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Née à Zurich en 1908, morte prématurément en 1942, Annemarie Schwarzenbach fut tout à la fois écrivain, journaliste, photographe et archéologue. Thomas Mann la qualifiait d'" ange dévasté ", Ella Maillart l'immortalisa dans La Voie cruelle. Sa vie fut marquée par les voyages et la morphine, par des amours saphiques malheureuses et par son amitié avec Klaus et Erika Mann, auprès de qui elle s'engagea dans la lutte contre le nazisme. Les Éditions Payot, qui lui ont consacré une biographie très remarquée (Annemarie Schwarzenbach ou le mal d'Europe, par D.L. Miermont, 2004), ont déjà publié de cet auteur La Mort en Perse (PBP n° 342), Loin de New York (PBP n° 600), Orient exils (PBP n° 384), Où est la terre des promesses ? (PBP n° 499) et Le Refuge des cimes (2004).
Le 12 octobre 1933 à la gare de Genève, Annemarie Schwarzenbach monte dans l'Orient-Express à destination d'Istanbul. Deux semaines plus tard, en Suisse alémanique, la Zürcher Illustrierte fait sa couverture avec un portrait pleine page de la belle inconnue. La rédaction y annonce que la " journaliste-photographe " se trouve en Orient pour un périple à travers la Turquie, la Syrie, la Palestine, l'Irak et la Perse, et qu'elle réserve à l'hebdomadaire l'exclusivité de ses reportages. Ce que le rédacteur en chef omet de préciser, c'est qu'Annemarie compte aussi tenir un journal pour en faire la matière d'un prochain livre (ce sera Hiver au Proche-Orient), qu'elle est partie pour six mois et qu'elle va rejoindre un groupe d'archéologues pour les accompagner sur un grand nombre de chantiers de fouilles, entre Istanbul et Persépolis.
En avril 1933, elle a lancé le concept d'une revue antifasciste, Die Sammlung, mais en même temps elle se sent incapable de demeurer sous le " nuage noir " qui commence à empoisonner l'Europe depuis l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Ses amis Klaus et Erika Mann se sont volontairement exilés dès mars 1933. Elle aussi va choisir la fuite, mais celle-ci doit donner une orientation constructive à sa vie. C'est pourquoi, tout comme ses articles, son journal s'attache aux réalités des pays traversés, aux rencontres avec les autochtones, aux excursions souvent périlleuses dans les montagnes et les déserts, sous oublier les visites de sites archéologiques. Toutefois, sous le choc de ce premier contact avec l'Orient, qui représente pour elle une " plongée dans l'intemporel et l'incertain ", la voyageuse ne peut s'empêcher de confier quelques réflexions d'ordre existentiel : impossible en effet de taire l'angoisse engendrée par la vastitude et la solitude de ces contrées qui lui inspirent des descriptions particulièrement poétiques.
Hiver au Proche-Orient s'achève sur les rives de la mer Caspienne, juste avant l'embarquement pour Bakou. Annemarie Schwarzenbach retrouve la Suisse en avril 1934 et son livre paraît à Zurich en novembre. Ce voyage marquera profondément sa destinée. Au cours de périples ultérieurs, l'Orient deviendra pour elle le symbole de l'égarement existentiel de l'être humain.
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