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Tyara est un Bassari, du moins c'est comme cela que les Européens nomment son peuple, établi aux confins du Sénégal oriental et du nord de la Guinée.
Mais Tyara se nomme lui-même un Beliyan, c'est à dire un "être humain". C'est important car en quittant son village, Tyara n'aura plus beaucoup d'occasion de rencontrer des êtres humains. L'aventure tragique de la traversée du désert et de la mer , la clandestinité, ne suffisent pas à le décourager... S'il a pu survivre à ces épreuves, il pourra travailler au pays des blancs !.. Mais c'est sans compter avec les fauves de la jungle urbaine.
La solidarité des émigrés et l'amitié d'un collègue ouvrier ne suffiront pas... Le caméléon, l'animal sacré des Beliyan, ouvrira les yeux de Tyara...
Que je vous raconte comment celle-ci est passée entre mes mains. D'abord, j'ai lu chez Ys un article concernant une autre BD du même éditeur Le soldat inconnu vivant. Puis, je suis allé sur le site de Roymodus et j'ai échangé deux ou trois mails avec l'éditeur en personne qui m'a dit texto : "je vous conseille "Noir et blanc en couleurs" d'Edoardo Di Muro, la plus belle bd que j'ai éditée à ce jour". Une simple phrase qui évidemment a ouvert ma curiosité. Achat effectué rapidement. Lecture aussitôt et billet qui suit.
C'est effectivement une belle BD. D'abord par les dessins et les couleurs : les nuits africaines bleutées, avec un ciel magnifique étoilé, même les grandes villes européennes sont colorées ; par contre, les traits des personnages ne sont pas parmi ceux que je préfère (c'est difficile à expliquer : disons que les traits ne sont pas aussi précis que dans une BD franco-belge et que parfois, ça me gêne ; j'ai le même souci avec J. Sfar par exemple, mais en plus, lui, ses textes sont illisibles, contrairement à E. Di Muro !)
Ensuite l'histoire : excellente. L'émigration vue par ceux qui la vivent dans leur chair : on devrait faire lire cette BD dans les écoles et notamment du Sud de la France ! La difficulté à vivre dans les villages d'Afrique, le terrible choix de partir et les conditions dans lesquelles le trajet se fait, puis, pour finir, l'accueil des Européens, l'exploitation d'une main d'oeuvre qui se tait, ... Mais cette BD c'est aussi la solidarité, les croyances, notamment celles des Beliyans (Hommes de la terre rouge). Le caméléon, le messager, celui par qui toutes les nouvelles arrivent aussi loin qu'on soit pour peu qu'elles aient été envoyées de l'arbre consacré à Edash Andjang, leur Dieu. Ce n'est pas une confrontation des civilisations en en plaçant une au dessus de l'autre, mais E. Di Muro montre comment il est difficile de s'adapter d'une civilisation à l'autre : "En Europe vous avez inventé les montres, mais nous en Afrique on a inventé le temps... Votre vie est prisonnière comme votre Edash." (p.82) Pas de manichéisme sur les gentils noirs et les méchants blancs ou vice-versa, mais un constat sur les vies de chacun, sur leurs souhaits, leurs ambitions ; pas de jalousies ou d'envies de ce qu'est l'autre, mais une constatation que l'on peut vivre ensemble avec nos différences.
Les Beliyans vivent entre le Sénégal et la Guinée, ils ont pu préserver leurs traditions sociales et sont très dépendants et respectueux de la nature : les esprits veillent sur l'équilibre de l'écosystème, en régulant la transformation de l'environnement et leur impact sur leur milieu. (D'après les notes de fins de volume)
Vous avez donc ce qu'il vous reste à faire, pour ma part, je me porte acquéreur du second numéro de la série à sortir bientôt : L'esprit de la savane !
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