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«J'étais - je suis - hors d'haleine, bête en course. Qui brise mon élan me blesse, qui l'arrête le mutile, qui me retient l'achève. Qui m'enferme me tue. Je suis animal. Tout est animal en moi, dévoyé.» De l'enfance au coeur de la nature, aux longues errances de la jeunesse, Catherine Poulain, retirée aujourd'hui dans le Médoc, raconte les bêtes, frêles insectes, saumon au ventre ouvert, grands fauves tristes et fauconne borgne. Elle confronte son humanité au silence et à la sauvagerie des animaux, impuissante à les rejoindre, à les accompagner. «J'ai seulement voulu parler d'une petite fauconne borgne et à travers elle, de tous ces oiseaux partis que j'appelais en pleurant, de la vie que l'on ne peut enfermer, de la liberté fragile du sauvage, du mourir sans nom au bord du chemin ou tué par plus puissant, de cette altérité à tout jamais perdue, part animale, enfuie avec les autres.»
Après nous avoir relaté son expérience de marin-pêcheur pendant une dizaine d’années en Alaska, dans Le grand marin, son premier roman, multiprimé, puis celle d’une saisonnière agricole en Provence dans Le cœur blanc, Catherine Poulain, cherche à exprimer cette fois, dans L’ombre d’un grand oiseau, sa part animale, sa part de sauvagerie.
Pour raconter sa part animale intime, Catherine Poulain revient sur son enfance et même sa petite enfance dans les Alpes où elle vit dans une trinité sacrée, Dieu (son père est pasteur…), sa famille et la montagne. Elle évoque son amour pour la nature et le monde animal. Elle raconte comment elle prend conscience d’elle-même alors qu’elle a à peine cinq ans, avec la mort d’une mouche, sur une plage immense, qui s’épuise à remonter un creux de sable et qu’un gamin d’un coup de talon enfouit définitivement. Elle découvre ainsi la solitude du vivant. Elle égrène ensuite d’autres souvenirs dans lesquels elle se souvient par exemple, de ses tentatives pour sauver les mouches engluées sur le papier tue-mouches… Elle raconte aussi comment, quand elle a été malade et hospitalisée deux mois, elle a découvert à son retour sa tortue morte de faim et compris alors que posséder était tuer.
Elle nous confie aussi son amour des hauteurs, elle aime monter sur les toits, ayant alors l’impression d’être presque aussi haute que les oiseaux et avoue qu’elle aurait aimé voler, juste voler.
Elle ne rêve que de départs, de décoller, de prendre son essor et de s’arracher au monde. Finalement la route la prend bien avant l’océan.
Éprise de liberté, un besoin d’être dans le mouvement, elle est à la recherche de la frontière entre la bête et elle pour pouvoir la franchir.
La rencontre avec une fauconne blessée la fera se questionner sur notre part de sauvagerie et notre part d’assujetti. Est abordé alors le problème de l’enfermement, de la solitude.
Elle est confrontée également à cette impossibilité de pouvoir retenir le souffle de vie chez ces animaux, ces oiseaux qu’elle recueille, qu’elle réchauffe et qui pourtant meurent, tout comme elle ne peut retenir le souffle de vie de sa mère qui s’en va…
Dans un très beau passage en fin d’ouvrage, Catherine Poulain rend sa liberté aux mots, « Les mots ne sont que des mots, passagers, volatils, fluctuants, semblables aux marées, puissants comme le tonnerre parfois. Rien ne peut les retenir captifs. Seul reste leur chant, le bruit de leurs ailes lorsqu’ils rejoignent le vent, dans ce grand pays plat qui pourrait s’appeler solitudes ou silences. »
L’ombre d’un grand oiseau, référence au poème de Saint-John Perse, de Catherine Poulain, livre de toute beauté et d’une grande intensité qui décrit d’une manière unique, forte et puissante son rapport fusionnel au sauvage, m’a carrément éblouie : une plume sensible, poétique, vivante, ardente, parfois crue, un texte qui m’a happée, m’a emportée dans un tourbillon d’émotions.
Il est également une invitation à découvrir notre propre rapport à l’animalité.
Chronique illustré à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2023/11/catherine-poulain-l-ombre-d-un-grand-oiseau.html
C'est mon 1er livre de Catherine Poulain et quelle splendeur ! Une merveilleuse autobiographie charnelle et poétique tournée sur le monde du vivant. Pas celui des hommes, celui des bêtes.
L'ombre d'un grand oiseau est un magnifique texte né du triste sort des fourmis noires de l'enfance, de la rencontre saisissante avec les fauves aux yeux tristes et du vol des grands oiseaux migrateurs.
Petite fille, la narratrice regarde vivre, lutter parfois pour survivre les petits insectes, les poules, les oiseaux.. Elle fait son propre apprentissage de la vie en les voyant grandir et mourir. C'est une part d'elle-même qui se construit, sa part animale qui jamais ne l'a quittera.
Le récit au gré des souvenirs nous transporte vers un lieu devenu inaccessible et désespéré , celui de la liberté. C'est une injonction à vivre.
L'envie de partir comme une envie de disparaître. Suivre le vol des oiseaux migrateurs tant aimés au gré de l'océan glacé et des sensations.
Le Grand Marin, quelques lignes, belles comme des vers de poésie, elles m'ont touchée en plein cœur.
J'ai été émue par l'évocation puissante et sensorielle d'un passé qui ne reviendra pas, l'enfance dans la montagne, la vieille bâtisse familiale, l'agneau qui ne bêle plus, les départs. Et les tentatives de vivre avec ce qu'il en reste. Entre énergie et désespoir, où toujours il y a un oiseau à sauver.
"J'ai largué vers le monde, cap sur l'infini. Je suis partie. Je suis tellement partie, je n'ai jamais vécu que pour cela vraiment, la séparation. Trancher les amarres, m'y briser le cœur et les reins. L'abandon, de quoi, de qui. De tout."
A découvrir aux belles éditions Arthaud.
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