne voient même pas. Florence se fait des films comme on dit. Elle se fait des films sur ses règles quand elles arrivent. Elle se fait des films sur les rapports sexuels. Elle se fait des films sur les relations en général.
Les dessins sont à l’image de l’histoire de Florence: ils sont bruts, forts. J’ai ressenti toute la rage de Florence dans ses dessins faits à la main levée comme une envie de dessiner mais rapidement sans donner dans les détails. Et on peut voir toute la rage de Florence enfant dans le portrait qu’elle fait d’elle: une petite fille toujours en colère. Et oui, les dessins ne sont pas les plus beaux que j’ai pu découvrir dans les bd mais ils collent avec le message que veut transmettre Florence ave « Pucelle ». Cette bd est à découvrir par tous pour appréhender les dégâts que peut faire les non dits!
Enfance
Cet album est le deuxième volet (prévu en deux tomes) de ce qui sera un triptyque autobiographique : après « Cruelle »(paru en 2016) et avant « Jumelle » voici donc « Pucelle ». ce vocable est choisi pour le rythme et la rime certes, mais aussi pour l'évocation d'un langage désuet dans lequel il désigne ( sans moquerie) « une jeune fille vierge et pure » et parce que Jeanne d'Arc qu'on surnomme « la Pucelle » représente une « mythologie » (au sens de Barthes) dans certains milieux catholiques et conservateurs qui la célèbrent le premier mai. Or, c'est à ce genre de milieu qu'appartient apparemment l'héroïne Florence qui fréquente d'abord les riches expatriés de Buenos-Aires, puis les institutions catholiques sélect de province ou de Guadeloupe. Pucelle, c'est elle : une petite fille innocente, une « débutante » (sous-titre de ce volume) qui n'a pas encore fait son entrée dans le monde.
Ce roman graphique rappelle par l'emploi d'une bichromie de gris et de rouge et par son sujet la série des « petit Christian » de Blutch qui racontait l'enfance de ce dernier en Alsace un peu isolée et dotée d'amis imaginaires issus de la bd, du cinéma et des dessins animés ainsi que ses premières amours dans des saynètes nostalgiques. L'autrice adulte déclare d'ailleurs en récitatif « ma vie était essentiellement constituée d'une suite de scènes adorables empreintes d'un charme naïf » (p.13) Ici, Florence évolue dans plusieurs paradis : celui de Buenos Aires d'abord, puis Nagot en Champagne et enfin la Guadeloupe. A chaque fois , elle leur dédie des pleines pages. La fillette aime la plage, les bois et la nature sous toutes ses formes. Elle présente ces lieux de l'enfance comme « un eden forestier » (p.43) et de façon hyperbolique qui rappelle parfois les dépliants touristiques avec une multiplication de cases pour tenter d'en cerner toutes les beautés. Ces lieux sont pour elle source d‘harmonie et de bonheur. Elle est une reine en son royaume et les pages qui les évoquent sont plutôt classiques, dans des teintes harmonieuses où prédomine le rose et le gris pâles délavés et légers et l'équilibre de la composition. Cette nostalgie n'est pas sans rappeler « les grands espaces » de Catherine Meurisse. Florence est aussi heureuse de la complicité qui la lie à sa soeur Bénédicte, son alter ego, sa jumelle. A elles deux elles semblent avoir recrée le mythe de l'androgyne : Béné est sa moitié, elles vivent entre elles dans une sorte de félicité.
Ce que savait Florence
Pourtant ce bonheur est troublé dès la scène d'ouverture qui est une prolepse par rapport au reste du récit qui suit l'ordre chronologique. L'harmonie et la complicité qui règnent apparemment dans la sphère familiale sont mises à mal par l'incompréhension de l'héroïne : elle rit pour faire comme les autres mais ne saisit pas les sous-entendus ; de plus , une telle anecdote sur une nuit de noces racontée par une mère très prude au demeurant, est finalement surprenante voire inconvenante racontée devant ce public d'enfants. Ainsi d'emblée, Florence Dupré Latour met en avant le double langage qui règne dans la société et le décalage existant entre l'héroïne et les adultes : la petite fille n'a pas les codes pour comprendre. de la même façon qu'à la fin du XIXe siècle Henry James jetait un regard caustique sur la société anglaise à la fois puritaine et décadente et en dénonçait toute l'hypocrisie en adoptant le regard « candide » de sa petite héroïne qui voyait sans comprendre le manège des adultes et le ballet des adultères dans « ce que savait Maisie ».
Mais à la différence du romancier anglais, ici elle ne fait pas oeuvre de fiction et rédige ses souvenirs. Ce témoignage est particulièrement intéressant car elle retrouve ses perceptions d'enfant et retranscrit fort bien l'ignorance et l'innocence de l'enfance et toutes ses questions sans réponse. Elle souligne comment la fillette est victime d'une éducation dix-neuvièmiste: elle n'a pas le droit de regarder la télé car même les dessins japonais sont jugés « subversifs, immoraux et séditieux » par sa mère et elle découvre la sexualité en observant les animaux sous un prisme déformant et parfois terrifiant : qu'il s'agisse du coït de ses cochons d'Inde cannibales ou du sexe démesuré du cheval de son cours d'équitation. Florence, bien plus que sa soeur jumelle, pose des questions auxquelles on ne lui donne pas de réponse, alors elle comble le vide par l'imagination. L'autrice met en scène la psyché enfantine, ses raccourcis, ses amalgames.
Elle fait preuve de beaucoup d'autodérision et de recul et c'est souvent savoureux et très drôle. Mais cet humour et le côté caricatural et presque cartoonesque parfois du dessin cachent, dans une forme de pirouette pudique et polie, l'horreur de la violence psychologique que subit la fillette. On retrouve aussi en effet dans ce récit un côté tragique. L'oeuvre se mue en une dénonciation comme le souligne la citation d'Hugo mise en exergue : « L'ignorance est un crépuscule ; le mal y rôde. Songez à l'éclairage des rues, soit ; mais songez aussi, songez surtout, à l'éclairage des esprits ». Il s'élève donc contre l'obscurantisme et l'hypocrisie en montrant comment le non-dit et les culpabilités qui en découlent vont avoir des conséquences désastreuses sur la construction de la personnalité de la petite fille.
Le procès
Ainsi ce roman graphique, loin d'être une collection d'anecdotes charmantes ou humoristiques devient un véritable brûlot. le rose pastel se mue en rouge et Florence apparaît -contrairement à sa soeur jumelle- très souvent en colère.
On remarque une métaphore filée : celle de l'angoisse et surtout celle des préjugés et diktats de la religion et de l'éducation qui vont « féconder » le cerveau de Florence. Les paroles du prêtre apparaissent ainsi dans les phylactères comme autant de gamètes et le cerveau de la fillette prend l'apparence d'un ovule tandis que dans une double énonciation, la voix adulte de Florence souligne que ces paroles la « pénétraient sans son consentement. Elle inséminaient (s)on beau, (s)on pur, (s)on précieux jardin mental » (p.85-86) tout comme le discours scolaire « chaque jour, l'école ensemençait mon cortex de ses graines pourries » (P.93). le style bucolique et la vie « en rose » se transforment ici : les noirs et rouges deviennent bien plus présents, la réalité se déforme et devient même difforme : les angoisses se muent en cauchemar et son matérialisés par la figure de l'araignée et d'une boule noire dans la poitrine un peu à la manière des tableaux de Frida Khalo.
La mère semble être celle qui provoque le plus de traumatismes. Elle est dotée d'un long nez comme Pinocchio ( alors que les autres personnages n'en ont pas) pour souligner ses mensonges et ses édulcorations ; elle ressemble à une cane (allusion à sa fonction de « pondeuse » ) ; elle se mue enfin en monstre à l'adolescence de la fillette quand celle-ci cherche à exprimer l'aversion et la défiance qu'elle éprouve à son égard. L'agression psychologique à laquelle elle soumet sa fille et les humiliations qu'elle lui fait subir sont marquées dans le graphisme par le jeu de casse et de couleurs qui matérialisent graphiquement le viol de l'espace secret de l'adolescente par les propos maternels. le paroxysme de cet antagonisme se trouve dans la scène à la fois grotesque et horrifiante du cheval : la mère, comme lors des abus de pouvoirs du père ne fait rien et ne les protège pas.
Florence Dupré-Latour critique non seulement les représentations de la femme dans la religion et l'histoire mais aussi dans la littérature. Elle montre, en effet, combien dans la bande dessinée et la littérature les représentations sont stéréotypées : Falbala, Bonnemine, La Castafiore, Chihuaha Pearl ou encore Constance Bonacieux sont des « êtres fades, rares et secondaires à peine esquissés, relégués dans le silence, le décor ou des positions subalternes » (p.100). Elle va également souligner comment les minorités sont représentées de façon simpliste en montrant combien ceci cause des préjugés sur es noirs avant son arrivée à la réunion ( « Les aventures de Jo et Zette » les présentent comme des cannibales et les fillettes ont peur de se faire manger) ; Ce grossissement du trait dévalorise les représentations de la femme et des noirs dans la bande dessinée et les ravalent à l'absurde. Non seulement , cela va influencer l'adolescente qui en arrive à la conclusion qu'il lui faut être un garçon « pour faire partie des gagnants » et va nier toute féminité en portant les cheveux courts et des vêtements informes ; mais cela va également laisser son empreinte sur l'artiste qui va vouloir s'affranchir des codes masculins de la bande dessinée et mettra systématiquement en place des héroïnes. On a donc aussi , en creux, un roman de l'artiste.
On a donc affaire à un récit sans fard, cru parfois mais toujours juste et souvent poignant sous l'humour et la nostalgie. C'est un album très abouti sous son apparente simplicité graphique par un sens aigu de la narration et du découpage. L'autrice déclare que son « enfance la hante et qu'elle a l'impression qu'elle est en train de débarrasser d'elle en écrivant », Cette catharsis est loin d'être nombriliste car l'oeuvre dépasse le projet autobiographique pour se transformer en témoignage et manifeste sur l'éducation des filles. Indispensable ! je remercie, Florence Dupré Latour, les éditons Dargaud et Netgalley de m'avoir permis de le lire.
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