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Dans notre vie quotidienne, nous côtoyons à tout moment les animaux. Non seulement, des chats ou des chiens partagent nos maisons, mais nous croisons, tout au long de nos journées, des poules, des lapins, des vaches, des rats, etc., de façon souvent très discrète : ces animaux se trouvent dans nos assiettes, bien sûr, mais aussi dans les vêtements et les chaussures que nous portons ou derrière les produits de beauté et les médicaments que nous utilisons.
Pourtant, nous refusons souvent d'admettre qu'il a fallu tuer, interrompre une vie individuée et désireuse de se poursuivre, pour pouvoir bénéficier de ces « produits finis ». En effet, la mise à mort est parfois insoupçonnable et contre-intuitive - comment deviner la présence de gélatine de porc dans un sorbet ou dans des bonbons ? - ou bien elle n'est pas visible car elle ne représente « qu' » une étape dans le processus de fabrication, comme c'est le cas pour toutes les substances testées sur les animaux.
À travers l'étude de gestes qui peuvent apparaître insignifiants - écraser le moucheron qui passe devant nos yeux, par exemple - ou de pratiques à bien plus grande échelle, comme l'élevage industriel et l'expérimentation animale, l'auteur nous pousse à nous questionner : que nous apprennent ces pratiques ? Sont-elles justifiables ? Pourquoi la reconnaissance du caractère sensible des animaux provoque-t-elle aujourd'hui de tels débats ?
Il s’agit d’un essai synthétique (c’est le principe de la collection Dans le vif) qui a l’avantage de présenter une problématique de façon concise et claire, d’aller droit au but, tout en explorant plus particulièrement certains points mais qui présente l’inconvénient d’être un peu frustrant du fait de sa concision.
Cet essai est donc une invitation faite au lecteur de chercher des compléments d’informations ; il ouvre des pistes à celui qui ne s’est jamais vraiment posé de questions ou qui croit savoir, grosso modo, ce qu’il en est.
Ce texte est à rapprocher de La libération animale de Peter Singer car les deux ne s’occupent que de la consommation alimentaire d’animaux et d’expérimentation. Même si Florence Burgat évoque fort bien le sujet de la laine et du cuir notamment, cela reste anecdotique.
En outre, les deux auteurs sont philosophes. La différence tient à l’approche. En matière d’analyse, Burgat s’intéresse plutôt aux aspects psychologiques comme la dualité des comportements en fonction des animaux considérés (on cajole le chat mais on mange la vache). Or Singer a une approche utilitariste : est-il justifié d’exploiter les animaux ?
Florence Burgat souligne l’incohérence du comportement de la majorité des personnes, incohérence due à un « parasitage » de la pensée.
« Nous voulons concilier l’inconciliable, alors que, si nos dispositions psychologiques à l’égard des animaux étaient claires, nous serions une écrasante majorité à cesser tout simplement de les manger, ouvrant ainsi une brèche dans l’orthodoxie humaniste. »
Avant de pouvoir juger de l’expérimentation animale, l’auteur rappelle : « Une connaissance minimale de la nature des expériences est requise pour la formation du jugement, en particulier lorsqu’il s’agit de réfléchir au prix qu’il est demandé de payer à d’autres que soi, étrangers à cette prise de position et privés de la possibilité de consentir ou de refuser. »
Car nous estimons bien trop vite que c’est une nécessité, pire une fatalité. On oublie aussi que les expériences ne se limitent pas à la recherche médicale ou aux cosmétiques. De nombreux produits d’usage courant sont testés mais comment savoir quels sont ceux qui l’ont été ? Les marques jouent sur l’absence d’informations qui est toujours plus vendeur que la mention « testé sur les animaux ».
« Il y aurait les cosmétiques d’un côté et la recherche médicale de l’autre. Rien n’est plus faux […] [Le] caractère indispensable et insubstituable [de la recherche médicale] ne fait pas l’unanimité dans le monde médical lui-même. »
En effet, si vous croyez que la recherche médicale ne se livre qu’à des expériences nécessaires, renseignez-vous : vous pourriez avoir des surprises (l’essai de Peter Singer est fort bien documenté).
On pourrait aussi relever en particulier l’absence de fiabilité de l’extrapolation à l’homme de données obtenues par le biais d’expériences menées sur des animaux mais aussi que : « On sait fort bien produire les résultats qui seront les plus favorables à une demande d’autorisation de mise sur le marché … »
Cela devrait à tout le moins faire réfléchir et ajoutons à cela les scandales de médicaments retirés du marché car ayant démontré leurs effets dévastateurs sur les humains alors qu’ils avaient été testés et validés sur les animaux.
Il y aussi ce que pointe Gill Langley, une scientifique britannique : « Il est invraisemblable, précise encore Gill Langley, avec d’autres, qu’un état induit chez l’animal puisse expliquer les causes d’une maladie humaine. »
Florence Burgat rappelle enfin l'aspect économique de l’expérimentation animale.
On pourrait faire un parallèle avec les industries alimentaires reposant sur l’exploitation animale (viande et lait essentiellement) qui n’ont aucun intérêt à un changement de modèle et dont les lobbys sont puissants. Quant aux animaux élevés pour servir de cobayes, au matériel d’expérimentation, etc., Peter Singer en rend compte de façon édifiante dans La libération animale.
Les collusions entre les médecins et les laboratoires pharmaceutiques méritent que chacun se pose la question de la façon dont nous sommes soignés et orientés.
Bien que bref, le texte évoque de nombreux aspects dans nos relations aux autres espèces animales. Aussi, s’il n’a pas vocation à développer toutes ces pistes, cet essai étudie rapidement une bonne partie des questions en jeu sur le sujet. Il mérite d’être lu pour se faire une idée générale qui conduira à d’autres lectures (une bibliographie est fournie en fin d’ouvrage).
« L’idée que la fin justifie les moyens est un enfer apparemment pavé des meilleures intentions. Que l’on comprenne bien que tout peut être défendable par ce biais argumentatif et que l’utilité peut tout cautionner dès lors que l’on a décidé de s’en tenir au seul point de vue du bénéficiaire. »
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