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Je poursuis mon exploration de la littérature du continent africain après l'Afrique du Sud avec "Comme si j'étais née de toi" de Susan Newham-Blake, le Cameroun avec "Coeur du Sahel" de Djaïli Amadou Amal et la Tunisie avec le magnifique "Bel abîme" de Yamen Manaï.
Me voici cette fois au Maroc, où nous faisons connaissance de Meryem au moment fatidique où elle quitte la liberté et l'insouciance de l'enfance où elle pouvait jouer dehors, avec des garçons, où les hommes de la famille la chouchoutaient pour devenir une femme; ce qui pourrait être un passage heureux est pour Meryem synonyme de séparation d'avec les hommes, de recherche d'un mari, d'arrêt des études. A 17 ans, elle se marie avec Omar, 27 ans, en croyant l'aimer parce que c'est un beau parleur et il a de l'argent; sa vie devient un enfer et son mari la répudie un an et demi après les noces.
Pour échapper à la honte, elle émigre clandestinement en France pour rejoindre sa soeur aînée, Aïcha, veuve, qui vit chichement à Paris, en faisant des ménages. Malgré la peur d'être arrêtée et expulsée, car sans papiers, même si elle se fait passer pour sa soeur, malgré la dureté des conditions de vie, elle se fera une amie, découvrira l'art grâce à un de ses employeurs et fera la connaissance d'un philosophe, également sans papier, dont elle se sent très proche. Un terrible drame change sa vie et lui permet d'être libre d'étudier, d'aimer, de travailler.
Ce roman nous fait découvrir la société marocaine dans les années 90, de l'intérieur, du point de vue d'une femme et le tableau n'est pas réjouissant. L'exil en France ne l'est guère plus mais il est, cependant, porteur d'espoir. Kabira Beniz met dans la bouche de ses personnages des mots de reconnaissance à l'égard de la France même si les procédures très lourdes, très longues, désespérantes font l'objet d'un réquisitoire, même si Meryem ressent parfois du mépris à son égard.
Le voile, qui donne son titre au roman, est présenté de façon très ambivalente : à la fois artifice de respectabilité, moyen de passer inaperçue dans la rue, protection contre le regard insistant des hommes qui devient, après les attentats islamistes, symbole d'appartenance à une religion du crime, de peur dans le regard des autres
J'ai ressenti de l'empathie pour Meryem et pour Aïcha, de la colère face à la façon dont elles ont été traitées (espérons pour toutes les femmes marocaines, qu'en 2022, leur sort se soit amélioré); j'ai cependant un peu regretté que tout devienne rose à la fin du roman, comme un coup de baguette magique, ce qui me paraît peu crédible et fait perdre un peu de sa force au roman.
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