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Que deviennent les amitiés adolescentes ?
En 1992, Lucile et Clara entrent en quatrième dans le même collège parisien. Parce qu'elles se sentent différentes des autres, elles vont se rapprocher, jusqu'à devenir inséparables. Les années 1990 s'achèvent, un nouveau siècle voit le jour, et Lucile et Clara cherchent à se faire une place dans ce monde qui ne les attend pas et que la crise et l'arrivée du sida fragilisent. Leur duo, aussi incandescent, aussi amoureux que le sont les amitiés adolescentes, est une armure pour se jeter dans ce siècle tout neuf, pour découvrir l'amour et s'inventer une vie qu'elles imaginent ensemble, toujours. En 2001, les tours jumelles s'effondrent, la vie est là, avec ses échardes, avec ses blessures, avec la maladie, la passion, la mort, avec aussi parfois des rêves qui se réalisent... Lucile et Clara, ensemble, oui, mais jusqu'à quand et, surtout, comment ?
De son écriture précise, chatoyante, musicale, Elsa Flageul trace le portrait de deux jeunes femmes d'aujourd'hui que rien n'aura réussi à faire renoncer à leur amitié, même dans les moments les plus dramatiques. À travers leur parcours, c'est aussi toute l'évolution de la société française depuis les trente dernières années qui se déploie sur fond de musique rock et d'événements politiques emblématiques.
Dans son roman, Elsa Flageul dès le départ nous pose les bases de sa profondeur, de son émotion, de la douleur qui sera. Pourtant, elle commence par un chuchotement dans la banalité des bancs d'école et des rencontres amicales, des petits bouleversements qui chamboulent l'enfance et ses mots coulent d'abord en un petit ruisseau, une rivière puis un fleuve impétueux et majestueux qui nous entraîne loin avec elle mais aussi dans nos souvenirs.
Elsa Flageul sait comment créer un lien puissant et marquant avec ses lecteurs, elle les guide à petits mots, leur montre que l'on peut chuter mais que si tout va bien, la remontée sera spectaculaire. Son roman, c'est tout simplement la musique de la vie dans ses bons comme ses mauvais moments, c'est un train qui a fait un flash back pour mieux arriver au terminus et encore si terminus il y a car, au fond, Elsa Flageul et ses mots ne nous quittent pas vraiment même après la dernière page, le dernier mot ; on est toujours là, à aimer comme elle et ses mots, la vie. Une amitié donc pas si banale que cela, comme tant d'autres, qui respire le bonheur d'être en vie sous les douleurs qui passent.
On remerciera Elsa de nous avoir plongé dans un passé qui nous porte encore sans le savoir, ses fantômes flottent toujours en musique, en image... Nous aussi, nous le savons nous avons été des mijaurées, des petits tatoueurs de vie et nous avons grandi. Seulement nous gardons en mémoire et dans notre corps, cette part d'enfance et de passé qui font ce que nous sommes, qui nous font mener nos chemins de vie et qui fera toute la différence comme le roman d'Elsa Flageuul, qui sous l'insouciance de sa couverture opère comme un baume, nous offre un réel trésor et semble à la fois intemporel et bien présent pourtant.
A la fin, la tristesse fait place à l'apaisement, le coeur cogne de voir la beauté de ce qui est autour de nous et du roman à peine terminé.
Les mijaurées, c’est Lucile et Clara, deux très jeunes Parisiennes des beaux quartiers qui fréquentent un collège élitiste et qui passent des vacances sur une île suédoise.
Oh là là, me direz-vous, quelle accumulation de clichés, ça doit être un livre imbuvable.
Eh bien non, vraiment non, je l’ai lu d’une traite, j’ai souri, pleuré, me suis attachée à ces deux filles drôles, originales, à côté de la plaque, heureuses parfois, frappées par le malheur assez souvent et qui avancent dans la vie, bras dessus, bras dessous, vivant leur amitié de façon fusionnelle et vous entraînent avec elles, dans leur sillage. Oui j’ai aimé vivre avec elles, partager leurs joies et leurs inquiétudes. J’ai eu du mal à les quitter à la fin du livre et si Elsa Flageul m’entend, je lui demanderais bien des nouvelles de mes deux copines car oui, c’est ce qu’elles étaient devenues, des copines !
Alors, comme je le disais, certes, elles habitent les beaux quartiers mais, petit bémol, dans des appartements loi 48. Oui, elles fréquentent un collège prestigieux, près du Panthéon, mais elles ne sont pas très bonnes élèves et ne se sentent pas vraiment à leur place parmi ces « petits-bourgeois bien peignés et bien mis ». Elles se rencontrent en quatrième et ce n’est pas le coup de foudre : Clara évite soigneusement cette jeune fille « longiligne et gauche », un peu godiche, passionnée de GRS et de basket dont on dit « qu’elle ne se lave pas… et qu’elle se nourrit de yaourts périmés ». Mais Lucile a élu Clara, elle a tout de suite su qu’avec cette fille, ce serait à la vie, à la mort : « Lucile a tout de suite compris que nous deviendrions inséparables… non comme une prédiction hasardeuse, non comme une prémonition obscure mais comme une décision, comme un choix, elle a décidé que je serais sa meilleure amie… » Puis Lucile invite Clara, chez elle, dans un vieil appartement poussiéreux aux vitres opaques qui sent le tabac et les croquettes pour chat et où le parquet craque. Rien à manger dans le frigo. Et Bob Dylan, le chat obèse, qui évolue plus ou moins gracieusement dans tout ça. Des parents séparés mais qui s’aiment encore. Une mère suédoise qui fume le cigarillo, porte des sabots, ne regarde jamais la télé et ne cuisine que des pâtes. Bref, pour une fois, Clara se sent bien chez une amie. Il faut dire que chez elle, on ne court pas non plus après la norme : une mère divorcée, un copain sans-papiers viêt-công, pas de poupées Barbie ni de séries américaines à la télé (« ça rend débile »). La mère est prof et part l’été en Ardèche avec ses trois gamins, un copain homo, une copine célibataire : « …rêvasserie, camping sauvage, crasse entre les doigts de pied… » Voilà le tableau ! Et ces deux filles ne vont plus se quitter : collège, lycée, vacances en Suède chez Lucile, premières amours et premiers soucis aussi… Les failles dans l’amitié…
Et l’Histoire comme toile de fond : le sida, les attentats, le 11 septembre : « début de la sidération que m’inspire le monde moderne » dira Clara.
C’est un peu le tableau d’une époque, des années quatre-vingt dix, d’une génération que nous décrit l’auteur à travers le parcours de ces deux amies. Derrière la légèreté apparente, on sent de la gravité, de la souffrance : le monde est violent et il faut trouver sa place et avancer malgré tous les doutes que l’on a sur l’avenir et les craintes qui nous accompagnent au jour le jour.
Vraiment, un très beau texte, une leçon de vie et de bonheur…
Longue vie aux mijaurées !
http://lireaulit.blogspot.fr/
Un livre magnifiquement écrit qui nous emmène avec lui dans les grands bonheurs et les petits tracas de l'amitié.
D'une plume vraie et fluide, Elsa Flageul nous livre un roman dans lequel nous aurions pu vivre chaque phrase...ou peut-être les avons nous vécues...nous aussi...
Ma critique complète
https://emiliaetjean.wordpress.com/2016/02/22/nous-sommes-toujours-la/
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