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Les dessins d'écrivain, à la différence des dessins d'artistes, ont pour particularité de prendre place dans la page écrite du Journal ou dans le corps du récit dans les cahiers. Ils entretiennent un lien organique avec le texte pour l'anticiper, le préparer, l'illustrer, montrer à la façon de la peinture et de la calligraphie chinoises, une analogie graphique entre trait d'écriture et dessin, ou tout simplement faire une pause ludique. La page autorise une perception unifiée d'un dessin et d'un texte, d'un mot et d'une image. Entre les deux éléments la circulation de l'oeil tisse des liens, construit des chemins, fraye des traverses, exalte des jointures. Ainsi est transgressée la ligne imaginaire qui sépare les deux aspects de la création.
Apparaissant au XIXe siècle dans une période où les genres se mélangent et les artistes échangent, ces graphes, gribouillis, griffonnages marginaux et asociaux, écartés de la publication par les éditeurs, demeurent au ban de la reconnaissance littéraire. Les dessins de Kafka ont connu une destinée plus singulière. Son ami Max Brod les découpait pour les sauver des corbeilles à papier où Kafka les jetait.
Deux dessins ouvrent le Journal de 1910, étroitement associés à des textes qui interrogent Kafka sur la possibilité et la légitimité de la création artistique. Celui de « l'Acrobate » qui défie l'équilibre répond au désespoir de l'aporie de l'écriture développée par le texte. Le graphisme élégant du dessin libère la main de l'écriture et impulse l'essor nécessaire à la création. Le mouvement du « Coureur » offre le paradigme de la création exultante qui permet à l'écrivain non pas de se dépasser, tel « l'Acrobate », mais de « sortir du cadre » de la page, de se libérer de l'ordre linéaire et de permettre l'ouverture et l'illimité. « L'Arpenteur », à l'inverse, marque un autre temps de la création : enfermé, l'écrivain est immobilisé, et l'aventure romanesque est désormais impossible. Ces trois temps, non catégoriques, forment tout au long de son univers poétique des pôles emblématiques.
D'autres dessins moins importants, montrent que Kafka ne cesse chercher quelle représentation donner de lui-même en tant qu'écrivain. Un certitude cependant émerge : écrire est plus important que de publier,
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